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"Le rendez-vous de la dernière chance": de retour face à Sébastien Lecornu, le PS à la recherche d'une "victoire symbolique"

Plusieurs cadres du Parti socialiste, dont Olivier Faure, le 17 septembre 2025 à Matignon

Plusieurs cadres du Parti socialiste, dont Olivier Faure, le 17 septembre 2025 à Matignon - TELMO PINTO / NurPhoto / NurPhoto via AFP

Les socialistes, qui rencontrent Sébastien Lecornu ce vendredi matin, continuent de demander une suspension de la réforme des retraites ou l'instauration de la taxe Zucman sur les très hauts patrimoines pour ne pas censurer le futur gouvernement. La semaine dernière, le Premier ministre s'était inscrit contre ces mesures. Un accord est-il encore possible?

Ce jeudi 2 octobre, la députée socialiste Dyenaba Diop ne cachait pas son pessimisme à la veille d'un rendez-vous déterminant de son parti avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, qui cherche toujours un accord pour éviter d'être renversé par une motion de censure.

"Je ne vois pas comment trouver un chemin lorsque les premiers signaux sont de faire la courte-échelle au Rassemblement national", tempêtait l'élue du PS, désabusée par les récents événements.

"Aucune rupture sur la forme, ni sur le fond"

À savoir, le retour de l'extrême droite au sein du bureau de l'Assemblée nationale, permis cette semaine par les députés du camp présidentiel. Lesquels ont défendu, pour la plupart et contrairement à l'année précédente, une représentation proportionnelle dans cette instance exécutive du Palais Bourbon, compétente pour examiner la recevabilité des textes parlementaires ou prononcer des sanctions contre des députés.

Une décision prise au grand dam de la gauche qui a perdu la majorité qu'elle détenait depuis 2024. Ainsi, Dyenaba Diop ne "voyait pas ce que (les macronistes) pourraient proposer" aux socialistes dans le prochain budget pour "effacer les accords qu'ils viennent de passer avec le RN".

La parlementaire était d'autant plus affirmative qu'elle considère que jusqu'ici les déclarations de Sébastien Lecornu sur le prochain budget "ne montrent aucune rupture, ni sur la forme, ni sur le fond, comme il l'avait pourtant annoncé", le lendemain de sa nomination, le 10 septembre.

Dans son viseur: l'interview accordée par le chef du gouvernement au Parisien ce samedi. Dans cet entretien, l'ex-ministre des Armées s'inscrit contre les principales revendications du PS, que ce soit l'instauration de la taxe Zucman visant les très hauts patrimoines ou la suspension de la réforme des retraites.

Les socialistes fermes sur leurs exigences

De quoi largement mécontenter les socialistes. Si ces derniers ne ferment pas la porte à un accord, le premier secrétaire, Olivier Faure, a prévenu lundi sur BFMTV-RMC que le rendez-vous de vendredi serait celui de "la dernière chance".

Avant cette échéance, le député Arthur Delaporte se voulait "raisonnablement optimiste", contrairement à sa collègue Dyenaba Diop. "J'ai tendance à dire que Sébastien Lecornu a bien compris que sans victoire symbolique ou sensible sur ce que l'on proposait, il ne pourrait pas durer", expliquait-il.

Une manière de mettre la pression sur l'hôte de Matignon, connu pour être très proche d'Emmanuel Macron. En lui rappelant qu'il ne pourra survivre à la censure sans les socialistes, à moins que l'extrême droite ne lui accorde un sursis. Mais aussi que le prix d'un accord avec le PS sera élevé.

Il faudra une volte-face. Ainsi, en guise d'exemples de "gestes significatifs", Arthur Delaporte citait à nouveau la taxe Zucman ou la suspension de la réforme des retraites. Pas question pour le PS de lâcher du lest sur ces exigences, à l'entendre.

Lorsque l'entourage de Sébastien Lecornu a indiqué ce jeudi que le Premier ministre étudiait plusieurs pistes en faveur des salariés (défiscalisation et allègement des charges sociales sur les heures supplémentaires, rétablissement de certaines dispositions de la prime Macron...), le premier secrétaire Olivier Faure s'est montré ferme:

"Je ne dis pas que rien ne va dans le bon sens. C’est sûr qu’il vaut mieux faire quelque chose en direction des salariés plutôt que rien. Mais la réalité est que cela est très en-deçà de ce que nous espérons. Pour l’instant, aucune mesure qui a été rendue publique n’est de nature à infléchir notre position."

"La barre est plus haute cette année"

Un ton qui tranche avec celui, plus conciliant, employé en début d'année lorsque François Bayrou était devenu Premier ministre. "On ne va pas revenir à cet esprit de négociation où on avait le projet du gouvernement et on allait à Matignon pour essayer de faire bouger de petites choses", confirmait le député Laurent Baumel ce jeudi.

"La barre est plus haute cette année", poursuivait le socialiste, rappelant les griefs issus de la négociation avec le précédent gouvernement pour une non-censure sur le budget:

"On a été trompé par Bayrou. Il n'a pas tenu la seule promesse qu'il avait faite, qui était de revenir sur la réforme des retraites au Parlement, même en cas de non-accord du conclave entre les partenaires sociaux, pour que l’on puisse rediscuter de la mesure de l’âge légal."

Ce proche d'Olivier Faure notait aussi que "l'atmosphère" a changé ces derniers mois. "Le débat sur la taxe Zucman a imprimé, les gens sont assez d’accord pour que les riches payent", disait-il, faisant le distinguo avec le rejet massif dans l'opinion de la suppression de jours fériés, voulue par François Bayrou puis abandonnée par Sébastien Lecornu.

Conclusion de Laurent Baumel: "Ils ont perdu une bataille culturelle, donc nous sommes encore moins invités à subordonner nos valeurs. C'est au tandem exécutif de faire des gestes."

Si celui-ci ne répondait pas aux exigences des socialistes et était sanctionné par une censure de Sébastien Lecornu, la possibilité d'une dissolution n'en serait que renforcée.

Tout en indiquant qu'ils préféreraient éviter ce scénario, qui pourrait favoriser l'extrême droite, les socialistes assurent être "prêts" à y faire face. Une façon de continuer à peser dans le bras de fer avec l'exécutif?

Baptiste Farge