"Un jour très sombre", "la justice est la justice"... Les réactions politiques après la condamnation de Marine Le Pen

C'est une décision historique. Marine Le Pen a été condamnée ce lundi 31 mars à cinq ans d'inéligibilité et quatre ans d'emprisonnement dont deux ferme. Le tribunal correctionnel de Paris a mis à exécution la "mort politique" tant redoutée par la députée du Pas-de-Calais, qui ne pourrait sur le papier pas se présenter une quatrième fois à la course à l'Élysée dans deux ans. Cet événement inouï fait réagir de toute part de l'échiquier politique, et même au-delà de nos frontières.
Dans son propre camp, Jordan Bardella, qui pourrait être le candidat du RN pour 2027, a estimé que "la démocratie française est exécutée". Pour Marion Maréchal, nièce de Marine Le Pen, la "seule culpabilité" de sa tante est qu'elle "menait notre camp sur le chemin de la victoire".
"Des juges se pensant au-dessus du peuple souverain, ont décidé d'exécuter dans un tribunal, celle qu'ils n'ont jamais pu faire reculer dans les urnes", a-t-elle également critiqué.
"Pas sain" pour la droite
À droite, cette décision est lourdement critiquée. "Il n'est pas sain que dans une démocratie, une élue soit interdite de se présenter à une élection", a déploré Laurent Wauquiez sur BFMTV. "Ce n'est pas le chemin qu'il aurait fallu prendre", a jugé le patron de la droite à l'Assemblée.
"La France est-elle encore une démocratie?", s'est interrogé de son côté Éric Ciotti.
"Le destin démocratique de notre nation confisqué par une cabale judiciaire indigne (...) ce n'est pas un simple dysfonctionnement, c'est un système de captation du pouvoir qui écarte systématiquement tout candidat trop à droite en mesure de gagner", a ajouté l'ancien président des Républicains.
L'eurodéputé François-Xavier Bellamy a déploré sur X "un jour très sombre pour la démocratie française".
La France insoumise à rebours du reste de la gauche
"Y a des semaines qui commencent bien", a écrit de son côté Philippe Poutou, porte-parole du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), sur le même réseau social, estimant que "pour une fois, la justice est bien faite".
Pour Marine Tondelier, cheffe de file des Écologistes, Marine Le Pen "doit payer sa peine" car elle est une "justiciable comme les autres". "Quand on donne des leçons d'exemplarité à tout le monde, on doit commencer par se l'appliquer à soi-même", a-t-elle ainsi déclaré.
Même son de cloche du côté des communistes, avec Fabien Roussel qui a affirmé que "la justice est la justice. 'Selon que vous serez puissant ou misérable' comme écrivait La Fontaine, elle doit être la même pour tous. D'autant que Mme Le Pen est une responsable politique qui exige plus de fermeté de la part de la justice".
Toutefois, toute la gauche n'est pas unanime sur la question. Sur X, Jean-Luc Mélenchon a estimé que "la décision de destituer un élu devrait revenir au peuple". Le parti de La France insoumise a dit dans un communiqué "refuser par principe que le recours soit impossible pour un justiciable quel qu'il soit", affirmant n'avoir "jamais eu comme moyen d'action d'utiliser un tribunal pour se débarrasser du Rassemblement national".
Dans un communiqué, le Parti socialiste a appelé "chacune et chacun à respecter l'indépendance de la justice et l'État de droit".
François Bayrou a été "troublé par le jugement"
Du côté du bloc central, François Bayrou a été "troublé par le jugement" prononcé à l'encontre de Marine Le Pen, confie l'entourage du Premier ministre, d'après une information du Parisien confirmée par BFMTV.
Le Premier ministre a lui-même été jugé pour un système de fraude visant à rémunérer des assistants parlementaires européens, suspectés de travailler en réalité pour le Modem. Il a finalement été relaxé en février 2024. Le parquet a depuis fait appel.
Prisca Thevenot a voulu rappeler que les élus sont "des citoyens comme les autres". "Le RN plaide en permanence pour des peines fermes (…) Je ne vois pas pourquoi Marine Le Pen serait au-dessus ou à côté du droit", a affirmé depuis l'Assemblée nationale la députée des Hauts-de-Seine.
L'extrême droite européenne s'insurge
De nombreuses voix se sont également élevées ce lundi au sein de l'extrême droite européenne pour dénoncer la condamnation de Marine Le Pen.
"Je suis Marine!", a lancé dans un cri de ralliement sur X son allié hongrois Viktor Orban.
Pour le Premier ministre nationaliste, elle rejoint les rangs des "patriotes" victimes selon lui d'une cabale, à l'instar du président américain Donald Trump ou de l'Italien Matteo Salvini.
Ce dernier, qui a eu lui-même maille à partir avec la justice de son pays, a également apporté son soutien à Marine Le Pen. "Ne nous laissons pas intimider, ne nous arrêtons pas: en avant toute, mon amie!", a-t-il écrit, accompagné d'une photo avec la députée française.
Il a dénoncé la "déclaration de guerre de Bruxelles", aux sources selon lui de la condamnation de Marine Le Pen, accusée d'avoir fait prendre en charge par le Parlement européen des personnes qui travaillaient en réalité pour le RN.
"Ils n'arriveront pas à faire taire la voix du peuple français", a averti le leader du parti espagnol Vox Santiago Abascal. Aux Pays-Bas, le chef du parti d'extrême droite à la tête de la coalition, Geert Wilders, s'est dit "choqué" par un jugement "incroyablement sévère".
Un peu plus à l'est, le Kremlin a également déploré une "violation des normes démocratiques". "Nos observations de ce qui se passe dans les capitales européennes montrent qu'on ne se gêne pas du tout là-bas pour dépasser le cadre de la démocratie lors d'un processus politique", a réagi son porte-parole, Dmitri Peskov.