Affaire "Doualemn": Retailleau déplore "un échafaudage juridique qui désarme le régalien"

Mis en échec sur l'expulsion de l'influenceur algérien "Doualemn", dont le tribunal administratif a annulé l'obligation de quitter le territoire (OQTF), Bruno Retailleau en appelle à l'opinion. "Je laisse aux Français et aux Françaises le soin de porter une appréciation", dit le ministre de l'Intérieur ce vendredi 7 février à l'occasion d'un déplacement en Seine-et-Marne, déplorant que "l'on ai(t) bâti un échafaudage juridique qui désarme l'État régalien".
"Ce que je veux, c’est préserver la société, la communauté nationale, des individus les plus dangereux. Or, un individu qui n’est pas national - lui est Algérien - qui est condamné à de multiples reprises, qui s’en prend à d’autres personnes sur le sol français, il n’a rien à (faire) en France. Il faut bien sûr l’expulser", développe-t-il.
Bruno Retailleau va "continuer la procédure d'expulsion"
"Il y a des points sur lesquels on doit changer la loi", insistait déjà Bruno Retailleau sur LCI jeudi soir. Tandis que son homologue à la Justice Gérald Darmanin déclarait la même ligne politique depuis l'Assemblée nationale: "S'il faut modifier la loi une nouvelle fois pour que les choses soient extrêmement claires et que la République et l'État ne fassent pas preuve d'impuissance mais expulsent du territoire national toute personne étrangère irrégulière, alors il faudra modifier la loi."
Saisi en urgence, le juge du tribunal administratif de Melun a tenu audience ce jeudi et "décidé d'annuler les décisions prises par le préfet de l'Hérault", selon un communiqué de l'instance. Il "enjoint à l'autorité préfectorale de réexaminer la situation de l'influenceur "Doualemn" dans un délai de trois mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant le temps de ce réexamen".
Pour autant, le ministre de l'Intérieur va "faire appel et continuer la procédure d'expulsion", a indiqué son entourage à l'AFP.
Les avocates de Doualemn estiment que le ministère "a perdu"
Doualemn, ressortissant algérien de 59 ans, aux 168.000 abonnés sur TikTok, avait été interpellé le 5 janvier à Montpellier, et placé en rétention.
Dans une vidéo sur TikTok, il avait tenu des propos, au sujet d'un opposant au régime algérien, qui avaient fait l'objet de traductions fluctuantes, initialement présentées par les autorités françaises comme un appel au meurtre. Celle retenue par la justice relevait une incitation à "attraper" un homme et lui infliger une "correction sévère".
Le préfet de l'Hérault avait estimé que ses propos justifiaient le retrait de son titre de séjour et son expulsion. Transféré vers Paris, il avait été mis dans un avion vers l'Algérie. Puis son renvoi en France par les autorités algériennes à son arrivée sur leur sol, le 9 janvier, avait provoqué une crise diplomatique entre la France et l'Algérie.
Depuis, les expulsions d'"influenceurs" algériens se sont multipliées, dans un contexte diplomatique toujours plus tendu. Depuis son retour en France, Doualemn était placé au centre de rétention administrative du Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne).
"Doualem sort de rétention", se sont félicitées dans un communiqué ses avocates, Marie David-Bellouard et Julie Gonidec, voyant dans les décisions prises à son encontre "un acharnement féroce et aveugle, aujourd'hui sanctionné". "Le ministère a joué son va-tout et a perdu. Nous dénonçons une rétention illégale depuis le 29 janvier et saluons une décision logique qui y met un terme", ont-elles écrit.
Le 29 janvier, le tribunal administratif de Paris avait suspendu en référé l'expulsion de "Doualemn" vers l'Algérie, au motif que la procédure d'urgence utilisée par le ministre de l'Intérieur n'était selon lui pas justifiée.