BFMTV
Politique

Municipales 2020: comment Edouard Philippe se prépare pour Le Havre

Edouard Philippe.

Edouard Philippe. - ALAIN JOCARD / POOL / AFP

Un discours et une interview où il semble envisager une candidature aux municipales dans son ancien fief normand, des réceptions, une règle de conduite pour le gouvernement taillée pour lui... Les signes d'une volonté d'Edouard Philippe de se présenter au Havre lors de la campagne de 2020 s'accumulent.

Lorsqu'il se présente dans le bureau élyséen de Valéry Giscard d'Estaing à la fin du mois d'août 1976 pour se démettre de ses fonctions de Premier ministre, Jacques Chirac promet au chef de l'Etat: "Vous n'entendrez plus parler de moi. Oui, parce que je vais ouvrir une galerie de peinture à laquelle je vais me consacrer et je ne participerai plus à la vie politique". Sept mois plus tard, il devenait le premier maire de Paris depuis la Commune et une sacrée épine dans le pied présidentiel.

Cette scène pourrait bien trouver un écho très bientôt. Il semble en effet de moins en moins exclu que le chef du gouvernement lâche Matignon pour une mairie.

Edouard Philippe ne se cache pas 

Pour autant, Edouard Philippe ne se cache pas. Ces derniers jours, il n'a cessé de rappeler son attachement à la ville du Havre, qu'il a dirigée de 2014 (il avait alors été élu au premier tour) à 2017, de prendre date pour les municipales du printemps prochain, sans donner l'impression de vouloir encourager les fantasmes. "Je donnerai ma réponse en janvier. Voilà. Point", a-t-il asséné lors d'un entretien paru dans Paris-Normandie ce vendredi. 

"Chacun sait que Le Havre, c’est ma ville. J’ai dit à Bordeaux une évidence: si je devais être candidat, ce serait forcément ici. Je suis en vérité surpris que cela puisse surprendre", a-t-il également déclaré lors de la même interview. Dimanche dernier, à Bordeaux, discourant durant le "Campus des territoires" organisé par la République en marche, le Premier ministre calmait les ardeurs d'observateurs cherchant à tirer trop loin la comparaison chiraquienne en l'imaginant candidat à la mairie de Paris, en posant qu'une telle hypothèse n'avait "aucun sens". Il développait:

"On n’est jamais candidat ailleurs qu’à l’endroit où l’on est enraciné, à l’endroit que l’on a dans son cœur, dans sa tête et dans ses tripes. Mes tripes, elles ont un goût d’eau salée. Si un jour je devais être candidat aux municipales, je ne vois pas très bien où ça pourrait être ailleurs qu’au Havre."

Invitations à Matignon 

Bon, l'affaire est donc entendue. Si jamais Edouard Philippe devait s'asseoir dans un fauteuil de maire, seul le trône havrais lui conviendrait. Mais entre ce type de professions de foi et un déménagement en Seine-Maritime, un fossé reste à enjamber. Mais les signes des envies de Normandie d'Edouard Philippe sont bien là. Le Figaro note ainsi, qu'en-dehors même de ses allers-retours entre Le Havre et Paris en juillet et août, il a reçu diverses personnalités venues de son fief à Matignon: comme la majorité municipale le 26 août, et les maires de la communauté urbaine locale. 

De surcroît, la droite havraise n'est pas dans sa meilleure forme en son absence. Son successeur, Luc Lemonnier, a dû démissionner en mars dernier en lien avec une affaire de harcèlement sexuel, impliquant l'envoi de photos dénudés à une femme. C'est Jean-Baptiste Gastinne qui a donc enfilé l'écharpe. Il n'empêche, certains élus continuent de l'attendre. La députée Agir désignée par la Seine-Maritime, Agnès Firmin Le Bodo, plaçait dans Le Parisien en début de semaine: "On attend toujours son choix. Mais c'est lui le candidat naturel". 

Du sur-mesure 

Un dernier élément renforce l'idée d'un Edouard Philippe ménageant une équipée havraise. La règle qu'il a élaborée pour les membres du gouvernement éventuellement candidats aux prochaines municipales sied bien à sa situation personnelle. La nécessité d'attendre 2020 pour se déclarer, la possibilité de continuer à participer à l'action de l'exécutif tout en faisant campagne puis de choisir entre la mairie et son portefeuille en cas de victoire lui permettent de suivre un scénario idéal: Edouard Philippe peut faire mariner son monde, garder Matignon le plus longtemps possible dans un contexte désormais défavorable au cumul. "La règle qu’il a édictée, c’était pour lui en fait", a même soupiré un ministre auprès du Monde

Non seulement Edouard Philippe ne se cache pas mais visiblement autour de lui, on voit clair dans son jeu. 

Robin Verner