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Police-Justice

Le procès hors norme du braquage de Kim Kardashian s'ouvre ce lundi

Kim Kardashian, Met Gala 2022

Kim Kardashian, Met Gala 2022 - Dimitrios Kambouris

Le procès de dix personnes accusées d'avoir pris part au braquage de la milliardaire américaine en 2016 à Paris s'ouvre ce lundi 28 avril. Il devrait durer quatre semaines. Un procès hors norme par son retentissement international et la nature des accusés: des hommes décrits comme des "papys braqueurs" impliqués dans un braquage rocambolesque.

C'est un procès peu ordinaire qui s'ouvre ce lundi 28 avril. Neuf hommes et une femme vont comparaître pendant quatre semaines, accusés d'avoir participé au braquage de Kim Kardashian dans la nuit du 2 au 3 octobre 2016 à Paris. Au vu de la renommée de l'influenceuse aux 357 millions d'abonnés sur Instagram, de l'âge des accusés et de la durée exceptionnelle des débats, qui doivent se tenir sur quatre semaines, l'audience s'annonce hors-normes.

Kim Kardashian, qui a déjà évoqué dans les médias ainsi que dans son émission de téléréalité L'Incroyable famille Kardashian le traumatisme qu'elle garde de ce moment, a annoncé par la voix de son avocat américain qu'elle viendrait témoigner à l'audience. Selon ses conseils, cette dernière a "une profonde admiration pour le système judiciaire français et a été traitée avec le plus grand respect par les autorités françaises".

Autre victime du braquage, le veilleur de nuit de l'hôtel Abderrahmane Outaiki, menotté et braqué par les malfaiteurs, attend que ce qu'il a vécu cette nuit-là soit pris en compte et que sa voix soit entendue au procès. "Il ne demande pas de l'aide, juste de la justice et de la considération", rapporte son avocat, Me Mohand Ouidja, à BFMTV.com.

La crainte d'une "justice-vitrine"

Du côté des accusés, l'ouverture de ce procès, près de neuf ans après les faits relève du soulagement. "Mon client attend depuis neuf ans de pouvoir livrer sa vérité face aux juges, aux victimes, et pouvoir exprimer ses regrets, ses remords", nous explique Me Gabriel Dumenil, qui représente Yunice Abbas, l'un des deux seuls braqueurs à avoir reconnu sa participation aux faits.

Sur les dix accusés, huit nient avoir pris part au braquage mais attendent le procès pour pouvoir donner leur version des faits, à l'image d'Harminy Aït Khedache, soupçonné d'avoir joué le rôle de chauffeur.

"Il envisage ce procès avec sérénité, avec l'envie de pouvoir s'exprimer" en dehors du battement médiatique, relate son avocate Me Margot Pugliese, contactée par BFMTV.com

Cette crainte d'une surmédiatisation de l'audience est présente chez la plupart des accusés. Beaucoup redoutent que cette exposition en France comme à l'international puisse influencer le cours des débats et leur conclusion. Aomar Aït Khedache, que les enquêteurs soupçonnent d'être le "cerveau" du braquage (ce qu'il nie), ne "veut pas échapper à sa responsabilité", mais "a peur que ce soit une justice-vitrine" qui s'exerce, selon les mots de son avocate, Me Chloé Arnoux.

Car comme ils l'ont répété pendant l'enquête, les braqueurs, nés pour la plupart dans les années 1950, ne s'attendaient pas du tout à se retrouver sous le feux des projecteurs. Selon leurs dires, ils avaient simplement reçu l'information selon laquelle "la femme d'un rappeur" résidait à l'hôtel particulier "No Adress" et qu'une occasion en or se présentait.

"Lorsque l'on voit comment il (Aomar Aït Khedache, NDLR) interragit avec un téléphone aujourd'hui, je suis persuadée qu'il n'avait pas du tout conscience de qui elle était", confie encore Me Chloé Arnoux.

Une "vision hors-normes" du procès

Parmi les mis en cause comme chez les victimes, certains ont d'ailleurs été scandalisés lorsque l'un des suspects, Yunice Abbas, a publié un livre racontant le braquage de son point de vue (J'ai séquestré Kim Kardashian, aux éditions de l'Archipel), estimant que ce dernier a profité de la lumière offerte par la notoriété de la victime pour capitaliser sur l'affaire.

Le veilleur de nuit, Abderrahmane Ouatiki, a lui aussi "très mal vécu le fait de le voir se pavaner sur les plateaux télévisés", indique son avocat.

Un coup de projecteur que Yunice Abbas a pu se permettre après avoir été libéré provisoirement entre temps. Durant les neuf années qui séparent le braquage de l'ouverture du procès, tous les accusés ont eu le temps de faire des demandes de remise en liberté, dans l'attente de leur comparution. Leurs requêtes ont toutes été acceptées, et les dix accusés comparaissent libres.

Si le manque de moyens de la justice explique en partie ce long délai, un des avocats de la défense estime qu'il est aussi dû à une "vision hors-normes, déconnectée de ce qu'est ce procès", soulignant qu'une durée de quatre semaines n'est pas habituelle dans une affaire de braquage. Une audience qu'il faut pouvoir caler dans un planning judiciaire déjà très serré.

Un accusé presque sourd et muet

De cette longueur de l'instruction découle un problème, et non des moindres. Auprès de BFMTV.com, plusieurs avocats de la défense confient avoir du mal à imaginer comment le procès va pouvoir se dérouler, notamment au vu de l'âge et de l'état de santé de certains accusés. Sur les douze suspects renvoyés devant les assises à l'origine, l'un est depuis décédé et un autre a été disjoint du dossier, son état de santé ayant été jugé incompatible avec une comparution.

Reste le cas d'Aomar Aït Khedache, aujourd'hui âgé de 70 ans. Entre le braquage et l'ouverture du procès, l'homme est devenu quasiment sourd et muet. "Il a vécu une détention très difficile", raconte son avocate. "Il a été reconnu invalide à 80% par la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH)", mais a tenu à être présent au procès, explique encore Me Chloé Arnoux.

Un dispositif doit être mis en place pour que celui-ci puisse tout de même s'exprimer à l'audience. Les débats devraient être sous-titrés et l'accusé pourrait s'exprimer via un bloc-notes qui sera projeté sur un écran, précise son avocate.

Cette situation, le fils d'Aomar, Harminy Aït Khedache, également sur le banc des accusés, la redoute lui aussi, commente Me Margot Pugliese. "Que son père invalide comparaisse devant la Cour d'assises, c'est une source de stress pour lui", rapporte-t-elle. "Avec un accusé mort et un autre disjoint... Ça va être un procès un peu étonnant", commente encore l'avocate.

Pour Me Mohand Ouidja, avocat du réceptionniste de nuit, l'âge des accusés ne doit cependant pas être un facteur d'atténuation. "Qu'est-ce que l'on veut envoyer comme message? À statut exceptionnel, traitement exceptionnel?"

"Il n'y a pas de 'papys braqueurs'. Il y a des braqueurs tout court. C'est ce que l'on veut dire face à toutes les caméras du monde qui vont suivre ce procès", réagit-il encore.

Contactés, les avocats français de Kim Kardashian n'ont pas donné suite à nos sollicitations. Le procès qui s'ouvre ce lundi devrait se poursuivre jusqu'au 23 mai.

Elisa Fernandez