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La restitution des dépouilles des otages retardée, la paix à Gaza déjà menacée?

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Le Hamas n'a rendu qu'une partie des corps d'otages qu'il retient dans la bande de Gaza depuis les attaques du 7-Octobre. Israël estime que l'accord signé sous l'égide des États-Unis n'est pas respecté et menace de reprendre les armes.

L'accord de paix à Gaza déjà menacé? Si le Hamas a libéré tous les otages israéliens enlevés le 7-Octobre, le mouvement islamiste n'a restitué que neuf des 28 dépouilles de captifs retenues dans la bande de Gaza. Quatre ont été remises à Israël lundi soir, trois mardi et deux mercredi.

Or selon l'accord du cessez-le-feu conclu sur la base du plan du président américain Donald Trump, le Hamas devait remettre tous les otages encore détenus à Gaza, les vivants et les morts, dans les 72 heures suivant la cessation des hostilités, soit au plus tard lundi.

Des corps "sous les décombres"

Le Hamas a affirmé mercredi avoir remis à Israël toutes les dépouilles d'otages auxquelles il avait pu accéder, évoquant des contraintes pour "extraire" les corps. "Nous avons rempli notre engagement au titre de l'accord en remettant tous les prisonniers israéliens vivants, ainsi que les corps auxquels nous avons pu accéder", a assuré le mouvement islamiste dans un communiqué cité par l'AFP.

"Quant aux dépouilles restantes, leur récupération et extraction nécessitent des efforts considérables et un équipement spécial", a-t-il ajouté.

"Le processus de restitution des corps des prisonniers israéliens pourrait prendre un certain temps, car certains de ces corps ont été enterrés dans des tunnels détruits par l'occupation (israélienne, ndlr), tandis que d'autres restent sous les décombres de bâtiments qu'elle a bombardés et démolis", a redit le Hamas sur Telegram ce vendredi, dans un message où le mouvement islamiste palestinien réaffirme son "engagement" envers la "mise en œuvre" de l'accord de cessez-le-feu.

La localisation et l'état des corps, après deux ans de guerre, font l'objet d'une grande incertitude. Interrogé sur le sujet, le président américain Donald Trump a déclaré jeudi que le Hamas "creuse" et "trouve beaucoup de corps." "Certains de ces corps sont là depuis longtemps, et certains sont sous les décombres. Ils doivent déblayer les décombres. Certains sont dans les tunnels", a-t-il ajouté depuis la Maison Blanche.

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Le mouvement islamiste palestinien "continue de nous dire qu'il compte honorer l'accord" et rendre les corps des otages décédés, a dit à la presse mercredi un haut responsable américain cité par l'AFP, sous le couvert de l'anonymat.

Se pourrait-il que le Hamas joue la montre? "Ils n'ont pas forcément intérêt à garder les corps, sauf s'ils ont été inhumés dans des conditions indignes ou qu'ils gardent des traces de mauvais traitements, voire d'exécution", estime le général Jérôme Pellistrandi, consultant défense de BFMTV.

Un sujet "hautement sensible"

Le blocage menace en tout cas directement l'accord de paix. Dans un communiqué, le Forum des familles d'otages a exigé ce jeudi que "le gouvernement cesse immédiatement la mise en œuvre de toute autre étape de l'accord, tant que le Hamas continue de violer ouvertement ses obligations concernant le retour de tous les otages et les dépouilles des victimes".

"Nous sommes déterminés au retour de tous les otages", a réaffirmé Benjamin Netanyahu lors de la commémoration officielle du 2e anniversaire de l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023.

Le ministre de la Défense israélien, Israël Katz, avait averti mercredi que son pays "en coordination avec les Etats‑Unis, reprendra les combats et agira pour une défaite totale" du Hamas si ce dernier ne respectait pas ses engagements.

"La question des corps est hautement sensible. C'est loin d'être un détail dans l'accord de paix signé entre Israël et le Hamas", souligne le Jérôme Pellistrandi, qui rappelle que "dans la religion juive comme musulmane, le corps est sacré".

Alors que le rite chrétien permet d'inhumer un défunt quelques jours après la mort, les juifs et les musulmans procèdent à l'enterrement au plus vite, parfois moins de 24 heures après le décès de la personne. Le corps doit par ailleurs être rendu à la terre intact, tandis que l'Église catholique tolère par exemple l'incinération.

L'aide humanitaire freinée

La question des dépouilles retarde également l'entrée de l'aide humanitaire à Gaza, au moment où les organisations internationales commençaient à peine à reprendre leurs livraisons dans l'enclave après des mois de blocus.

Mardi, l'ONU a annoncé dans un communiqué qu'Israël "limiterait le flux d'aide à Gaza, accusant le Hamas d'avoir violé l'accord de cessez-le-feu".

L'État hébreu autorise actuellement l'acheminement de l'aide humanitaire essentiellement via le passage de Kerem Shalom (sud), mais les organisations humanitaires se plaignent des lenteurs administratives et des contrôles de sécurité.

Mercredi, la radio-télévision publique israélienne KAN avait présenté comme imminente la réouverture du passage de Rafah entre l'Egypte et Gaza, crucial pour l'afflux de l'aide humanitaire qui attend du côté égyptien. Mais il est resté fermé jusque-là.

Les Nations unies exhortent Israël à ouvrir "immédiatement" tous les accès de la bande de Gaza et rappellent que l'aide humanitaire ne devrait pas être utilisée comme une "monnaie d'échange" entre Israël et le Hamas.

"Nous voulons que cela se fasse maintenant, dans le cadre de l'accord" de cessez-le-feu, a déclaré le responsable humanitaire de l'ONU Tom Fletcher, soulignant "l'urgence totale" de la situation et la nécessité de "livrer de l'aide à grande échelle" pour combattre la famine et soigner les habitants blessés et malades.

François Blanchard