Interdiction du voile aux mineurs de moins de 15 ans: Gabriel Attal a-t-il vraiment changé d'avis?

Gabriel Attal à l'Assemblée nationale le 6 mai 2025 - Bertrand GUAY / AFP
Plutôt discret ces derniers temps, Gabriel Attal remonte au front. À quelques heures de la publication d'un rapport consacré aux Frères musulmans qui fait état d'une "menace pour la cohésion nationale", l'ex-Premier ministre a proposé ce mardi 20 mai d'interdire le voile dans l'espace public pour les mineurs de moins de 15 ans.
La mesure a agacé le président du Rassemblement national Jordan Bardella. "Tenter désespérément de faire parler de soi et d'exister vaut bien quelques revirements à 180 degrés", a jugé dans la foulée Jordan Bardella sur le réseau social X en partageant la vidéo d'une émission d 22 avril 2022, en pleine campagne présidentielle.
"Si Marine Le Pen est élue, sa priorité, ce n'est pas les valeurs de la République qui seront défendues", lançait alors sur le plateau de télévision Gabriel Attal alors porte-parole du gouvernement.
"Parce que sa priorité, c'est de demander aux policiers de courser les femmes qui portent le voile pour leur retirer ou les verbaliser", continuait-il encore.
Le voile pour des fillettes, "pas une décision libre et éclairée"
En 2021, en plein examen de projet de loi contre les séparatismes, le RN proposait l'interdiction dans "l'espace public des signes ou des tenues constituants une affirmation sans équivoque et ostentatoires" des "idéologies islamistes". C'est sur cette mesure que le macroniste attaquait alors Jordan Bardella.
Mais la séquence télévisuelle ne portait pas spécifiquement sur l'interdiction du voile aux jeunes femmes mineures mais sur son port dans l'ensemble de la société. Interpellé à l'Assemblée nationale, celui qui est devenu président de Renaissance à l'automne après son départ de Matignon, s'est d'ailleurs défendu de tout revirement.
"Une femme qui décide de porter librement le voile, c'est sa décision", a insisté Gabriel Attal ce mercredi après-midi, assurant ne pas "mélanger l'islam compatible avec les valeurs de la République et l'islamisme".
"Mais quelle est la liberté d'une fillette qui le porte à 5 ou 6 ans? On ne va quand même pas dire qu'elle a pris cette décision de façon libre et éclairée", a encore expliqué l'ancien Premier ministre.
Un phénomène "présent sur le territoire"
Dans ce rapport qui explique comment l'islamisme tente de s'infiltrer à "bas bruit" par les associations sportives ou culturels, on peut lire que la "présence de fillettes voilées" a été relevée notamment dans un centre de loisirs de la Nièvre.
Sans "être un phénomène endémique, le phénomène de voilement des mineures parfois de 5-6 ans apparaît désormais bien présent sur le territoire français".
À l'instant T, aucune limite d'âge n'est fixée pour porter le voile dans l'espace public en France. Mais depuis la loi de 2004, "le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit" dans "les écoles, les collèges et les lycées publics".
Un cadre légal en partie déjà existant
Quand il était ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal avait fait entériner à la rentrée 2023 l'interdiction des abayas, ces longues et amples robes assimilée à une tenue traditionnelle de la religion musulmane.
À l'annonce du rapport sur les Frères musulmans, le député des Hauts-de-Seine a également proposé la création d'un délit de contrainte du port du voile contre les parents qui forceraient leur fille.
La mesure existe cependant depuis 2010. Le code pénal indique que "toute personne imposant" à une "autre personne de dissimuler leur visage par menace, violence, contrainte, abus d'autorité ou abus de pouvoir, en raison de leur sexe, est puni d'un an d'emprisonnement et de 30.000 € d'amende.
"Lorsque le fait est commis au préjudice d'un mineur, les peines sont portées à deux ans d'emprisonnement et à 60.000 € d'amende", précise encore la loi.