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Réforme des retraites: les débats n'avancent pas au Sénat, où la gauche dénonce un "nouveau coup de force"

Le Sénat pendant un débat sur la réforme des retraites

Le Sénat pendant un débat sur la réforme des retraites - Christophe ARCHAMBAULT / AFP

Les parlementaires n'ont plus que trois jours pour étudier plus de la moitié de la réforme. Ce jeudi soir, les discussions ont été ralenties par la multiplication des rappels au règlement de la gauche, qui critique le recours par le gouvernement à l'article 44.2 de la Constitution.

Les débats se sont une nouvelle fois enflamés au Sénat ce jeudi soir, dans le cadre de l'examen de la réforme des retraites. Les Républicains et le gouvernement ont utilisé plusieurs armes constitutionnelles et réglementaires à leur disposition pour tenter d'accélérer les discussions.

Des manoeuvres qui ont provoqué la colère des élus de gauche, certains dénonçant un "nouveau coup de force co-organisé."

Comme dans la nuit de mardi à mercredi, le rapporteur LR Réné-Paul Savary a appelé en priorité un amendement de réécriture de l'article 9 du projet de loi, qui porte sur la pénibilité. Son adoption peu après minuit a fait tomber dans la soirée des dizaines d'amendements de suppression déposés par la gauche.

Un amendement met le feu aux poudres

"La commission et la droite sénatoriale viennent de déclencher la énième manœuvre procédurière depuis mardi soir. Cette fois-ci, vous le déclenchez sur un article majeur du projet de loi, l’article 9 sur lequel l’ensemble des syndicats insiste le plus", dénonçait en début de soirée dans l'hémicycle le communiste Pierre Laurent.

Lui et ses collègues de gauche ont décidé, en réponse, de multiplier les rappels au règlement pour protester. Un fait très rare au Sénat et qui illustre la tension de ces derniers jours au Palais du Luxembourg.

"Si vous pensez que nous allons plier le genou, mettre notre robe de bure et la corde au cou, la réponse est non", a prévenu Patrick Kanner, patron du groupe socialiste.

"Vous récoltez ce que vous avez semé la semaine dernière. Vous n’avez pas tenu vos engagements", a répliqué René-Paul Savary, qui a rappelé qu'il "était bien question que l'on puisse débattre pour aller jusqu'au bout du texte."

"Je n'ai signé aucun accord"

Avant le début de l'examen au Sénat, droite et gauche s'étaient accordées. Un "deal secret" plutôt simple: pas d'examen de l'article 7 avant la mobilisation du 7 mars, vote sur l'ensemble de la réforme avant dimanche, minuit.

"Je n'ai signé aucun accord", a répondu Guillaume Gontard, président du groupe écologiste au Sénat. "Ce qui a été dit, c'est que jusqu'à l'article 7 qui reporte la retraite à 64 ans, nous aurions une méthode de débat normal et qu'après, nous irions sur une méthode qui va s'accélérer", expliquait-il pourtant à BFMTV.com il y a quelques jours.

Accord ou pas, l'opposition de la gauche, avec des dizaines et des dizaines d'amendements, ne s'est pas arrêtée depuis mardi soir. La droite a donc utilisé plusieurs outils à sa disposition dans le règlement interne du Sénat pour faire avancer à marche forcée les élus de gauche.

Arme constitutionnelle

Ces derniers ont répliqué à l'amendement de réécriture ce jeudi soir, en déposant de nombreux sous-amendements. Déplorant "une volonté de blocage", Olivier Dussopt, pour la première fois depuis le début de l'examen du texte, a fait usage de l'article 44-2 de la Constitution. Tous les sous-amendements déposés dans la soirée qui n'avaient pas été soumis à l'examen de la commission ont été jugés irrecevables.

"Ce que vous faites ce soir, la majorité sénatoriale et le gouvernement, est pour nous un signe de faiblesse politique et un signe de fébrilité", a dénoncé Elianne Assassi, présidente du groupe communiste.

La sénatrice anticipe déjà l'utilisation, par le gouvernement, de l'article 44-3. Une autre arme constitutionnelle qui limiterait les débats dans les prochaines heures. Sauf que les discussions doivent s'achever d'ici dimanche, minuit.

"Vous n'avez pas gagné une seule minute avec cette affaire"

L'amendement de réécriture a fini par être adopté et la séance a été levée à 0h30. Mais les débats n'ont pas avancé: il reste encore la moitié du texte (12 articles à voter, dont l'article 9) et environ un millier d'amendements à examiner

. "Vous n'avez pas gagné une seule minute avec cette affaire", a ainsi ironisé dans la soirée le PS Jérôme Durain.

Les sénateurs ont toutefois adopté ce jeudi l'extension du dispositif de carrières longues à ceux ayant commencé à travailler entre 20 et 21 ans, pour un départ anticipé à 63 ans.

Ils ont aussi voté une proposition de la droite et des centristes instaurant une surcote de pension allant jusqu'à 5% pour les femmes choisissant de partir à l'âge légal de la retraite, mais ayant cumulé les annuités requises dès un an avant.

Ariel Guez