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Ils étaient fillonistes...mais ont rejoint Sarkozy ou Juppé avant la primaire

Alain Juppé et Valérie Pécresse lors de la campagne pour les régionales, le 1er décembre 2015.

Alain Juppé et Valérie Pécresse lors de la campagne pour les régionales, le 1er décembre 2015. - Patrick Kovarik - AFP

Après la défaite de Nicolas Sarkozy à la présidentielle de 2012, de nombreuses personnalités de la droite se sont tournées vers François Fillon. Malheureusement pour eux, certains n'ont pas résisté aux sirènes d'Alain Juppé et de Nicolas Sarkozy à l'approche de la primaire. Un choix peu judicieux au final...

Nous étions en 2012. Nicolas Sarkozy venait de laisser les clés de l’Elysée à François Hollande et avait "quitté" la politique. La droite, qui devait à nouveau s’habituer à être l'opposition, était à reconstruire. Certains ont pris le sillage de François Fillon dans la bataille désastreuse pour la direction de l’UMP fin 2012, certains sont revenus vers Nicolas Sarkozy dès 2014. Ce dernier allait, c’était certain, s’affirmer comme le candidat naturel de la droite pour la reconquête en 2017.

François Fillon était alors très loin du costume de favori. A présent, des fillonistes convertis ou reconvertis au sarkozysme, ou au juppéisme, se sentent fort dépourvus au lendemain du premier tour de la primaire de la droite et du centre puisque l'ancien chef du gouvernement est en première position avec 44% des suffrages.

Eric Ciotti, d'une défaite à l'autre

Eric Ciotti, député élu dans les Alpes-maritimes, était un militant fervent de la cause de François Fillon lors de la campagne pour la présidence de l’UMP en 2012 face à Jean-François Copé. Mieux, il était même directeur de ladite campagne. Quelques semaines plus tard, alors que le congrès visant à désigner le nouveau chef du principal parti d’opposition tourne vinaigre entre les deux candidats, il participe au schisme du groupe parlementaire de l’UMP à l’Assemblée nationale. Avec ses camarades partisans de l’ancien Premier ministre, il crée en effet un temps le groupe Rassemblement-UMP.

En septembre 2014, il voyage au Kurdistan irakien en compagnie de son champion. Parallèlement, il n’hésite pas à afficher son allégeance dans la presse. Ainsi, dans cet entretien accordé à Valeurs actuelles, Eric Ciotti, qui définit le fillonisme comme "une volonté de réforme profonde", dresse un portrait flatteur de François Fillon…contrastant avec celui de Nicolas Sarkozy:

"J’ai de l’affection pour Nicolas Sarkozy, mais je considère que, pour 2017, le meilleur pour devenir président de la République, c’est François Fillon." Tout ça pour annoncer son ralliement à Nicolas Sarkozy en juillet dernier, et par conséquent, pour appeler à voter François Fillon au second tour de la primaire après la défaite de l’ex-chef de l’Etat.

Laurent Wauquiez critique le sarkozysme puis le loue

Laurent Wauquiez aussi était de l’aventure filloniste "R-UMP". Il faut dire qu’il avait alors de quoi se sentir floué par les irrégularités lors de la campagne pour la présidence de l’UMP: il devait devenir le vice-président du parti (ce qu’il finira d’ailleurs par être après de longues tractations).

S’il est proche de l’ancien chef du gouvernement dont il fut ministre, il l'est alors beaucoup moins du président sortant et battu. Il se montre même très critique du bilan de Nicolas Sarkozy dans Le Point, en août 2013: "On n’échoue pas pour deux mois de meetings, on échoue sur ce qu’on n’a pas fait pendant cinq ans." Il ajoutait aussi: "La droite échoue parce qu’elle n’a pas le courage de mettre ses idées en application quand elle arrive au pouvoir." 

Inaction, réformes qui n’en sont pas, lâcheté, la coupe est pleine. Mais par la suite, Patrick Buisson s’intéresse à Laurent Wauquiez et, peu à peu, le rapprochement avec Nicolas Sarkozy s’ébauche. Entre temps, Patrick Buisson est parti mais Laurent Wauquiez est resté. Mal lui en a pris.

Eric Woerth s'est rallié il y a déjà longtemps à l'ancien président

Lui aussi figurait au nombre des 73 dissidents du groupe parlementaire "R-UMP", décidément un acte fondateur de la geste fillonienne. La fidélité de l’ancien ministre du Budget, Eric Woerth, à son ancien Premier ministre résiste à l’échec de celui-ci au moment de s’emparer du mouvement. En janvier 2013, il confie à son sujet: "Il a une part, seul, de l’avenir de notre pays entre ses mains." 

Mais il aura suffi que Nicolas Sarkozy montre à nouveau signe de vie pour qu’Eric Woerth fasse le trajet inverse. En septembre 2014, il annonce son soutien à l’ex-président de la République qui cherche à redevenir celui de l’UMP. Il ne l’a plus lâché ensuite.

Pierre Lellouche n'a pas su s'en tenir à son pronostic

Comme François Fillon, Pierre Lellouche est député élu à Paris. Un voisinage qui a longtemps semblé lui correspondre tant les deux hommes ont fait cause commune ces dernières années. Le Lab rappelle même qu’en novembre 2015, il estimait: "De toute façon, je ne soutiendrai pas Nicolas Sarkozy, il ne gagnera jamais".

Très cohérent avec lui-même, il parraine la candidature de François Fillon et non celle de Nicolas Sarkozy. De manière moins cohérente, il choisit finalement de prendre place dans l’équipe de celui qui fut maire de Neuilly-sur-Seine.

François Baroin, un coup de maître qui tombe à l'eau

"Deux mois à l'intérieur, cinq ans à l'extérieur", c'est ainsi que Nicolas Sarkozy, en pleine campagne présidentielle de 2007, prophétisait la suite de la carrière de celui qui l'avait remplacé place Beauvau, François Baroin. Dès 2010, cependant, François Baroin est de retour dans l'équipe gouvernementale.

Chiraquien indécrottable et, à ce titre, coutumier des tensions avec Nicolas Sarkozy, François Baroin s'entend naturellement mieux avec François Fillon.

Lui aussi, il fait sa campagne pour l'UMP en 2012. Mais l'influent président de l'Association des maires de France (AMF) suscite bien des convoitises. Et Nicolas Sarkozy finit par obtenir son ralliement en lui promettant Matignon. Cette perspective s'est brutalement éloignée le 20 novembre. 

Valérie Pécresse préfère Juppé...depuis seulement trois semaines

Valérie Pécresse, présidente du conseil régionale d’Île de France, n’a pas soutenu Nicolas Sarkozy après avoir déserté les troupes de François Fillon. Non, mais elle a rejoint Alain Juppé, et ce, seulement trois semaines, avant le premier tour de la primaire. 

Elle a cependant beaucoup en commun avec les anciens fillonistes cités ci-dessus. Comme eux, elle fait la campagne de François Fillon en 2012 pour la présidence de l’UMP dont elle compte alors être la secrétaire générale. Comme eux, elle affirme son appartenance au fillonisme en faisant partie des députés sécessionnistes à l’Assemblée nationale. Comme certains d’entre eux, dont Eric Ciotti, elle accompagne François Fillon dans son voyage en Irak et au Kurdistan.

En tous cas, Valérie Pécresse, dont le candidat, Alain Juppé, est toujours en course dans la primaire, a peu de chance de trouver grâce aux yeux de François Fillon désormais. Depuis son revirement, ce dernier a choisi de remplacer son nom de famille par un jeu de mots facile mais efficace: "Valérie Traîtresse".

Robin Verner