"Je suis innocent": condamné, Nicolas Sarkozy assure qu'il "dormira en prison la tête haute"

Un coup de massue au tribunal. L'ex-président de la République Nicolas Sarkozy a été condamné ce jeudi à cinq ans de prison ferme pour "association de malfaiteurs" dans le cadre de l'affaire des soupçons de financements libyens de sa campagne. Sa condamnation est assortie d'un mandat de dépôt à effet différé. Concrètement, cela signifie que l'ex-président sera incarcéré dans les prochaines semaines - une première pour un ancien chef de l'État.
"La haine n'a décidément aucune limite. J'assumerai mes responsabilités. Je déférerai aux convocations de la justice. S'ils veulent absolument que je dorme en prison, je dormirai en prison mais la tête haute. Je suis innocent", a lancé à la sortie du jugement l'ancien chef de l'État, manifestement abasourdi par la décision de la justice.
"Ce qui s'est passé aujourd'hui, dans cette salle du tribunal correctionnel est d'une gravité extrême pour l'État de droit, la confiance que l'on peut avoir pour la justice", a-t-il également déclaré.
"Cette injustice est un scandale"
Nicolas Sarkozy a annoncé dans la foulée de sa condamnation faire appel et promis de "se battre jusqu'à son dernier souffle pour clamer mon innocence". "Cette injustice est un scandale", a encore insisté l'ancien président.
Mais l'organisation d'un second procès ne suspendra pas la peine de prison ferme et son application. Nicolas Sarkozy peut cependant bien demander à bénéficier de la libération conditionnelle, étant âgé de 70 ans, mais une fois qu'il est incarcéré.
L'ancien chef de l'Etat a également été condamné à une amende de 100.000 euros, ainsi qu'à l'interdiction d'occuper une fonction publique et une inéligibilité, le tout pendant une durée de cinq ans, l'excluant totalement de fait de la vie politique. L'ancien maire de Neuilly n'avait jamais vraiment quitté la droite, en dépit de son absence de mandat et de son échec à la primaire des Républicains en 2016.
Des faits d'une "gravité exceptionnelle"
Pour justifier sa décision, la présidente du tribunal Nathalie Gavarino a souligné que les faits reprochés étaient d'"une gravité exceptionnelle", "de nature à altérer la confiance des citoyens".
La justice a notamment estimé qu'"en tant que ministre, président de l'UMP" (l'ancien nom des LR NDLR), Nicolas Sarkozy avait "laissé ses proches collaborateurs et soutiens politiques - sur lesquels il avait autorité - agir en son nom". Le but: solliciter les autorités libyennes "afin d'obtenir ou tenter d'obtenir des soutiens financiers en Libye en vue d'obtenir le financement de la campagne" de 2007.
La magistrate a suivi en partie les réquisitions très sévères requises par le parquet national financier (PNF) en mars dernier.
Appel à "l'amour"
À l'époque, à l'issue d'un procès-fleuve, le PNF avait requis 7 ans de prison ferme, 300.000 euros d'amende, et 5 ans d'inéligibilité, mais sans mandat de dépôt, c'est-à-dire sans incarcération immédiate à l'encontre de Nicolas Sarkozy.
Pendant trois jours, les magistrats avaient décrit l'ancien président comme étant le "véritable décisionnaire, le véritable commanditaire" d'un pacte de corruption "inconcevable, inouï, indécent" avec l'ancien dictateur libyen Mouammar Kadhafi. Ils avaient encore dénoncé une "quête effrénée de financement" pour satisfaire une "ambition politique dévorante".
Du côté des proches de Nicolas Sarkozy, l'heure est à la combativité. Son épouse Carla Bruni a jugé que "l'amour était la réponse". La présidente des députés RN Marine Le Pen, elle-même sous le coup d'une peine d'inéligibilité pour laquelle elle a fait appel, a évoqué "un grand danger" pour la démocratie.