Gauche, syndicats, Matignon: Myriam El Khomri est cernée

Myriam El Khomri avec Manuel Valls et Emmanuel Macron lors des consultations avec les syndicats sur le projet de loi controversé de la ministre du Travail - Jacques Demarthon - AFP
Depuis son entrée en poste à la place de François Rebsamen, Myriam El Khomri était attendue au tournant lors de l'annonce mensuelle des chiffres du chômage. Depuis le début des débats sur son projet de réforme du droit du travail, la ministre du Travail est encerclée.
Rien que la semaine passée, un malaise couplé à une mauvaise chute l'a contrainte à annuler un (ou deux) passages télé, avant que vendredi, la pétition contre son texte n'atteigne des records et qu'un sondage ravageur soit publié dimanche. Sept Français sur dix sont opposés au projet de loi sur la réforme du droit du travail, et 63% pensent que Myriam El Khomri est une mauvaise ministre du Travail.
Une ambiance lourde, alors qu'ont débuté ce lundi les consultations avec les organisations syndicales, et qu'un premier mouvement social est prévu mercredi. D'autant plus lourd que la marge de manoeuvre de Myriam El Khomri est faible voire inexistante, tant elle apparaît encerclée.
> Par la gauche
Les plus vives critiques contre le projet de loi El Khomri sont venues de sa propre famille politique. C'est même face aux députés PS que Manuel Valls a accepté l'idée de reporter la présentation du texte en Conseil des ministres et de consulter. Jean-Marie Le Guen avait incriminé ces attaques pour expliquer son malaise. De son côté, la ministre du Travail, qui réfute toute "fragilité", se justifie dans Le Figaro en pointant du doigt le manque de sommeil lié à une grippe contractée par sa fille de deux ans. Le quotidien rapporte pourtant qu'elle aurait été hospitalisée "trois ou quatre fois" depuis janvier.
Mais pour l'ancienne adjointe de Bertrand Delanoë et d'Anne Hidalgo à la mairie de Paris, les prochaines semaines s'annoncent également houleuses. Dès ce lundi soir, elle débattra avec Martine Aubry, ancienne ministre du Travail, lors du bureau national du PS. En pointe de la critique contre la loi envisagée, la maire de Lille compte aussi proposer une alternative aux solutions retenues par le gouvernement. Et alors qu'elle s'organise autour de ses proches, Martine Aubry et les nombreux opposants de gauche au texte ne vont pas la lâcher.
> Par Matignon
Mais si une frange de la gauche cible Myriam El Khomri sur ce texte, c'est aussi Manuel Valls qui est visé. En effet, le Premier ministre a insisté pour reprendre la main sur le sujet et pour que la ministre du Travail soit chargée de ce texte, alors que le ministre de l'Economie Emmanuel Macron le lorgnait.
Manuel Valls est tellement attentif à ce texte, qu'il travaillerait en étroite collaboration avec le directeur de cabinet de Myriam El Khomri, sans forcément consulter cette dernière, selon Libération. "Je ne m'apitoie pas sur mon sort", répond l'intéressée au Figaro.
De plus, la première polémique née de ce texte est intimement lié au Premier ministre, puisque c'est Manuel Valls qui a fait mentionner dans un entretien aux Echos de la ministre du Travail la menace du 49-3... sans prévenir François Hollande, à qui il demande une plus grande implication à le défendre.
> Par les syndicats
Enfin, au milieu de ces jeux politiques, Myriam El Khomri doit désormais négocier avec les syndicats en partenariat avec Manuel Valls - qui a peut-être suivi le conseil livré par son mentor Michel Rocard - ou Emmanuel Macron. Mais là aussi, la ministre du Travail devra gérer les tensions.
En effet, dès le premier jour, FO et CGT ont demandé le retrait pur et simple du texte, quand la CFDT fait de l'abandon du plafonnement des indemnités prud'homales une "condition sine qua non" à la poursuite des discussions.
Pragmatique, Myriam El Khomri s'est félicitée des "débats francs, directs, constructifs" avant de dresser un constat sans appel. "Il n'y a pas, bien sûr, d'unanimité sur les réponses à y apporter" au "besoin de réformes" de la France, a-t-elle expliqué. Et jusqu'au 24 mars, date prévue du prochain passage du texte en Conseil des ministres, c'est chaque jour que Myriam El Khomri sera au coeur des débats.