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"Il nous faut engager quelques ruptures": Sébastien Lecornu annonce "renoncer à l'article 49.3" de la Constitution

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Le Premier ministre dit vouloir se passer de ce puissant article constitutionnel pour gouverner, avant sa rencontre avec le RN, puis le PS, qui menacent l'un et l'autre de le censurer.

Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures" lors de sa passation de pouvoirs avec François Bayrou le 10 décembre dernier. Trois semaines plus tard, le nouveau Premier ministre en annonce une: il a "décidé de renoncer à l'article 49, alinéa 3 de la Constitution", lequel "permet au gouvernement d’interrompre les débats", "d’engager (s)a responsabilité" et "d’écrire (s)a copie."

"La Ve République est présidentielle, semi-présidentielle si on est précis, mais elle peut être aussi parlementaire (...) Mais pour cela il faut que chaque député puisse avoir du pouvoir, puisse prendre ses responsabilités. Au fond, c’est cela qui nous empêche d’avancer: la capacité à ce que le débat démarre", s'est justifié le chef du gouvernement depuis le perron de Matignon.

"On ne peut pas passer en force"

"C'est un outil utile, mais c’est un outil plutôt imaginé par Michel Debré (l'ancien Premier ministre, père de la Constitution de la Ve République, NDLR) pour contraindre sa propre majorité. Or dans un Parlement qui fonctionne (...), qui ressemble aux Français avec ses divisions, on ne peut pas passer en force et contraindre son opposition", a poursuivi Sébastien Lecornu.

Enfin, le Premier ministre, fort de "cette nouvelle méthode", a appelé les formations politiques à prendre leurs responsabilités pour l'examen du prochain budget, expliquant:

"Dès lors que le gouvernement ne peut plus être en situation d’interrompre les débats, il n’y a plus aucun prétexte pour que ces débats ne démarrent pas la semaine prochaine."

Cette annonce de Sébastien Lecornu est tout sauf anodine. Elle intervient peu avant deux rendez-vous: l'un avec le Rassemblement national à 9h30, l'autre, a priori davantage décisif, avec le Parti socialiste une heure plus tard.

Suffisant pour convaincre les socialistes?

Or, la formation présidée par Olivier Faure avait fait la proposition d'un renoncement au 49.3 à la fin août, lorsqu'elle se présentait comme une alternative pour prendre la suite de François Bayrou au gouvernement, promis à l'avance à une chute sur le vote de confiance qu'il avait sollicité.

Ce bougé de Sébastien Lecornu suffira-t-il convaincre les socialistes? Interrogé à ce sujet ce jeudi, avant que l'annonce ne soit formellement faite, un député PS soulignait que, 49.3 ou non, "les macronistes n'échapperaient pas de toute façon aux compromis sur le fond pour que le budget puisse passer", faute de majorité absolue à l'Assemblée.

Or, pour aboutir à un compromis, les socialistes se veulent fermes. Ce jeudi, ils continuaient de demander une suspension de la réforme des retraites ou l'instauration de la taxe Zucman sur les très hauts patrimoines pour parvenir à un accord de non-censure.

Et certains députes se montraient d'autant moins conciliant que la gauche a perdu des plumes dans la bataille des postes clés à l'Assemblée nationale mercredi et jeudi, en raison d'un soutien réciproque entre le camp présidentiel, LR, et le Rassemblement national.

La possibilité d'un accord est donc loin d'être acquise. Surtout que les principales propositions des socialistes ne sont toujours pas reprises par Sébastien Lecornu.

"Le sujet maintenant, c’est: comment chacun fait un pas, un geste, sans se renier dans ses propres convictions pour faire avancer le pays", a expliqué ce dernier ce vendredi.

Autrement dit, "cela ne peut pas être aussi binaire que: pour la réforme des retraites (...) ou contre la réforme des retraites", d'après Sébastien Lecornu. De la même façon "ce n’est pas uniquement la taxe Zucman ou rien", a-t-il expliqué.

Il a préféré évoquer une "amélioration de notre régime de retraites, notamment pour les femmes", ou poser la "question" du "meilleur vecteur" à définir pour travailler sur "la justice fiscale."

Baptiste Farge