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Élysée

L'appel entre Emmanuel Macron et Vladimir Poutine peut-il faire bouger les négociations sur l'Ukraine?

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Vladimir Poutine et Emmanuel Macron ont échangé par téléphone pour la première fois depuis trois ans. Si l'invasion russe de l'Ukraine a été évoquée, la conversation a surtout porté sur le nucléaire iranien.

Un appel rare, pour quel résultat? Les présidents français Emmanuel Macron et russe Vladimir Poutine se sont parlé ce mardi 1er juillet au téléphone pendant "plus de deux heures", une première depuis septembre 2022.

Cet échange était destiné à faire le point sur la situation en Iran - Paris et Moscou étant cosignataires de l'accord de Vienne de 2015 sur le nucléaire iranien - mais a aussi permis d'évoquer l'invasion russe de l'Ukraine.

Si les deux dirigeants se sont dits prêts à coopérer pour encadrer le programme nucléaire iranien après les frappes israéliennes et américaines, ils ont affiché une nette divergence sur le conflit déclenché par Vladimir Poutine.

"Soutien indéfectible de la France à l'Ukraine"

Emmanuel Macron a souligné "le soutien indéfectible de la France à la souveraineté et à l'intégrité territoriale de l'Ukraine", a insisté l'Elysée. Il a à nouveau appelé à "l'établissement, dans les meilleurs délais, d'un cessez-le-feu", proposition approuvée par Kiev mais rejetée par Moscou. Le chef de l'État a enfin encouragé des "négociations entre l'Ukraine et la Russie pour un règlement solide et durable du conflit".

Le président russe a de son côté prévenu que tout accord de paix en Ukraine devait être "global et sur le long terme, prévoir l'élimination des causes profondes de la crise ukrainienne et s'appuyer sur de nouvelles réalités territoriales", selon le communiqué du Kremlin. Vladimir Poutine a martelé que le conflit est selon lui "une conséquence directe de la politique des États occidentaux", qui ont "ignoré les intérêts sécuritaires de la Russie depuis des années" et créé une "tête de pont anti-russe en Ukraine".

Selon Ulrich Bounat, spécialiste de l'Europe de l'est et chercheur associé au think tank Euro Créativ, Kiev avait peu de choses à attendre de la reprise de contact entre Emmanuel Macron et Vladimir Poutine, la situation en Iran étant ce qui a présidé à l'appel.

"Emmanuel Macron avait annoncé qu'il allait échanger avec les membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies (France, Royaume-Uni, États-Unis, Chine et Russie) pour parler de l'Iran", rappelle-t-il.

"L'appel était devenu d'autant plus opportun que l’Iran vient de suspendre officiellement sa coopération sur le nucléaire avec l’AIEA, ce qui montre l'urgence d'essayer d'avoir une espèce de front commun diplomatique pour éviter que l'Iran ne sorte du traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP)", poursuit le spécialiste.

Les négociations au point mort face à l'intransigeance russe

Pour Ulrich Bounat, l'Ukraine était un sujet incontournable dans la conversation, même si aucune avancée autour des négociations de paix n'a eu lieu. "Quand vous appelez Vladimir Poutine, vous ne pouvez pas éviter le sujet ukrainien. Mais les positions des deux dirigeants restent diamétralement opposées, voire totalement irréconciables", souligne-t-il.

Interrogée par l'AFP, la politologue russe Tatiana Stanovaya, fondatrice du cabinet de conseil R.Politik, estime que cet appel "ne veut pas dire que l'Ukraine va perdre tout soutien".

"Il montre plutôt la volonté des Européens d'avoir une place à la table" des négociations, même s'il 'n'y a rien à discuter' pour l'instant du fait de l'intransigeance russe", abonde la spécialiste.

Malgré leurs positions très éloignées, les deux dirigeants, qui se sont entretenus durant "plus de deux heures au téléphone", ont convenu de continuer "d'échanger" sur le conflit en Ukraine, a précisé l'Elysée.

Dernier appel en septembre 2022

Le dernier appel entre les dirigeants français et russe remontait au 11 septembre 2022 et avait porté sur la centrale nucléaire ukrainienne de Zaporijjia, occupée par les Russes et dont la sécurité était alors menacée.

Le président français, qui s'était vu reprocher de continuer à parler au maître du Kremlin pendant des mois après le début de l'offensive russe en Ukraine, en février 2022, a ensuite cessé tout contact, accusant Vladimir Poutine de "mentir" sur ses intentions et sa volonté de paix.

Si les yeux de la communauté internationale sont rivés vers l'Iran depuis deux semaines, la situation en Ukraine continue de se détériorer. L'armée russe intensifie ses bombardements en Ukraine, faisant de nombreuses victimes civiles, et poursuit sa lente avancée dans l'est du pays.

Les États-Unis, qui n'ont instauré aucune sanction contre Vladimir Poutine malgré les menaces de Donald Trump, ont par ailleurs cessé la livraison de certaines armes à l'Ukraine cette semaine.

François Blanchard