Macron sur le terrain, Le Pen en conférence de presse: les deux stratégies opposées des candidats

Marine Le Pen et Emmanuel Macron (montage AFP) - CHARLES PLATIAU, JULIEN DE ROSA / AFP / POOL
Une stratégie à front renversé. Après une campagne de premier tour en pointillé, Emmanuel Macron n'a de cesse de multiplier les déplacements ces derniers jours, n'hésitant pas à se mettre en scène face aux Français. Marine Le Pen multiplie de son côté les conférences de presse pour décliner les aspects les plus techniques de son programme.
Du terrain pour Macron, le programme pour Le Pen
Le président-candidat a ainsi passé plus de 12 heures lundi dans le Nord et le Pas-de-Calais avant de se rendre dans le Grand Est ce mardi. À côté d'images de bains de foule, souvent sous les "cris de Macron président", le locataire de l'Élysée a également veillé à échanger avec des Français en désaccord.
À Denain (Nord), l'une des villes les plus pauvres de France où Marine Le Pen est arrivée très largement en tête, Emmanuel Macron a ainsi longuement discuté avec deux jeunes femmes qui l'interpellaient sur son "envie" "d'emmerder les non-vaccinés". À Châtenois (Bas-Rhin), le candidat a débattu quelques instants avec un badaud qui le qualifiait de "président le plus nul de la Ve République", avant de lui "demander du respect".
Ces images sont diamétralement opposées à celles de Marine Le Pen depuis le second tour. La candidate a passé une partie de sa journée de lundi dans l'Yonne, à Soucy, où elle est arrivée en tête avec plus de 36% des suffrages. Sur place, elle a visité une exploitation aux côtés d'un agriculteur proche de son mouvement.
Le lendemain, elle a longuement égrené ses mesures pour "la démocratie" lors d'une conférence de presse à Vernon (Eure) devant des dizaines de journalistes. Rebelote ce mercredi où la députée a présenté sa vision de la diplomatie française à Paris.
Le président veut montrer qu'il assume son bilan
Ces deux stratégies très différentes s'expliquent par les impératifs que doivent remplir les deux candidats pour gagner. Pour Emmanuel Macron, ces déplacements à rallonge sur le terrain lui permettent de faire taire les critiques d'un début de campagne Potemkine, du nom d'un ministre russe qui avait fait ériger de belles façades pour cacher la misère.
Avant le premier tour, le président avait en effet animé deux réunions publiques très cadrées, à Poissy (Yvelines), où il a notamment été interrogé par des proches du maire Macron-compatible Karl Olive, puis à Pau, par des lecteurs de la presse locale.
Après avoir mis en garde sa majorité contre toute "arrogance" qui pourrait donner l'impression que le match du second tour serait déjà plié, ces échanges, parfois vifs, avec les badauds montrent également un candidat qui n'aurait pas peur de défendre son bilan et qui accepterait la critique.
Marine Le Pen de son côté a basé toute sa stratégie sur une candidature apaisée, point d'orgue de sa stratégie de dédiabolisation. La candidate s'est d'ailleurs principalement déplacée dans des communes qui avaient voté massivement pour elle en 2017.
De quoi lui garantir des échanges cordiaux avec les habitants, entre demandes de selfies et des "Marine, on te kiffe" lancés par des lycéens, à Haguenau (Bas-Rhin). Rare exception ce mercredi: la candidate a visité une usine de béton à Gennevilliers (Seine-Saint-Denis) qui a voté massivement Jean-Luc Mélenchon au premier tour (61%).
Le Pen veut éviter des images peu flatteuses
C'est que la députée craint plus que tout des déplacements dans lesquelles elle pourrait être chahutée, mettant à mal sa normalisation, comme lors de sa visite en Guadeloupe en mars. Elle y a été vivement interpellée lors d'une visite sur un marché avant de voir son entretien avec une chaîne de télévision interrompue par des militants indépendantistes.
Depuis son accès au second tour, la candidate a d'ailleurs multiplié les séquences parasitées. Une banderole accusant Marine Le Pen de racisme a été déployée lors de sa visite à Vernon. Ce mercredi, une militante écologiste du collectif Ibiza a brandi lors de sa conférence de presse à Paris un panneau en forme de cœur sur laquel s'affichait la photo du déplacement de la candidate en 2017 à Moscou aux côtés de Vladimir Poutine.
Emmanuel Macron est pour l'instant donné vainqueur avec 53,5% des voix au second tour contre 46,5% pour Marine Le Pen dans le dernier sondage Elabe pour BFMTV et L'Express.