Ministres "d'expérience", "hors des partis"... Bayrou tient-il ses promesses avec son gouvernement?

Les nouveaux ministres du gouvernement de François Bayrou - AFP
"Très fier". C'est par ces quelques mots sur son compte X que François Bayrou a décrit la nomination de son gouvernement. Ces derniers jours, le Premier ministre avait esquisser la tonalité qu'il souhaitait donner à ses troupes ministériels? Y-est-il parvenu? Éléments de réponse.
• "Des hommes et des femmes d'expérience": oui
Lors de son passage sur France 2 la semaine dernière, le chef du gouvernement avait promis d'appeler à ses côtés "des hommes et des femmes d'expérience". Avec un but: s'entourer de personnalités fortes à même de défendre François Bayrou à l'Assemblée et dans les médias dans un contexte politique particulièrement compliquée.
La promesse semble tenue avec la nomination de deux ex Premiers ministres - une première dans l'histoire de la Ve République. Manuel Valls (Outre-mer) et Élisabeth Borne (Éducation nationale) font ainsi leur retour sur la feuille de match. Gérald Darmanin, qui a fait une pause ministérielle après 7 ans passé au gouvernement, revient également au poste de garde des Sceaux.
Plusieurs piliers gouvernementaux sont également maintenus à l'instar de Rachida Dati (Culture) et Sébastien Lecornu (Armées), présent dans les allées ministérielles depuis 2017. Quasiment tous les ministres et secrétaires d'État ont déjà détenu un mandat parlementaire.
• "Des équilbres nouveaux": plutôt non
François Bayrou s'est fendu d'un courrier aux ministres démissionnaires ce lundi soir en amont de la nomination de son gouvernement. Il a assuré auprès des troupes de Michel Barnier s'être efforcé de "trouver des équilibres nouveaux".
La formule cherche à montrer que le patron du Modem est parvenu à élargir la liste de ses soutiens, une condition essentielle pour éviter toute censure à l'Assemblée nationale dans un contexte d'absence de majorité.
Le défi n'est pas vraiment relevé. Si François Bayrou a besoin à tout prix du soutien de la gauche, il n'a pas réussi à décrocher un seul ministre député socialiste, écologiste ou communiste. Manuel Valls, ex Premier ministre de François Hollande, fait certes bien son entrée mais il est en rupture de banc avec les socialistes depuis des années.
Même topo pour François Rebsamen qui entre lui aussi au gouvernement, après avoir déjà été ministre sous François Hollande mais qui avait déjà rallié Emmanuel Macron dès 2022 ou encore pour Juliette Méadel, un temps secrétaire d'État chargé de l'aide aux victimes en 2016 et 2017, qui a appelé à voter pour le chef de l'État dès 2017.
Ces nominations font même figure d'épouvantail pour Olivier Faure, le premier secrétaire du PS qui a dénoncé le retour des "morts-vivants" sur BFMTV.
Quant aux LR qui ont fait monter les enchères ces derniers jours pour rentrer au gouvernement, leur nombre a fondu au gouvernement, passant de 12 à 7. Si Bruno Retailleau reste bien en poste à l'Intérieur tout comme Annie Genevard, seule Véronique Louwagie (Commerce) fait son entrée au gouvernement.
Horizons, le mouvement d'Édouard Philippe qui ne soutient que du bout des lèvres François Bayrou, peut se targuer lui de décrocher un poste pour Laurent Marcangeli, le président des députés Horizons, désormais en charge de la Fonction publique. De quoi s'assurer au moins que l'ex Premier ministre ne le critiquera pas publiquement mais sans non plus élargir son socle à l'Assemblée.
Quant à Renaissance, François Bayrou s'est probablement là encore acheté le calme des troupes. Gérald Darmanin fait son retour au gouvernement tout comme Élisabeth Borne, contentant ainsi l'aile gauche et l'aile droite à l'Assemblée de Renaissance. Seul problème pour le Premier ministre: Gabriel Attal n'a placé aucun de ses proches.
Quant aux Liot, ce petit groupe de 23 députés hétéroclites, dont l'arrivée au gouvernement aurait pu permettre à François Bayrou de se targuer d'avoir élargi sa majorité, ils ne sont finalement pas présents au casting.
• Des personnes "hors des partis": trois exceptions
En août dernier, s'imaginant déjà à Matignon, François Bayrou invitait, dans les colonnes du Figaro, Emmanuel Macron à sortir de nominations liées aux partis politiques qui "ne peut conduire qu'à des impasses".
Là encore, la liste des nouveaux ministres est loin d'être apolitique. La plupart d'entre eux ont même des fonctions exécutives dans leurs mouvements à l'instar d'Annie Genevard (Agriculture), vice-présidente déléguée des LR, Jean-Noël Barrot (Affaires étrangères), numéro 2 du Modem ou encore Élisabeth Borne (Éducation nationale), désormais bras droit de Gabriel Attal à Renaissance.
Seules exceptions: le directeur général de la Caisse des dépôts, Éric Lombard, nommé ministre de l’Economie et des Finances et le désormais ex président du Centre national d'études spatiales Philippe Baptiste, nommé ministre délégué chargé de l'Enseignement supérieur. Il est certes passé par le cabinet d'Édouard Philippe mais n'a jamais été candidat à une élection.
La nouvelle ministre des Sports, Marie Barsacq, ancienne dirigeante du comité olymique de Paris 2024, n'avait pas non plus d'engagement politique avant son entrée au gouvernement.