BFMTV
Rassemblement national

"Saignée sociale" contre ode aux patrons: Marine Le Pen et Jordan Bardella se divisent les rôles pour leur 1er-Mai

Marine Le Pen et Jordan Bardella à Narbonne le 1er mai 2025

Marine Le Pen et Jordan Bardella à Narbonne le 1er mai 2025 - Lionel BONAVENTURE / AFP

La présidente des députés du RN s'est longuement arrêté sur les plans sociaux qui visent plusieurs entreprises ce 1er mai tandis que Jordan Bardella a regretté "les charges, les normes". Fidèles à leur ligne, aucun d'entre d'eux n'a invoqué "le plan B" que représente le jeune homme si Marine Le Pen ne pouvait pas se présenter en 2027.

Chacun dans son couloir. Pour leur meeting du 1er-Mai à Narbonne, conçue comme une rampe de lancement vers les municipales, Marine Le Pen et Jordan Bardella s'étaient clairement répartis les rôles. À elle la ligne sociale, à lui les clins d'œil aux entrepreneurs.

À peine montée sur scène, la présidente des députés RN a regretté le climat de "saignée sociale qui s'abat sur des millions de Français", déplorant que l'Hexagone soit en état de "désertification industrielle" en pleine multiplication des plans de licenciement, de Jennyfer à ArcelorMittal en passant par Vercorex.

Deux lignes économiques

"On ne construit pas la richesse d’un pays et la hausse des salaires en multipliant les livreurs Uber", a encore regretté l'ex-candidate à la présidentielle, liant "la justice sociale" à la "justice économique".

Le patron du mouvement a eu, lui, des accents bien différents, regrettant que le pays "croule sous les impôts, les charges, les normes".

"Le RN est le parti du travail, de la France qui bosse sans jamais se plaindre", a encore jugé Jordan Bardella, se lançant à plusieurs reprises dans une ode "aux entrepreneurs qui prennent tous les risques".

Mots doux pour le patronat

Ces dernières années, le jeune homme n'a eu de cesse de dérouler un discours pensée pour attirer la droite entrepreneuriale. Lundi dernier, le députe européen a ainsi défendu sa vision de l'économie devant des chefs d'entreprise réunis par l'organisation patronale Ethic. Marine Le Pen, elle, a toujours été réticente à s'afficher publiquement avec le monde des patrons.

"Nous avons un État de plus en plus intrusif et de moins en moins protecteur", a encore regretté Jordan Bardella devant les partisans du RN dans l'Aude, reprennant une antienne de Patrick Martin, le patron du Modem.

Très loin de Marine Le Pen qui n'a pas abordé ces questions lors de son discours. En janvier sur LCI, elle avait été encore plus claire. Interrogée sur l'opportunité de supprimer des postes de fonctionnaires, elle avait regretté "des trucs de droite".

Faut-il voir dans cette stratégie une répartition des rôles très claire entre la présidente des députés RN et le patron du mouvement, l'une allant sur le terrain de la proximité avec les Français et l'autre sur la main tendue au monde économique, en partie rétif à voter pour le parti à la flamme?

Ticket entre l'Élysée et Matignon

Toujours est-il que cette division des rôles a des allures de ticket pour la présidentielle, comme si de rien n'était avec Marine Le Pen à l'Élysée et Jordan Bardella à Matignon en 2027.

La quinquagénaire est pourtant sous le coup d'une peine d'inéligibilité de cinq ans pour laquelle elle a fait appel. Si sa condamnation était confirmée en seconde instance "au printemps" 2026, elle ne serait pas en mesure de se présenter.

Si son bras droit avait veillé dans les premières semaines après cette décision de justice à ne pas alimenter l'idée qu'il pourrait remplacer, la donne a changé le week-end dernier.

"Si elle est empêchée, je serai le candidat de Marine Le Pen", avait officialisé Jordan Bardella dans les colonnes du Parisien. Il avait cependant bien veillé à préciser qu'il n'y "avait pas d’ambiguïté sur le fait qu'elle était bien sa candidate".

"Mener le combat" pour être candidate

Mais cette fois-ci, à Narbonne, le jeune homme s'est bien gardé d'évoquer devant les sympathisants RN cette possibilité. "Ce combat" pour pouvoir être sur la ligne de départ, "je vais le mener avec toute l'énergie que vous connaissez, je vais le mener avec le soutien de Jordan Bardella et avec vous", a insisté de son côté Marine Le Pen.

Nulle trace dans son discours d'un passage de relais à son poulain. La députée du Pas-de-Calais a au contraire exhorté ses partisans à ne pas se laisser "voler la victoire de 2027".

À moins de 10 mois des municipales dans lesquelles le parti place de grands espoirs, elle a demandé à ses sympathisants de "se lever contre l'entreprise de confiscation de la démocratie". Très loin donc d'acter que sa candidature à la présidentielle était définitivement derrière elle.

Marie-Pierre Bourgeois