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Pourquoi Emmanuel Macron a choisi Edouard Philippe

Edouard Philippe, maire LR du Havre.

Edouard Philippe, maire LR du Havre. - CHARLY TRIBALLEAU / AFP

Cet énarque de 46 ans, député-maire du Havre, a milité au Parti socialiste avant de rejoindre l'UMP, devenu Les Républicains. Le parcours comme les orientations politiques d'Edouard Philippe, fidèle juppéiste, répondaient aux exigences d'Emmanuel Macron.

Au lendemain de son investiture, Emmanuel Macron a fait annoncer lundi le nom de son Premier ministre. C'est donc Edouard Philippe, dont le nom circulait avec insistance ces derniers jours, qui a été nommé à Matignon. "Il est l'un de ceux qui correspondent très clairement au profil défini" avait déjà glissé le 15 mai dans la matinée Benjamin Griveaux, porte-parole d'En Marche sur Europe1.

> Deux hommes qui se connaissent bien 

Le nouveau président et le député-maire du Havre "se connaissent et ils s’apprécient pour leur honnêteté intellectuelle, et leur rigueur l’un et l’autre", avait ajouté Benjamin Griveaux. Et de fait, les deux énarques ne manquent pas de points communs. Passé par une classe préparatoire hypokhâgne, Edouard Philippe a ensuite intégré l’Institut d'Études Politiques de Paris puis l’ENA. Comme Emmanuel Macron, il a connu plusieurs expériences dans le privé: dans un cabinet d'avocat américain, puis chez Areva, où il a occupé le poste de directeur des Affaires publiques de 2007 à 2010. De six ans l'aîné du nouveau président, Edouard Philippe n'a rencontré Emmanuel Macron qu'en 2011, à l'occasion d'un dîner. Mais depuis, les hommes se seraient régulièrement revus, au point de devenir des amis. 

Jeudi dernier dans l'après-midi, lorsque la liste des 428 députés investis En Marche a été dévoilée, les rumeurs sont allés bon train. Le mouvement du nouveau président avait en effet gelé la circonscription de l'ouest du Havre, où la candidate LR Agnès Firmin-Le Bodo se présente à la succession d'Edouard Philippe. Le signe d'un rapprochement? Dans son discours de lancement de campagne des législatives dans la ville le même jour, Edouard Philippe avait lancé au nouveau locataire de l'Élysée un défi, l'invitant à "transgresser" la "tradition qui veut qu'un président élu désigne un Premier ministre issu de sa majorité.

> Dépasser les clivages 

L'équipe d'Emmanuel Macron avait également fait savoir à plusieurs reprises que le choix du Premier ministre devrait correspondre à la volonté, rappelée à plusieurs reprises pendant la campagne, de dépasser les clivages partisans. À quelques semaines des élections législatives, cette nomination est donc aussi stratégique pour le nouveau président, qui espère consolider son camp. La nomination d'Edouard Philippe pourrait donc être la solution pour Emmanuel Macron afin de rallier une partie de la droite, après avoir déjà obtenu le soutien de nombreux socialistes lors de sa campagne. "Les membres du gouvernement qui seront nommés devront répondre parfaitement à ce critère-là de dépassement des clivages entre la gauche et la droite et embrasser un projet progressiste" rappelait encore ce lundi matin, Benjamin Griveaux sur Europe1.

Le profil d'Edouard Philippe, mi à gauche mi à droite, fait donc sens. Le député-maire du Havre a d'abord adhéré au Parti socialiste et soutenu Michel Rocard, alors Premier ministre de François Mitterrand, avant de rendre sa carte au bout de deux ans et de rejoindre les modérés de la droite. En 2002, il intègre l’équipe d’Alain Juppé à la fondation de l’UMP. Il sera ensuite son conseiller spécial au ministère de l’Ecologie en 2007, puis son co-porte-parole avec Benoist Apparu en 2017 pour la primaire de la droite.

> Un choix stratégique?

Comme le rappelle le journal L'Opinion ce jeudi, Edouard Philippe présente un troisième avantage: sa carrière politique lui a permis de tisser un lien solide et générationnel avec de nombreux maires et élus de droite et du centre. Il est notamment proche de Christophe Béchu, maire d'Anger, Gérald Darmanin, maire de Tourcoing, ou encore d'Alexis Kohler, le nouveau secrétaire général de l’Elysée, qu'il a rencontré dans sa jeunesse chez les jeunes Rocardiens.

Maire plébiscité du Havre, il a donc "toutes les compétences" pour être le bras droit d'Emmanuel Macron à la tête du gouvernement, selon Christophe Barbier. Mais l'éditorialiste de BFMTV de tempérer. "Est-ce qu'il en a la puissance? Ça reste à prouver" a-t-il fait valoir, rappelant que le nouveau Premier ministre devra "reprendre en main la majorité". "Ça veut dire la construire et la piloter, éviter les frondeurs et éviter l'enlisement si on est en majorité relative".

Maëva Poulet