Après son triomphe à Gaza, Donald Trump a-t-il plus de poids pour négocier face à Poutine?

Après Gaza, l'Ukraine. Quelques jours après la mise en œuvre du plan de paix entre Israël et le Hamas, Donald Trump s'attelle de nouveau à la guerre en Ukraine. Avec en ligne de mire, là aussi, la volonté de trouver accord pour mettre fin au conflit.
Le chef d'État américain reçoit ainsi son homologue Volodymyr Zelensky ce vendredi à la Maison Blanche. Et quelques heures avant cet entretien, le président américain a échangé avec Vladimir Poutine au téléphone.
"Nous avons convenu qu'il y aurait une réunion de nos conseillers de haut niveau puis le président Poutine et moi nous rencontrerons ensuite à Budapest, en Hongrie, pour voir si nous pouvons mettre fin à cette guerre 'sans gloire' entre la Russie et l'Ukraine", a déclaré Donald Trump à l'issue de cet appel.
"Il avait un moyen de pression"
Mais Donald Trump, qui ne fait pas mystère de sa volonté d'obtenir le prix Nobel de la paix, pourrait ne pas connaître des résultats aussi positifs que ceux obtenus à Gaza. "Les deux ne sont pas comparables", rappelle Ulrich Bounat, analyste géopolitique spécialiste de l'Europe centrale et chercheur associé chez Eurocreative.
"Premièrement, à Gaza, Donald Trump avait la main, en quelque sorte, sur l'armée israélienne [d'un point de vue économique, NDLR]. Il avait un moyen de pression énorme contre Benjamin Netanyahu", ce qu'il n'a pas en Russie, indique l'expert.
Deuxièmement, à Gaza, "la plupart des parrains des deux protagonistes étaient d'accord pour arriver à un cessez-le-feu", explique-t-il. Et ajoute: "On n'a pas du tout le sentiment que la Chine, l'Iran ou encore la Corée du Nord sont dans cette posture. Au contraire, ils sont plutôt à essayer d'aider la Russie à tenir le plus longtemps possible."
Enfin, pour lui, "la méthode de Donald Trump est extrêmement floue". "Je pense que les Européens ne sont pas prêts, les Ukrainiens non plus, à signer un document extrêmement vague et qui serait au bénéfice de Moscou", précise Ulrich Bounat.
Un rapport de force avec la Russie
Les moyens de pression dont dispose le président américain sont en réalité assez faibles. "Il ne reste plus vraiment de bâtons car les sanctions ont déjà été massivement utilisées contre la Russie", déclare Igor Delanoë, directeur adjoint de l'Observatoire franco-russe et chercheur associé à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris).
Alors "il essaye de créer un rapport de force avec la Russie depuis trois semaines pour essayer d'engager une négociation avec le président russe et réenclencher une phase diplomatique", précise-t-il.
Donald Trump a notamment menacé de vendre des missiles longue portée américains Tomahawk aux Européens pour les livrer à l'Ukraine. "Si cette guerre ne se termine pas, je vais leur envoyer des Tomahawks", a-t-il affirmé dimanche.
Il tente aussi de faire pression sur les pays qui continuent d'acheter des hydrocarbures russes, qui permettent, eux, de financer une partie de la guerre. "Mais pour l'instant ça ne fonctionne pas", estime Igor Delanoë.
"Il a réglé une partie du problème"
Là où le pari du locataire du bureau Ovale semble avoir fonctionné à l'avantage pour les États-Unis, c'est sur le financement de l'aide apportée à l'Ukraine. "Ça rapporte de l'argent aux États-Unis pour l'instant puisque depuis cet été ce sont les Européens qui payent les fournitures d'armes américaines à l'Ukraine. En réalité, de son point de vue, il a réglé une partie du problème car ça rapporte de l'argent aux entreprises de défense américaine", ajoute-t-il.
Qu'attendre alors de la rencontre avec Volodymyr Zelensky? "Il y aura forcément des annonces d'envoi de matériel militaire à l'Ukraine, mais pas financés par les Américains", note Ulrich Bounat. "Il y aura peut-être des annonces sur des partenariats économiques. Sur les Tomahawk, je reste très dubitatif. Enfin, il est possible qu'il y ait une annonce d'achat par les Ukrainiens de gaz naturel liquéfié américain", ajoute-t-il.
Ces nouveaux échanges avec ses homologues ukrainiens et russes pourraient donc aboutir à de nouvelles négociations. Pour autant, rien n'indique qu'elles permettront d'arrêter la guerre, ni même d'arriver un cessez-le-feu. Pour Igor Delanoë, "on n'a pas du tout le sentiment que des pourparlers vont s'enclencher prochainement".