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Affaire Benalla: la commission d'enquête du Sénat reprend du service

Alexandre Benalla a été entendu le 19 septembre par la commission d'enquête du Sénat.

Alexandre Benalla a été entendu le 19 septembre par la commission d'enquête du Sénat. - Capture

La commission des Lois du Sénat, transformée en commission d'enquête, va reprendre ses auditions dans le cadre de l'affaire Benalla. Les ministres de l'Intérieur et des Affaires étrangères ainsi que le directeur de cabinet du président de la République vont être interrogés ce mercredi.

L'"affaire d'été", comme la qualifiait le principal intéressé, a passé l'hiver et rebondit en ce mois de janvier. Réunis en commission d'enquête pour faire la lumière sur l'affaire Benalla, les membres de la commission des Lois du Sénat reprennent du service ce mercredi avec de nouvelles auditions, et iront jusqu'au bout de son mandat. Les ministres de l'Intérieur et des Affaires étrangères, Christophe Castaner et Jean-Yves Le Drian, et le directeur du cabinet du président de la République, Patrick Sztroda, vont être interrogés à partir de 15 heures.

Depuis le 23 juillet, la commission des Lois du Sénat enquête sur les violences filmées commises par Alexandre Benalla, alors chargé de mission à l'Elysée, lors de la manifestation du 1er mai. Entre cette date et le mois d'octobre, les sénateurs ont procédé à 28 auditions. Mais alors que les membres, dont les prérogatives d'enquête prendront fin le 24 janvier, devaient rendre leurs conclusions, les nouvelles révélations dans cette affaire, ouvrant un autre front judiciaire et médiatique, ont conduit à la reprise des auditions.

"Deux questions rendent indispensables des explications complémentaires: M. Benalla a-t-il menti sous serment devant une commission d'enquête parlementaire, ce qui entraînerait des conséquences judiciaires? L'État a-t-il fait les diligences nécessaires pour retirer les passeports diplomatiques de l'intéressé, conséquence de la sanction de licenciement qui lui a été infligée, et pour empêcher un franchissement de la frontière française avec ces documents?", s'interrogeait au début du mois dans Le Figaro Philippe Bas, le président LR de la commission des Lois au Sénat.

L'utilisation des passeports diplomatiques en question

Le 24 décembre, le quotidien Le Monde révélait qu'Alexandre Benalla avait voyagé au Tchad quelques jours avant la venue du président de la République. Si chacun des deux clans a démenti que l'ancien chargé de mission entretenait encore des liens avec l'Elysée, la question est de savoir si l'ancien collaborateur de la présidence a conservé et utilisé pour des voyages d'affaires en Afrique au moins l'un de ses passeports diplomatiques après son éviction du palais présidentiel. 

Réclamés fin juillet par le Quai d'Orsay, les passeports d'Alexandre Benalla n’ont pas été retrouvés par les enquêteurs lors de la perquisition menée dans le palais présidentiel le 25 juillet. Pourtant, lors de sa première audition devant la commission des Lois au Sénat, requalifiée en commission d’enquête, Alexandre Benalla a déclaré le 19 septembre: "Est-ce qu’ils ont été rendus? Ils sont au bureau que j’occupais à l’Elysée, donc je pense que l’Elysée a dû s’en occuper". Le principal intéressé dit désormais les avoir récupérés en octobre dernier.

"On se demande pourquoi M. Benalla les a utilisés puisqu'il savait déjà qu'il ne travaillait plus à l'Elysée. Nous, ils nous avaient dit le 19 septembre qu'il n'avait plus ces passeports en sa possession. S'il a menti, il a menti sous serment. Il risque 5 ans de prison et 75.000 euros d'amende", s'indignait il y a quelques jours la sénatrice EELV Esther Benbassa. 

De son côté, l'Elysée affirme avoir procédé depuis son licenciement à toutes les diligences pour récupérer les passeports et autres titres de l'intéressé. Après ces révélations de presse, le palais présidentiel assure avoir diligenté une enquête interne et dément la remise des passeports diplomatiques à Alexandre Benalla par un membre du personnel de la présidence. Ce mercredi, Le Canard enchaîné révèle l'existence d'un quatrième passeport, de service, qui n'aurait pas été réclamé par l'Elysée mais aurait été très récemment remis par l'avocate d'Alexandre Benalla au ministère de l'Intérieur. Mais aussi d'un téléphone classé secret-défense d'une valeur de 2.500 euros conçu par Thalès. D'après le quotidien, l'appareil a été restitué le 11 janvier par l'avocate. 

Enquête judiciaire en cours

Pour tenter d'éclaircir les conditions de détention et d'utilisation des passeports diplomatiques d'Alexandre Benalla, la commission d'enquête du Sénat va donc auditionner Christophe Castaner. Le désormais ministre de l'intérieur avait déjà été interrogé par les sénateurs - tout comme le directeur de cabinet de la présidence Patrick Sztroda - mais dans le cadre de ses fonctions de délégué général du parti présidentiel de La République en Marche. Le ministre des Affaires étrangères devrait répondre aux interrogations sur la remise ou non des documents diplomatiques à ses services.

Comme lors de la première salve d'auditions, les sénateurs vont veiller à ne pas empiéter sur la procédure judiciaire en cours alors que le parquet de Paris a ouvert en décembre dernier une enquête préliminaire pour notamment "abus de confiance", après un signalement du Quai d'Orsay sur "la non restitution et l'usage" de passeports diplomatiques. Si ce dernier a remis ces documents aux enquêteurs le 9 janvier dernier, Alexandre Benalla, comme Vincent Crase - également mis en cause dans le volet des violences du 1er-Mai - va être réauditionné lundi prochain par les sénateurs. Ils pourraient tous deux être interrogés sur leurs éventuelles activités privées, notamment dans le domaine de la sécurité privée.

Justine Chevalier