"Le pouvoir appartient au peuple": c'est quoi ces manifestations "No Kings" organisées contre Donald Trump ce samedi?

Une manifestation "No Kings" contre Donald Trump à Los Angeles, le 14 juin 2025. - ETIENNE LAURENT / AFP
Grand artisan du cessez-le-feu à Gaza et de retour aux affaires en Europe pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine, Donald Trump sculpte son image de faiseur de paix. Pourtant, cette représentation du pacificateur à l'international ne colle pas vraiment avec la politique divisionniste qu'il mène d'une main de fer aux États-Unis.
Ce samedi 18 octobre, des millions d'Américains ont l'intention de manifester pacifiquement contre "les prises de pouvoir autoritaires" de l'administration Trump, écrit le Time. "Nous voulons rappeler au président et à ses facilitateurs que l’Amérique n’a pas de rois et que le pouvoir appartient au peuple", confie l'un des groupes organisateurs. D'où le nom "No Kings" ("pas de rois") donné à ce mouvement.
"Les Américains refusent. Ils manifestent contre les violences des attaques qu'ils subissent de la part de leur président, qui bafoue et piétine l'État de droit", constate Sébastien Roux, sociologue et directeur de recherche au CNRS, contacté par BFMTV. "Ils se soulèvent aussi face à la violence de la répression à l'encontre de la justice et des opposants", précise-t-il.
Politique migratoire contestée et licenciements massifs
Les revendications des manifestants sont nombreuses. Ils rejettent notamment la politique migratoire agressive de Donald Trump. Ces dernières semaines, la police de l'immigration américaine, l'ICE, a multiplié les expulsions d'immigrants illégaux, de manière souvent violente voire humiliante. Fidèle à ses promesses électorales, le président républicain a triplé le budget de cette police et lancé une vaste campagne de recrutement pour appuyer les 20.000 agents déjà actifs. Le tout dans le but de lutter contre l'immigration.
Dans la même lignée, le déploiement de la Garde nationale dans plusieurs villes américaines, à l'image de Los Angeles, n'a pas été du goût des manifestants, précise le Time. En août dernier, Donald Trump a autorisé les soldats à déambuler dans les rues de Washington pour lutter contre une hausse de la criminalité, pourtant démentie par la maire de la capitale fédérale, Muriel Bowser. Ces derniers jours, une décision de justice a aussi empêché l'arrivée de la Garde nationale à Chicago.
"Ils envoient la Garde nationale. Ils terrorisent nos amis et voisins migrants. Ils poursuivent en justice leurs opposants politiques", s'insurge Leah Greenberg, cofondatrice du collectif "Indivisible", citée par l'AFP.
Dernièrement, John Bolton, ex-conseiller à la sécurité nationale du président américain, a été inculpé pour avoir conservé et partagé illégalement des documents classifiés. Il est le troisième opposant politique à Donald Trump à être poursuivi par la justice.
"Les Américains risquent beaucoup en manifestant. Sans parler de prison, ils peuvent par exemple être inquiétés par leur employeur", commente Sébastien Roux.
Donald Trump cible aussi les gouvernements fédéraux. Le républicain, qui avait annoncé le licenciement de 4.000 fonctionnaires fédéraux travaillant dans sept ministères, a finalement vu sa décision annulée par une juge fédérale ce mercredi 15 octobre.
Depuis son retour à la Maison Blanche, le 45e et 47e président des États-Unis ne cesse de procéder à des limogeages ou à des coupes budgétaires. Plusieurs agences scientifiques et environnementales ont été concernées par ces rabais, ce qui a longtemps inquiété experts et élus quant à l'avenir de la recherche, notamment en ce qui concerne le domaine de la santé.
"Cela peut prendre encore plus d'ampleur"
En juin dernier, de premières manifestations avaient secoué les États-Unis en réunissant cinq millions d'Américains environ. Le Time parle même "d'une des plus grandes manifestations organisées sur une journée dans l’histoire du pays". Les revendications rejoignaient déjà celles d'aujourd'hui: réagir contre "l'utilisation expansive du pouvoir présidentiel" par Donald Trump.
"Ces manifestations ont beaucoup surpris", pointe Sébastien Roux. "Les États-Unis avaient déjà connu ce genre de mouvements, mais pas de cette envergure", note le spécialiste. Ce climat de contestation est presque inédit depuis le début de la présidence Trump. Et "cela peut prendre encore plus d'ampleur", estime le sociologue et directeur de recherche au CNRS.
"Les États-Unis sont divisés à tous les niveaux. Tout est devenu politisé. Les médias, la justice...", explique ce spécialiste des USA.
Si Joe Biden incarnait l'ambition de réconcilier les États-Unis, ce n'est pas l'aspiration de Donald Trump. "Il veut accentuer les divisions pour essayer de faire passer ses visions des choses", analyse Sébastien Roux. D'ailleurs, les manifestants sont considérés comme "des ennemis de l'intérieur", poursuit le sociologue.
Au total, ce sont plus de 2.600 rassemblements qui seront répartis à travers de nombreuses grandes villes du pays, telles que Washington, Boston, New York, San Francisco, Chicago ou encore Atlanta. Pour l'heure, "personne ne sait si ces manifestations vont affaiblir ou renforcer" l'image du clivant président Donald Trump, conclut Sébastien Roux.