1962, cette seule fois où une motion de censure a fait tomber un gouvernement

L'hémicycle de l'Assemblée nationale, le 26 novembre 2024. - Bertrand Guay
Un cas unique, mais plus pour longtemps? Le gouvernement de Michel Barnier est ce lundi 2 décembre plus que jamais sous la menace d'une censure, brandie par le Rassemblement national (RN) et la gauche s'il active le 49.3 sur le budget de la Sécu. Jusqu'à présent une seule motion de censure a été adoptée dans l'histoire de la Ve République, en 1962.
À l'époque, Charles de Gaulle, alors président de la République, connaît une forte crise politique, au sortir de la guerre d'Algérie. Après avoir fait l'objet d'une tentative d'assassinat, lors de l'attentat du Petit-Clamart, le chef de l'État décide d'agir.
Pour gagner en légitimité politique, il annonce le 30 septembre 1962 un référendum pour soumettre aux Français une importante réforme de la Constitution: qu'ils élisent le président au suffrage universel direct et non plus de façon indirecte par un collège de grands électeurs, qui comprend les députés et les sénateurs.
Les parlementaires ne cachent pas leur mécontentement vis-à-vis de cette réforme qui affaiblit le pouvoir législatif. Ils déplorent également que le président préfère passer par un référendum plutôt que par l'article 89 de la Constitution, qui prévoit le vote des deux assemblées avant que le texte fondateur de la Ve République ne soit révisé.
Les parlementaires renversent Pompidou
Les députés et les sénateurs décident alors de déposer, de leur propre initiative, une motion de censure contre le gouvernement Pompidou, en activant l'article 49.2 de la Constitution, le 4 octobre 1962. Elle est adoptée le lendemain à 280 voix pour sur 480.

Pour autant, la victoire des élus est de courte durée. Si Georges Pompidou présente sa démission à Charles de Gaulle 24 heures plus tard, le président ne l'accepte que formellement et l'exécutif reste en place.
Au tour du chef de l'État de réagir puisqu'il dissout l'Assemblée nationale. Après la victoire du oui au référendum sur la Constitution (62,2% contre 37,8% de non) le 28 octobre, les parlementaires connaissent un nouvel échec lors des législatives anticipées le 25 novembre, puisque les gaullistes, seuls à ne pas avoir voté la motion de censure, arrivent en tête avec 40% des voix.
Une motion finalement en échec
Après avoir démissionné, Georges Pompidou est finalement renommé par le président au poste qu'il venait de quitter. La motion de censure de 1962, si elle a été adoptée, n'aura finalement pas atteint son objectif, puisque le Premier ministre est resté en place.
Depuis cet épisode, aucune motion de censure n'a été adoptée sous la Ve République. Pour autant, plusieurs fois les députés ont tenté de renverser le gouvernement en place, mais sans jamais que le nombre de voix suffisant ne soit atteint.
Au total, 56 motions de censure spontanées ont été lancées contre des Premiers ministres, depuis Georges Pompidou, dont 3 contre Gabriel Attal et 3 contre Élisabeth Borne, selon le décompte de l'Assemblée.
Le gouvernement Barnier est désormais en sursis. S'il tombe, il deviendrait alors le plus court de l'histoire de la Ve République.