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Police-Justice

Larmes, regrets, démentis... Fin du procès du braquage de Kim Kardashian après un mois intense en émotions

Croquis d'audience montrant Kim Kardashian témoignant au procès de son braquage, le 13 mai 2025 devant la cour d'assises à Paris

Croquis d'audience montrant Kim Kardashian témoignant au procès de son braquage, le 13 mai 2025 devant la cour d'assises à Paris - Benoit PEYRUCQ © 2019 AFP

Les peines prononcées ce vendredi 23 mai viennent mettre un terme à quatre semaines d'audience très particulières. Les débats ont été marqués notamment par l'âge des accusés, la notoriété de l'influenceuse et les excuses de deux des braqueurs.

Clap de fin d'un procès hors norme. Après plusieurs heures de délibéré, les jurés ont rendu leur verdict au procès du braquage de Kim Kardashian, condamnant huit accusés à des peines allant jusqu'à trois ans de prison ferme.

Près de neuf ans plus tard, ils ont ainsi été reconnus coupables d'avoir pris part, de près ou de loin, au "casse" durant lequel la milliardaire américaine a vu nombre de ses bijoux s'envoler, en pleine Fashion Week en 2016.

Bien que les condamnés aient encore la possibilité de faire appel dans un délai de 10 jours, l'énoncé des peines ce vendredi 23 mai a mis un point final à une audience de quatre semaines très particulière, marquée notamment par les profils des accusés comme de l'une des victimes, les larmes de Kim Kardashian à la barre et les excuses de deux des braqueurs.

"Regrets" contre démentis

Dès la première semaine, les interrogatoires des accusés ont mis en lumière de profondes dissensions. Sur les dix personnes renvoyées devant la cour d'assises, seules deux reconnaissent avoir pris part au braquage et expriment rapidement des "regrets".

"Je le regrette infiniment. Derrière, elle a eu un traumatisme, je n'avais jamais pensé à ça", lance ainsi Yunice Abbas le 29 avril, au deuxième jour du procès. On reproche à ce dernier d'avoir fait le guet dans le hall de l'hôtel pendant que deux autres braqueurs sont montés dans la chambre de Kim Kardashian, ce qu'il n'a pas cherché à nier.

L'homme, 71 ans aujourd'hui, a beaucoup fait parler de lui depuis le braquage, notamment parce qu'il a signé un livre aux éditions de L'Archipel en 2021, J'ai séquestré Kim Kardashian. Questionné sur ses intentions avec la publication de cet ouvrage, Yunice Abbas dit qu'il a "voulu donner (sa) version". "Je me suis rendu compte que j'avais fait une erreur", ajoute-t-il.

Même posture du côté d'Aomar Aït Khedache: il confirme aussi avoir pris part au braquage. Difficile d'imaginer que ce sexagénaire, qui se déplace difficilement, à l'aide d'une canne, pourrait être le "cerveau" de ce "casse du siècle". C'est pourtant bien ce que les enquêteurs lui reprochent. Aujourd'hui sourd et muet, tout au long du procès, "Omar le Vieux" s'exprime via un carnet et ses propos sont soit retransmis sur un écran, soit lus par son avocate ou le président. Face à lui, afin qu'il puisse suivre au mieux les débats, deux sténo-dactylos se relaient pour retranscrire les échanges.

Aomar Aït Khedache, jugé pour le braquage de Kim Kardashian en 2016, devant la cour d'assises de Paris le 28 avril 2025
Aomar Aït Khedache, jugé pour le braquage de Kim Kardashian en 2016, devant la cour d'assises de Paris le 28 avril 2025 © Benoit PEYRUCQ © 2019 AFP

Malgré tout, le dispositif donne un caractère très particulier aux interrogatoires de l'accusé. Au début du procès, le président lui demande ce qui l'a amené à se retrouver plusieurs fois en prison au cours de sa vie, Aomar Aït Khedache répond en inscrivant trois mots simples sur son cahier: "Influences. Entourage. Rencontres".

Pas d'aveux en revanche chez les huit autres accusés. Entendus un à un pendant ces quatre semaines, aucun n'a reconnu avoir un quelconque lien avec cette affaire. Certains, à l'image de Christiane Glotin, disent avoir été témoins de scènes suspectes sans avoir posé de questions.

Ex-compagne du "cerveau" présumé, aujourd'hui âgée de 79 ans, elle raconte à la barre que c'est elle qui a fait les présentations entre Aomar Aït Khedache et d'autres accusés. Mais elle n'est pas la "secrétaire criminelle" que décrira plus tard la procureure générale, lors de ses réquisitions. Si les enquêteurs l'ont repérée sur des images de vidéosurveillance en Belgique, où son ex-conjoint est soupçonné d'avoir revendu les bijoux, elle assure n'avoir "pas posé de questions" sur l'objectif de ce trajet. "Je le regrette", conclut-elle.

Le fils d'"Omar le Vieux" a peu ou prou le même discours. Il l'affirme devant la cour: il n'a jamais "demandé pourquoi" son père l'avait sommé de récupérer plusieurs personnes en voiture, la nuit du braquage. "Je m'étonne que vous ne posiez pas beaucoup de questions...", commente le président, David De Pas.

"Je vous pardonne"

Si l'on peut dire que le public a été aux abonnés absents certains jours, la file d'attente devant le tribunal n'a cessé de s'allonger le 13 mai au matin. Ce jour-là, la "reine des influenceuses" vient déposer à la barre, et ils sont nombreux à vouloir entendre son témoignage, certains ayant même fait le déplacement jusqu'à Paris pour l'occasion.

C'est donc devant une salle pleine à craquer que Kim Kardashian, arrivée par l'arrière du tribunal en robe tailleur noire et collier en diamants, raconte, minute après minute, de quelle manière elle s'est faite braquer et ligoter dans la nuit du 2 au 3 octobre 2016. "Ring! Ring!", lui lance à cette occasion l'un des braqueurs, pour lui faire comprendre qu'il cherche la bague que son mari Kanye West lui a offerte, et avec laquelle elle s'expose régulièrement sur les réseaux sociaux.

Kim Kardashian lors de son arrivée au tribunal de Paris, le 13 mai 2025, pour le procès de son braquage.
Kim Kardashian lors de son arrivée au tribunal de Paris, le 13 mai 2025, pour le procès de son braquage. © Alain JOCARD / AFP

Poussée sur le lit par les malfaiteurs qui fouillent sa chambre, le peignoir défait, elle explique avoir vu sa vie défiler devant ses yeux. "À ce moment-là, je me suis dit que j'allais me faire violer. (...) Je savais que Kourtney (sa sœur, NDLR) était sur le point de rentrer et qu'elle allait découvrir la scène. Je me suis dit qu'elle allait me voir morte, mon corps sur le lit, potentiellement après avoir été violée, et qu'elle aurait gardé cette image dans sa mémoire", détaille-t-elle à la barre devant un public muet.

Alors que la milliardaire dépose depuis près de deux heures, le président lui demande si elle a reçu la lettre que le principal accusé, Aomar Aït Khedache, lui a écrite quelques mois après le braquage. Elle répond que "non", il propose donc de lire ce courrier à voix haute. "Depuis que j'ai pris connaissance de votre situation, ma conscience m'a dictée de prendre contact avec vous de la plus douce et j'espère de la plus réconfortante des manières", a notamment écrit l'accusé. "Bien sûr, le passé ne se refait pas, mais j'espère que cette lettre vous fera oublier peu à peu le traumatisme que vous avez subi par ma faute."

Peut-être est-ce le ton très doux du président qui lit, peut-être sont-ce les mots simples mais touchants d'Aomar Aït Khedache: en pleine lecture de ce courrier qu'elle n'a jamais reçu, Kim Kardashian baisse les yeux vers le pupitre et se met à pleurer, triturant un mouchoir entre ses mains. Quelques minutes plus tard, sa réaction crée la surprise. "J'apprécie la lettre, je vous pardonne pour ce qu'il s'est passé. Ceci étant dit, ça ne modifie pas le traumatisme qui est le mien et le fait que ma vie a été changée pour toujours", déclare-t-elle après avoir essuyé ses larmes.

Réponse immédiate du braqueur: "Ce pardon est un soleil qui vient m'illuminer, je vous en remercie. (...) Je vous serai reconnaissant à jamais."

Il n'y a alors plus un bruit dans la salle, si ce n'est celui des journalistes qui tapent à l'ordinateur pour ne pas perdre une miette de cet émouvant échange. Moment suspendu au cœur d'un procès parfois tourné en dérision malgré lui, au vu de l'âge de certains accusés et de la notoriété de Kim Kardashian.

Le veilleur de nuit, victime oubliée

Beaucoup moins remarqué, mais non moins traumatisé, le veilleur de nuit de l'hôtel particulier est lui aussi revenu sur ce qu'il a vécu. Dans la nuit du 2 au 3 octobre 2016, Abderrahmane Ouatiki, doctorant en sémiologie la journée et réceptionniste la nuit, avait été braqué et menotté par les braqueurs, puis forcé de les accompagner jusqu'à la chambre de la milliardaire.

Le 12 mai, d'une voix posée, cet homme de 48 ans à la barbe poivre et sel revient d'abord sur la désorganisation des malfaiteurs. "Ils ne savaient pas quoi faire", se souvient-il. Il avait dû jouer les traducteurs entre Kim Kardashian, qui ne parlait pas Français, et les braqueurs, qui peinaient à se faire comprendre d'elle.

"Vous pensez qu'à ce moment-là, elle a pensé mourir?", lui demande alors le président. "Ah oui", appuie le réceptionniste. David De Pas relance: "Et vous?". Réponse: "Aussi".

Lors de leur plaidoirie, ses avocats Mes Mohand Ouidja et Henri de Beauregard n'ont eu de cesse de rappeler qu'"il est plus difficile d'être victime quand on est anonyme et qu'on est pauvre", commente ainsi l'un d'entre eux le 20 mai. Et si la déposition a fait sans nul doute moins de bruit que celle de la star américaine, leur client est victime au même titre que Kim Kardashian, réaffirment-ils.

Avant de quitter le banc des accusés et de laisser les jurés trancher sur leur sort, les dix malfaiteurs présumés ont pu s'exprimer une dernière fois ce vendredi matin. Là encore, ces dernières prises de paroles ont résumé la teneur de leurs interrogatoires depuis quatre semaines. Les huit qui démentent leur participation ont demandé aux jurés de ne pas les envoyer en détention pour des faits, disent-ils, qu'ils n'ont pas commis.

"Mille pardons, je demande mille pardons à mon fils", a de son côté déclaré Aomar Aït Khedache, toujours à l'écrit. Quelques heures plus tard, le sexagénaire sera condamné à huit ans de prison, dont trois ans ferme. La milliardaire, elle, s'est dite "satisfaite" du verdict par la voix de ses avocats.

Elisa Fernandez