Mouvement social: Faure hué, Mélenchon acclamé

"Jean-Luc président !" d'une part, "Dégage !" d'autre part: une rue, deux ambiances. D'un côté, Jean-Luc Mélenchon, leader des insoumis, fait exploser une bombe de chantier avec des cheminots, mobilisés jeudi avec les salariés de la fonction publique contre la cure d'austérité voulue par le gouvernement; de l'autre Olivier Faure, futur premier secrétaire du Parti socialiste, est hué par les manifestants lorsqu'il tente de rejoindre le cortège.
Exfiltré, le successeur de Jean-Christophe Cambadélis ne cherche pas à masquer ses difficultés, et adopte une posture volontariste:
"Nous payons le fait que, pour beaucoup, nous serions une gauche molle, édulcorée, une gauche qui aurait perdu le sens de ses propres valeurs. Ils réapprendront à nous connaître, ils réapprendront à nous respecter aussi. (...) Nous savons d’où nous venons, nous avons fait 6% à l’élection présidentielle, donc personne ne peut imaginer un accueil avec un tapis rouge."
Convergence des luttes
De tapis rouge, il avait été question le matin même sur notre antenne. "Je ne crois pas que le mouvement d’aujourd’hui doive être interprété par cette espèce de tapis rouge de la gauche selfie, qui vient et fait des photos, parce que c’est pas le sujet", estimait alors Jean-Luc Mélenchon.
Dans le cortège, le quatrième de l'élection présidentielle a tenté de se placer au-dessus des questions partisanes, souhaitant, à l'instar de nombreux manifestants, une "convergence des luttes".
"La question c’est: combien vont se mettre en mouvement, est-ce qu’ils vont être seuls ? Est-ce qu’on peut s’y mettre tous ? On a besoin d’un moment où l’on puisse tous se rassembler, et qu’on le fasse un dimanche, parce que ça ne coûte pas une journée de paie", a-t-il affirmé.
Passif
Ces deux accueils, aux antipodes l'un de l'autre, illustrent la division de la gauche qui, malgré le rassemblement de 12 formations et la présence de nombreuses personnalités dans le cortège (Benoît Hamon, Pierre Laurent, Olivier Besancenot), ne parvient pas à faire front commun contre les mesures gouvernementales.
À la tête d'un Parti socialiste moribond, Olivier Faure se trouve dans une situation particulièrement difficile: tentant aujourd'hui de faire exister sa formation dans l'opposition, il doit cependant faire avec le passif de la gauche "de gouvernement", qui votait une réforme de la SNCF en 2014, impopulaire chez les cheminots. Si, comme le faisait remarquer Julien Dray, "il y a aujourd'hui plus de militants à l'extérieur du Parti socialiste qu'à l'intérieur", il n'en reste pas moins que l'héritage de ce que les frondeurs appelaient en leur temps un "quinquennat de reniements" reste difficile à porter pour le nouveau patron de Solférino.