Les socialistes déposent leur motion de censure et fustigent un gouvernement "cédant" aux "passions tristes" du RN

Olivier Faure à l'Assemblée le 15 janvier 2025 - Thibaud MORITZ / AFP
François Bayrou va bien devoir faire face à une nouvelle motion de censure, la sixième depuis qu'il est Premier ministre. Et comme les précédentes, elle ne devrait pas aboutir au renversement de son gouvernement. Ce lundi 17 février, les 66 députés socialistes ont déposé une motion accusant le gouvernement de François Bayrou de "céder aux passions tristes de l'extrême droite".
Elle avait été annoncée par le groupe PS après son renoncement à censurer le gouvernement sur les budgets, et présentée comme une réponse à la "trumpisation" du débat public et à l'expression de "submersion" migratoire, employée par le Premier ministre pour parler de Mayotte.
Une motion de censure "spontanée"
Contrairement aux précédentes motions de censure, déposées après que le gouvernement eut engagé sa responsabilité en recourant à l'article 49.3, la motion à l'initiative des élus socialistes s'inscrit dans le cadre de l'article 49.2 de la Constitution et est dite "spontanée". Dans les deux cas, le texte doit recueillir la majorité absolue des députés.
"Le Premier ministre a repris les mots funestes de Jean-Marie Le Pen", critiquent les socialistes dans le texte. Qualifiant l'extrême droite "d'ennemi mortel de la République", ils reprochent au gouvernement d'avoir "cédé" à ses "passions tristes" en "offrant des victoires culturelles inédites au Rassemblement national qu'il est censé combattre".
Dans leur viseur notamment: le débat sur le droit du sol suggéré par le garde des Sceaux Gérald Darmanin et le soutien à un texte LR restreignant le droit du sol à Mayotte, adopté à l'Assemblée avec des voix de l'ex-majorité macroniste.
L'affaire Bétharram s'invite dans le texte
Accusant le gouvernement d'être "l'accélérateur de nombreux affaissements politiques et moraux", ils reprochent également au ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau d'avoir considéré que "l'État de droit a été dévoyé" par une décision de justice annulant l'expulsion de l'influenceur algérien Doualemn.
Les socialistes évoquent aussi l'affaire Bétharram dans leur texte, estimant que "le Premier ministre ne peut se soustraire aux interrogations légitimes des victimes et de leurs proches, de la représentation nationale et de la presse".
Ils fustigent aussi l'adoption à l'Assemblée, à l'initiative de l'ex-Premier ministre Gabriel Attal, d'un texte sur la justice des mineurs, d'une "dépénalisation des atteintes à la biodiversité" portée par la droite sénatoriale, ou encore "la remise en cause du Pacte Vert" au niveau européen.
Une motion "au caractère assez artificiel" pour Bompard
L'examen de la motion de censure devrait intervenir mercredi, au mieux en fin d'après-midi. Elle devrait être votée par les députés LFI, et ce malgré les propos tenus par Jean-Luc Mélenchon à La Tribune Dimanche ce week-end. Les socialistes "ne sont plus nos alliés", a-t-il cinglé. "S'ils veulent être des partenaires, ce sera dans l'action et s'ils cessent d'aider ce gouvernement à survivre.
"Le Parti socialiste a refusé a cinq reprises consécutives depuis le début du mois de janvier de censurer le gouvernement de François Bayrou" a souligné le coordinateur national de La France insoumise Manuel Bompard ce lundi sur BFMTV. "Évidemment que cette motion de censure à un caractère assez artificiel", mais "à chaque fois qu'il y a une opportunité de renverser ce gouvernement qui fait une mauvaise politique, je vote en faveur de (la) motion de censure".
Si la gauche devrait se montrer unie en votant la motion de censure, le texte n'a aucune chance d'aboutir sans les voix du Rassemblement national. "Nous ne la voterons pas parce que le Parti socialiste l'a déposée pour une seule et unique raison: revenir et contester les propos de bon sens, même s'ils sont insuffisants, du Premier ministre", a expliqué dimanche sur France Inter le porte-parole du groupe RN Thomas Ménagé.
"Il y aura peut être d'autres occasions de censurer le gouvernement. Nous, on ne se l'interdit pas, dans les prochains mois, dans les prochaines semaines (...). Mais l'heure n'est pas venue", a-t-il cependant insisté.