"Il y a tout à refaire": après la présidentielle, LR tente de limiter la casse aux législatives

Le président des Républicains Christian Jacob à l'issue d'une conférence de presse samedi 7 mai - Geoffroy VAN DER HASSELT / AFP
Dans la lignée de la présidentielle, la déconvenue s'annonçait cinglante - elle ne le sera peut-être pas autant que prévu. Avec de 50 à 65 sièges envisagés selon notre estimation Elabe pour BFMTV-RMC et L'Express avec SFR, Les Républicains pourraient voir leur groupe à l'Assemblée nationale être divisé par deux par rapport à 2017, qui avait déjà constitué un camouflet.
LR subira-t-il cette année le même sort que le PS en 2017? Il y a cinq ans, les socialistes étaient passés d'un groupe de 295 membres à seulement 28, à la faveur de l'arrivée d'Emmanuel Macron à l'Élysée et de son affichage "ni de droite, ni de gauche". De nombreuses personnalités socialistes, comme Gérard Collomb ou Christophe Castaner, avaient quitté la gauche pour rallier l'ancien ministre de l'Économie de François Hollande.
Défections à droite
Si LR termine l'actuelle législature avec 100 sièges dont huit apparentés, le parti avait déjà perdu des plumes en 2017: 196 députés faisaient précédemment partie du groupe, dont 11 apparentés. LR doit aussi faire face aux récents départs vers la macronie, comme celui de l'ancien ministre sarkozyste Éric Woerth, ou encore de Damien Abad, ex-président du groupe LR devenu ministre des Solidarités, par ailleurs accusé de viol par deux femmes. Catherine Vautrin, un temps pressentie pour Matignon, ou encore la maire de Calais Natacha Bouchart ont elles aussi aussi rejoint Emmanuel Macron.
"Il n'y en a que quatre qui sont partis", minimisait la vice-présidente LR Agnès Evren, jointe par BFMTV.com quelques jours avant le premier tour. "Il n'y a qu'Abad qui est parti après la présidentielle", ajoutait la présidente de la fédération de Paris, aussi députée européenne.
En 2017, Emmanuel Macron avait déjà été rallié par Gérald Darmanin et Bruno Le Maire, reconduits au gouvernement, mais aussi par Thierry Solère et Édouard Philippe, qui a occupé Matignon jusqu'en 2020.
Un maillot "abîmé" après la déroute Pécresse
Quelques jours avant le premier tour des législatives, les projections réalisées par les instituts de sondage n'étaient déjà pas en faveur de LR. Si l'obtention de la majorité absolue pour LaREM restait incertaine, le nombre de sièges gagnables par LR oscillait entre 40 et 60, comme le pointait un sondage d'Elabe pour BFMTV paru ce vendredi.
"Par rapport au désastre électoral de Valérie Pécresse, ce n'est pas aussi pire qu'ils auraient pu attendre", analyse le politologue Bruno Cautrès, chercheur CNRS au Cevipof.
Au premier tour de la présidentielle, la présidente de la région Île-de-France n'a récolté que 4,78% des voix, une débâcle historique pour le parti. "Ils n'ont pas de dynamique de campagne", estimait dans les derniers jours de la campagne Jean-Baptiste Moreau, député LaREM de la Creuse et candidat à sa réélection, qui observe une séquence électorale "pas simple, avec leur candidate qui a fait un score à ras les pâquerettes".
"Le maillot qu'on porte est abîmé", reconnaît Agnès Evren, se disant "lucide". Emmanuel Macron "nous a siphonné à la présidentielle", ajoute-t-elle. Et d'insister:
"Il y a tout à refaire du sol au plafond, on a la responsabilité de rebâtir notre famille politique."
"C'est le même programme"
"Macron a bouffé LR: c'est le même programme", tacle Aurélien Taché, député du Val-d'Oise élu en 2017 sous l'étiquette En Marche, passé dans l'opposition et candidat à sa réélection sous l'étiquette Nupes, celle de l'union de la gauche. L'ancien macroniste, aux premières loges il y a cinq ans, qui juge qu'"il refait exactement le même coup qu'il a fait au PS en 2017".
Pendant la campagne présidentielle, Valérie Pécresse avait d'ailleurs fustigé le programme d'Emmanuel Macron, évoquant des "contrefaçons".
"Emmanuel Macron reste dans le déni sur l'autorité, le pouvoir d'achat et la dette. Sur le reste: beaucoup de contrefaçons!", avait-elle lancé.
Pour Bruno Cautrès, le chef de l'État a cette fois-ci "dynamité la droite, en partie parce que sur l'économie, il a incarné l'idée d'une France qui doit se moderniser". Mais pour Jean-Baptiste Moreau, également porte-parole de Renaissance (ex-LaREM), Emmanuel Macron n'est pas à l'origine de l'effondrement du PS en 2017, ni de la déroute de LR.
"Ils n'ont pas proposé d'alternative crédible depuis 2017", juge le parlementaire quant à LR. Selon lui, le président "a juste été le révélateur de l'incurie des partis traditionnels", qui "se sont dynamités, fait sauter tous seuls".
L'absence de majorité "peut remettre LR au centre du jeu"
Néanmoins, Bruno Cautrès attendait de voir la carte électorale complète, pour savoir si LR tiendrait bon dans ses bastions historiques, et si Ensemble obtiendrait la majorité absolue, fixée à 289 sièges - Elabe projette de 260 à 295 sièges. En deçà, "ça peut remettre LR au centre du jeu", juge-t-il, et placer LR dans une configuration différente que le PS en 2017.
"Dans quinze jours, on créera la surprise", avançait Christian Jacob mardi, résolument optimiste à quelques jours du premier tour.
"La droite, héritière d'un parti gaulliste qui a donné cinq présidents à la France, ne peut pas disparaître", tranchait aussi Agnès Evren.
En 2017, le PS n'avait pas totalement disparu mais, en grande difficulté financière, avait dû se résoudre à vendre le siège historique de la rue de Solférino, dans le VIIe arrondissement de Paris, pour s'établir à Ivry-sur-Seine. Il pourrait cette fois-ci reprendre quelques couleurs, à la faveur de son alliance au sein de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes), portée par LFI.