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Référendum, impôts, plans sociaux... Ce qu'il faut attendre de l'interview d'Emmanuel Macron ce mardi soir

Un homme regarde une interview télévisée d'Emmanuel Macron le 24 septembre 2023

Un homme regarde une interview télévisée d'Emmanuel Macron le 24 septembre 2023 - Geoffroy VAN DER HASSELT / AFP

Le chef de l'État signe son retour dans la vie quotidienne des Français ce mardi 13 mai lors d'une longue interview sur TF1. L'occasion pour lui de reprendre la main en annonçant probablement une consultation des Français tout en donnant son point de vue sur d'éventuelles hausses d'impôt.

Opération reconquête. Relativement discret sur la scène française ces derniers mois à l'exception de déplacements-surprise, omniprésent sur la scène internationale, Emmanuel Macron veut reprendre la main presque onze mois après le fiasco de la dissolution.

Au menu: une interview sur TF1 au format inédit pour évoquer "les défis de la France" tout comme probablement ses dernières grandes mesures avant son départ de l'Élysée au printemps 2027.

• Un ou des référendums? Oui mais...

Premier sujet sur la table: l'organisation d'un, voire de plusieurs référendums, le même jour. Régulièrement brandie par le chef de l'État ces dernières années, évoquée à nouveau lors de ses vœux aux Français le 31 décembre dernier, l'organisation d'une grande consultation des Français devrait très probablement être annoncée par le président.

Mettra-t-il ses pas dans ceux de François Bayrou? Le Premier ministre a expliqué souhaiter organiser un référendum sur le redressement des finances publiques en avril dernier. La méthode vise à donner de l'air au locataire de Matignon qui sait risquer la censure lors du prochain budget de l'État et de la sécurité sociale à l'automne prochain.

En cas d'accord des Français pour réduire les dépenses publiques, il deviendrait alors très compliqué pour l'Assemblée nationale de renverser le chef du gouvernement, assurant au centriste le maintien à son poste. Mais en macronie, pas grand monde ne croit pas à cette hypothèse.

"Je ne le vois pas aller sur ce terrain tout simplement parce que le Conseil constitutionnel pourrait tout à fait dire non à un référendum ce thème-là", explique un député Renaissance.

Et pour cause: l'article 34 de la Constitution précise que c'est au Parlement de "déterminer les ressources et les charges de l'État".

Autre ballon d'essai de François Bayrou qui pourrait être écarté: un référendum sur la retraite. L'idée lancée par le Premier ministre en février dernier avait suscité la colère des partenaires sociaux, réunis en conclave pour "améliorer" la réforme du passage à 64 ans.

"Avec le recul, ce sera probablement la seule grande réforme de son second quinquennat. C'est niet pour y toucher, encore moins dans un contexte où on cherche des économies partout", décrypte un conseiller ministériel.

À l'Assemblée, beaucoup évoquent la question de plusieurs référendums qui pourraient être organisés le même jour "avec des sujets très concernants" comme l'interdiction des écrans ou des téléphones pour les plus jeunes, déjà évoquée par le chef de l'État lors d'une conférence de presse en janvier 2024 puis en juin 2024.

Autre sujet potentiellement sur la table: l'organisation d'un référendum sur les collectivités territoriales pour simplifier les différents niveaux de responsabilité.

"Ça paraît un peu ardu, mais quand vous expliquez aux gens que ce serait bien que les écoles et les ordures soient gérées par les mêmes personnes pour coûter moins et être plus efficace, ça leur parle", sous-titre un sénateur macroniste.

Quant à consulter les Français sur l'ouverture à l'aide active à mourir, pas grand-monde n'y croit. "On est en train de débattre à l'Assemblée nationale là-dessus, ce serait quand même très bizarre", remarque un député engagé sur le dossier. Sans compter que le président a déjà organisé une Convention citoyenne en la matière.

• En pleine explosion du chômage, la défense probable des entreprises

Second sujet sur la table: la cascade des plans sociaux ces derniers mois, de Jennyfer à Vercorex en passant par ArcelorMittal ou Auchan. Le nombre de demandeurs d'emploi a enregistré une forte hausse ces derniers mois (+3,9% pour les personnes sans activité).

Une telle augmentation est du jamais-vu depuis une décennie en dehors de la crise du Covid-19. De quoi fortement amputer le bilan d'Emmanuel Macron qui n'a eu de cesse ces dernières années de mettre en avant son bilan en matière d'emploi.

"Il n'a pas la main là-dessus. Tout ça relève de Bercy, mais je pense qu'il va faire un plaidoyer pour dire qu'il faut continuer à être une terre pro-business et ne surtout pas augmenter les impôts pour les entreprises", résume à grand trait un ancien ministre LR.

Le budget de l'État en 2025 a mis à contribution les entreprises les plus profitables qui touchaient un chiffre d'affaires supérieur à un milliard d'euros à l'instar de LVMH ou d'EDF. De quoi ramener dans les caisses huit milliards d'euros.

Si le ministre de l'Économie a déjà expliqué sur BFMTV que le dispositif "ne sera pas reconduit" en l'état, il est fort probable que la participation des compagnies les plus rentables à l'effort national se posera à nouveau dans les prochains mois.

En octobre dernier, Emmanuel Macron avait déjà appelé ce dispositif à être "limité" dans le temps. Nous ne devons "pas surtaxer" les entreprises car "nous n'avons pas de grandes marges de manœuvres fiscales", avait expliqué le chef de l'État au lendemain du discours de politique générale de François Bayrou. Autant dire que le président a toutes les chances de rappeler qu'il est opposé à une hausse dans la durée des entreprises les plus profitables.

• Haro sur les impôts?

Troisième dossier chaud: l'éventuelle question d'une hausse des impôts sur les Français pour tenter de redresser les finances publiques. Un vrai casus belli pour le chef de l'État qui a supprimé à la fois la redevance télévisuelle tout comme la taxe d'habitation tout en diminuant les impôts pour les plus aisés.

"On n'a pas arrêté de chercher à baisser les impôts dans un moment où les gens vivaient mieux. On va quand même pas les augmenter alors que tout le monde fait attention à son porte-monnaie. Le président va probablement juste rappeler le bon sens", avance un député Renaissance.

Pour l'instant, aucune hausse de la TVA ou de l'impôt sur le revenu - payé par la moitié des contribuables français- n'est sur la table. Mais la désindexation des pensions de retraite tout comme la fin de l'abattement fiscal pour les retraités restent dans un coin de la tête de François Bayrou, comme la "contribution modeste" pour financer les services publics des communes défendue par son ministre des Collectivités François Rebsamen.

Quant à la contribution exceptionnelle pour les plus aisés votée en janvier dernier, qui touche les célibataires à partir de 250.000 euros par an et 500.000 euros pour un couple, elle a toutes les chances d'être pérennisée.

"Je pense qu'il va dire qu'il faut faire attention à tout ça sans non plus aller trop loin dans le détail. Il a quand même gardé un mauvais souvenir de la CSG pour les retraités", rappelle un ex-député Renaissance. Après l'avoir augmenté en 2018 pour une partie des retraités, le chef de l'État avait finalement fait marche arrière.

• Vers la demande d'une nouvelle hausse du budget de la Défense

Quatrième dossier brûlant: la scène internationale, plus de 100 jours après le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche.

Emmanuel Macron devrait longuement revenir sur la question des droits de douane portés par le milliardaire américain et qui pourraient peser sur de nombreux secteurs français à l'exportation, comme le vin, l'automobile ou encore l'aéronautique. Pour l'instant, les marchandises européens sont ciblées par des droits de douane supplémentaires de 20%.

Si l'inflation a baissé dans la zone euro ces derniers mois, tout en restant élevée, les tensions commerciales risquent bien de la faire remonter.

"Il va probablement rappeler que tout ça pourrait clairement augmenter les prix en France et qu'il va continuer de se battre au niveau européen", décrypte un député Modem, bon connaisseur des questions économiques.

"Je le vois bien dire au passage que tous ceux qui disent qu'on s'en sortirait mieux sans l'Union européenne font moins les malins en ce moment", avance encore cet élu, en visant le Rassemblement national.

Quant au projet de trêve entre la Russie et l'Ukraine, sur la table depuis la visite du chef de l'État et d'autres de ses homologues européens à Kiev le week-end dernier, il devrait donner du grain à moudre à Emmanuel Macron pour plaider une hausse du budget de la Défense.

François Bayrou a confirmé en avril dernier un effort supplémentaire de 3 milliards d'euros en 2026. Le chef de l'État défendra-t-il un chiffre encore plus important, notamment en cas de présence d'une force de réassurance sur le terrain avec "un caractère de dissuasion à l'égard d'une potentielle agression russe", comme il l'avait expliqué en mars dernier lors d'une réunion à Paris autour d'une trentaine de pays?

La question se pose tout comme le contour précis de ce dispositif. Combien de militaires faudrait-il envoyer alors que la plupart des pays européens peinent à recruter pour leurs armées? Quels matériels utiliser? Qui pour commander et avec quel mandat? Autant de réponses attendues par les partenaires européens de la France si la trêve entre Kiev et Moscou prend bien forme.

Marie-Pierre Bourgeois