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La stratégie de Juppé pour contrer Fillon dans l'entre-deux tours

Le maire de Bordeaux Alain Juppé et candidat Les Républicains à la primaire à droite en meeting, le 20 avril 2016.

Le maire de Bordeaux Alain Juppé et candidat Les Républicains à la primaire à droite en meeting, le 20 avril 2016. - Jean-François Monier - AFP

Conservatisme et manque de crédibilité: voilà les deux angles d'attaque du camp Juppé, qui espère inverser la tendance dans l'entre-deux tours en s'en prenant au programme de François Fillon.

"Peut-être qu'on a été trop gentils." Au lendemain de la victoire massive et surprise de François Fillon au premier tour de la primaire à droite, le camp juppéiste fait son autocritique. Mais malgré cet aveu de faiblesse concédé lundi matin sur BFMTV par Maël De Calan, le porte-parole d'Alain Juppé, le "combat" continue, comme l'a annoncé le candidat dimanche soir. Il se pourrait même qu'il ne fasse que commencer, car le camp d'Alain Juppé est déjà en ordre de bataille, pour espérer contrer François Fillon en l'espace de quelques jours.

Au fil des premières heures de ce "jour d'après", plusieurs de ses proches et de ses soutiens ont donné des indices sur la stratégie qui sera employée jusqu'à dimanche. L'idée est d'attaquer le candidat adverse, cela ne fait pas de doute. Mais pas de manière frontale, car le maire de Bordeaux, s'il doit montrer sa détermination, doit aussi garder son image d'homme modéré.

Attaquer le programme mais pas l'homme

L'attaque ciblera donc non pas l'homme mais son programme, jugé socialement conservateur et économiquement peu réaliste. Un combat "projet contre projet", selon l'expression utilisée par Alain Juppé et repris mot pour mot par un entourage au diapason avec son candidat.

"La stratégie c’est défendre, on ne veut pas attaquer", a par exemple renchérit Jean-Pierre Raffarin lundi matin, interrogé sur RMC et BFMTV. "Sans attaquer François Fillon, on va faire apparaître les différences qu'il y a entre les deux projets", a promis Maël De Calan. 

Défendre sa crédibilité et son modernisme

Les attaques contre le manque de crédibilité et la dureté du programme de François Fillon étaient apparues en amont du premier tour. Lors du discours de dimanche, elles sont revenues clairement. 

"Je veux rassembler les Français autour de réformes crédibles pour rétablir l'autorité de l'État et renouer avec le plein emploi", a d'abord déclaré le candidat. "Je veux des réformes modernes qui préparent l'avenir, plutôt que de cultiver la nostalgie du passé, des réformes qui nous fassent avancer sur le chemin d'une stricte égalité entre les femmes et les hommes, sur le chemin d'une nouvelle croissance...", a-t-il poursuivi.

Cibler le programme économique

"Notre projet c’est une réforme vraie, authentique, réaliste, une réforme juste qui ne crée pas des inégalités sociales, qui au contraire assure de la cohésion sociale. Et nous voulons en même temps des réformes d’avenir", a insisté Jean-Pierre Raffarin. 

"On a un projet réfléchi, radical et crédible, et peut-être de l’autre côté quelqu’un qui en veut toujours plus, qui en dit toujours plus. On peut s’interroger sur sa crédibilité. François Fillon ne pourra pas mettre en place une partie de son projet", a déclaré sur BFMTV dimanche soir Benoist Apparu, autre important soutien du maire de Bordeaux, qui souligne que les Français "ne connaissent pas" le programme de François Fillon.

"Il y a un projet plus à droite, plus radical, mais les interrogations que nous avons sur la faisabilité de ce projet sont fortes", a-t-il encore répété lundi matin. Le message est donc clair. 

Dans le collimateur du camp Juppé, l'objectif revendiqué par François Fillon de supprimer 500.000 postes de fonctionnaires au cours du prochain quinquennat. "Le programme le moins crédible", cinglait dès la semaine dernière le maire de Bordeaux.

La carte du progressisme

Candidat de la modernité face à François Fillon, Alain Juppé peut compter sur le soutien de Nathalie Kosciusko-Morizet, qui a joué cette carte pendant la campagne pour la primaire. Un ralliement symbolique en termes de valeurs, plus qu'en termes de nombre de voix. Car François Fillon a les soutiens de Nicolas Sarkozy et de Bruno Le Maire.

Alain Juppé doit donc distiller ces prochains jours des indices de son progressisme, pour espérer s'assurer les voix des électeurs modérés, voire de la gauche et du centre, qui voteront dimanche.

A gauche, les critiques fusent déjà contre les amitiés de François Fillon avec Sens commun et la Manif pour tous, et sur sa position d'alliance avec la Russie de Poutine et la Syrie d'Assad. A droite, la proximité avec la Manif pour tous inquiète les modérés, tandis que les autres dénoncent ses "orientations diplomatiques", comme Hervé Mariton, qui dit s'en inquiéter. 

Charlie Vandekerkhove