5 signes qui montrent que Sarkozy fait du surplace

Nicolas Sarkozy doit trouver un espace politique où se positionner. - Eric Feferberg - AFP
Se montrer, proposer, se différencier de ses rivaux pour exister. Telle devrait être la devise de Nicolas Sarkozy depuis son retour aux manettes de l'UMP, en vue de l'élection présidentielle de 2017. Cette partition, le président de l'UMP a pourtant bien du mal à la jouer dans ce contexte d'"unité nationale", chère aux Français. Aujourd'hui, Nicolas Sarkozy serait fatigué de "l'esprit du 11 janvier", jour de la grande mobilisation en France pour les 17 victimes des attentats terroristes qui ont endeuillé le pays.
"Et puis, son union nationale, à Hollande, ça commence à me courir", aurait-il déclaré à son entourage, selon le Canard Enchaîné.
Invité mercredi soir sur le plateau du journal de 20h, Nicolas Sarkozy tient l'occasion de reprendre la main sur la scène publique et en finir avec une séquence qui lui semble jusqu'ici plutôt défavorable.
> Une popularité qui stagne
Bien avant l'épisode tragique qui a bouleversé ce début d'année, Nicolas Sarkozy voyait déjà sa côte de popularité chuter dans les sondages. En décembre dernier, le président de l'UMP ne disposait plus que de 67% d'avis positifs auprès de ses sympathisants, dégringolant de 16 points. Dans ce baromètre mensuel Ipsos-Le Point, il passait surtout derrière Alain Juppé, son grand rival, et même la présidente du FMI, Christine Lagarde.
Alors que lui stagne, Nicolas Sarkozy voit François Hollande bondir de 21 points dans les sondages -du jamais vu ou presque- atteignant les 40% d'opinions positives après les attaques terroristes. Et le Premier ministre Manuel Valls n'est pas en reste: il connaît quasiment l'état de grâce en obtenant son meilleur score depuis son arrivée à Matignon, en avril 2014.
> En retrait sur les questions de sécurité
Au delà des chiffres, le symbole est fort. Désormais, c'est bien le Premier ministre qui occupe le terrain sécuritaire. Nicolas Sarkozy se voit également doublé sur cette thématique par l'actuel ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve. Mercredi, le gouvernement a fait des annonces fortes sur la lutte contre le terrorisme, comme la création de 2.680 emplois supplémentaires ou le déblocage de plus de 700 millions d'euros, la lutte contre le racisme et l'antisémitisme et la défense de la République.
Face à un exécutif de gauche très présent sur les questions sécuritaires, Nicolas Sarkozy se retrouve dans l'impossibilité d'occuper ce couloir politique, qu'il a fait sien depuis 2002, lorsqu'il était ministre de l'Intérieur, et qui était resté son domaine réservé lorsqu'il était président de la République. Des thèmes qu'il avait largement mis en avant depuis son accession à la tête de l'UMP. "Il ne va pas se renier", confiait en décembre un de ses fidèles, Brice Hortefeux. Sans se renier, Nicolas Sarkozy a toutefois préféré se faire discret sur le sujet depuis les attentats. "La situation est trop grave pour que nous mettions de l'huile sur le feu bouillant de la société française par des propos inconsidérés", ce serait "irresponsable", admettait-t-il lui-même samedi, face aux nouveaux adhérents UMP. Résultat: Nicolas Sarkozy paraît en retrait sur son propre terrain.
> Il n'est plus dans la proposition mais dans la réponse
Invité mercredi soir du JT de France 2 à 20 heures, Nicolas Sarkozy va se retrouver dans la position du commentateur après les annonces détaillées le matin même par Manuel Valls. Même le crime d'"indignité nationale" que le président de l'UMP avait suggéré au lendemain des attentats a été repris à son compte par l'exécutif, qui assure y réfléchir.
Déjà, quelques jours après les attentats de Paris, Nicolas Sarkozy proposait d'empêcher le retour des jihadistes français, d'isoler les détenus islamistes radicaux en prison ou de donner plus de moyens aux services de renseignement. Dans un courrier envoyé à Bernard Cazeneuve, Nicolas Sarkozy suggérait qu'il était "indispensable d'aller plus loin" mais que "l'UMP soutiendra toutes les initiatives qui iront dans cette direction".
Des pistes depuis déjà toutes évoquées par Manuel Valls ou Bernard Cazeneuve. "Il aurait très dangereux pour la droite du point de vue de sa crédibilité de force responsable de jouer immédiatement la surenchère dans les critiques à l'encontre de l'action du gouvernement", note Christophe Bouillaud, professeur de science politique à l'Institut d'Etudes politiques de Grenoble, cité par Le Figaro.
> L'UMP divisée sur ces propositions
Le rassemblement, voilà le maître-mot de Nicolas Sarkozy depuis fin 2014, au point même qu'il envisagerait de donner ce nom à l'UMP. De belles perspectives qui ne semblent pas trouver d'écho à droite, et ce, depuis son retour en politique et son investiture comme nouveau chef de parti. Sur les attaques de Paris, le ténors de l'UMP n'ont pas réussi à s'exprimer d'une voix commune. Même son fidèle lieutenant Claude Guéant pointe du doigt les "problèmes constitutionnels" que constituerait l'interdiction du retour en France des jihadistes, largement défendue par l'ancien chef de l'Etat.
Et les divergences de vues sont nombreuses à l'UMP. Quand Alain Juppé, Jean-Pierre Raffarin et François Fillon jugent l'idée de restaurer le service national irréaliste, Nicolas Sarkozy propose, lui, qu'une commission y réfléchisse. Et quand le président de l'UMP estime que les attentats parisiens sont "une guerre déclarée à la civilisation", Rachida Dati conteste ces propos. "Ce n'est pas une guerre de civilisations. De quelle civilisation parle-t-on ?", s'interrogeait sur France Info la députée européenne.
> Difficile de s'opposer sans trop en faire
Pire: au plus fort de l'unité nationale, lors du rassemblement historique du 11 janvier dernier, l'image d'un Nicolas Sarkozy jouant des coudes pour accéder au premier rang sur la photo officielle des chefs d'Etat fait le tour des médias. L'attitude de l'ancien président est largement raillée sur les réseaux sociaux. Nicolas Sarkozy a perdu son duel à distance avec François Hollande, dont la gestion de la crise a été saluée par 88% des Français. "Sa contradiction, c'est qu'il est à la fois chef de parti et qu'il veut être au niveau du président de la République. Il a des difficultés à le gérer et c'est pour quoi il a paru flotter dès que moi j'ai lancé l'appel à manifester (le dimanche 11 janvier)", critiquait Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du PS.
Eclipsé par un président qui a gagné en densité ces derniers jours, devancé par le tandem Valls-Cazeneuve sur les questions de sécurité dont il s'est pourtant fait le chantre depuis 2002 et en désaccord avec certains cadres de l'UMP sur les réponses à apporter pour lutter contre le terrorisme, il ne reste à Nicolas Sarkozy que les thématiques économiques et sociales pour rebondir. Mais comment parler des chiffres du chômage sans choquer en cette période d'unité?