"L'heure de vérité": François Bayrou déclenche son premier 49.3 pour faire adopter sans vote le budget de l'État

Le Premier ministre vient de faire adopter le projet de loi de finances à l'Assemblée nationale sans le vote des députés ce 3 février. François Bayrou affrontera mercredi une motion de censure qui n'a que peu de chances d'être adoptée. Si elle est rejetée, le budget de l'État sera alors adopté.

Le tout premier d'une longue série. Pour la première fois depuis son arrivée à Matignon en décembre, François Bayrou a activé ce lundi 3 février la cartouche du 49.3 sur le budget de l'État.

"Nous voici à l'heure, la semaine de vérité et de responsabilité. Aucun pays ne peut vivre dans budget. Pour la première fois depuis la fondation de la Ve République, notre pays est toujours sans budget. L'image de la France en sera affectée", a-t-il assuré.

Cet article de la Constitution, qui offre la possibilité de faire adopter un texte sans vote des députés, permet au Premier ministre de passer une étape décisive. Depuis la chute de Michel Barnier, le pays était sans budget, une première dans toute l'histoire de la Ve République.

Une motion de censure mercredi

Une loi spéciale avait ensuite été votée, permettant à l'État d'assurer la levée de l'impôt et de continuer à faire tourner les services publics. Mais ces derniers jours, plusieurs secteurs avaient fait part de leurs inquiétudes, comme au sein du monde associatif avec la suspension des contrats de service civique depuis le 1er février ou le secteur du logement.

Mais le locataire de Matignon doit encore attendre avant de souffler. Le centriste doit désormais affronter une motion de censure ce mercredi, comme le permet la Constitution, une fois l'article 49.3 utilisé. Pour l'instant, ce texte qui sera déposé par La France insoumise n'a guère de chance d'être adopté.

Pour ce faire, la motion de censure doit récolter 288 voix. La France insoumise sera soutenue dans son geste par les écologistes et les communistes, soit 126 députés. Mais les socialistes ont décidé en bureau national ce lundi après-midi de ne pas suivre leurs partenaires de gauche. Exit donc leurs 66 voix même si une poignée d'élus PS pourraient bien voter la motion de censure.

Le RN, très en retrait

Quant au Rassemblement national, il réserve sa réponse et se décidera mercredi lors d'une réunion de groupe. Pour l'instant, le patron du mouvement Jordan Bardella entretient le flou, rendant peu probable que les députés de Marine Le Pen soutiennent cette motion de censure.

Si la motion de censure est rejetée, le budget 2025 sera considéré comme adopté. Charge ensuite au Premier ministre de s'atteler au budget de la sécurité sociale qui avait fait chuter Michel Barnier.

François Bayrou va dégainer en fin de journée un second 49.3 sur la première partie du projet de loi de finances de la sécurité sociale avant de les enchaîner mercredi et vendredi sur le second volet, pour les recettes puis les dépenses.

Bayrou probablement renforcé

À chaque fois, François Bayrou va devoir affronter une motion de censure dans la foulée. Concrètement, en l'espace de quelques jours, le Premier ministre devrait utiliser quatre fois le 49.3 et affronter au moins autant de motions de censure. Mais s'il parvient à faire adopter les budgets sans tomber, le centriste en ressortira considérablement renforcé.

Dernier obstacle sur sa route dans les prochaines semaines: une motion de censure des socialistes "au nom des valeurs" après les propos du chef du gouvernement sur "la submersion migratoire". Si toute la gauche devrait la voter, le RN ne devrait pas suivre. De quoi imaginer que François Bayrou reste au moins encore quelques mois à Matignon.

Marie-Pierre Bourgeois