Covid-19: peut-on éviter un reconfinement? Ce que disent les chiffres de l'état de l'épidémie

Longtemps discutée, longtemps crainte, la perspective d'un reconfinement semble s'éloigner pour la France - en tout cas à court terme. Depuis quelques jours, Emmanuel Macron et les membres de l'exécutif multiplient les prises de paroles au cours desquelles ils insistent sur la nécessité de tout faire pour éviter un tel scénario. Le reconfinement est vu comme "une mesure d'ultime recours", a résumé mercredi Gabriel Attal, le porte-parole du gouvernement, lors de son point presse à l'issue du Conseil des ministres.
Si, contrairement à plusieurs pays voisins, l'Hexagone n'a pas été remis sous cloche, c'est parce que l'épidémie de Covid-19 ne s'affole pas, pour l'heure, autant qu'à l'automne dernier, justifie le gouvernement. L'exécutif y voit le résultat des différentes mesures prises depuis plusieurs semaines, comme le couvre-feu avancé à 18h.
"Nous sommes toujours sur ce plateau haut dont nous parlons depuis plusieurs semaines qui commence à être légèrement décroissant, je crois que c’est une diminution d’incidence de 2% sur la semaine passée. (...) Nous comptons une cinquantaine de départements avec une baisse importante de l’incidence, une trentaine où celle-ci est stable, et un peu plus d’une vingtaine où l’incidence continue à augmenter", a détaillé Gabriel Attal.
Une baisse des cas sur les 7 derniers jours
Depuis le début du mois de février, le nombre moyen de cas rapportés au quotidien en France est élevé mais stable. Il oscille entre 19.200 et 20.700, loin cependant du chiffre de 40.000, atteint au moment du deuxième confinement, comme vous pouvez le constater sur nos infographies.
Le nombre de cas de Covid-19 sur les 7 derniers jours, par rapport aux 7 jours précédents, a effectivement baissé dans la majorité des départements français, comme le résume une carte du site CovidTracker, s'appuyant sur les données les plus récentes publiées mercredi par Santé publique France. Plus il y a du rouge, plus le taux d'incidence a augmenté dans les départements concernés. Et inversement, plus il y a de vert, plus il a diminué.

À l'exception de quelques départements de France métropolitaine, comme le Lot-et-Garonne, les Côtes-d'Armor, l'Ille-et-Vilaine, l'Eure-et-Loir, le Pas-de-Calais, la Haute-Corse et la Seine-Saint-Denis, où est constatée une augmentation des cas comprise entre 10% et 20% sur la période, le reste du pays connaît une apparente accalmie. On note par exemple une baisse de 38,11% dans les Landes, de 37,04% dans les Pyrénées-Atlantiques, de 28% dans les Pyrénées-Orientales, de 27% dans la Nièvre ou encore de 25% dans le Finistère.
Une pression toujours très forte à l'hôpital
Les indicateurs sont cependant plus contrastés pour les hospitalisations et les réanimations où, selon les départements, les chiffres baissent plus légèrement, stagnent, voire connaissent une forte augmentation sur les 7 derniers jours. Au niveau national, les hôpitaux accueillent désormais 27.417 malades du Covid-19, parmi lesquels 3309 dans un service de réanimation. Ce nombre avait atteint 7000 lors de la première vague au printemps et 4900 lors de la deuxième vague à l'automne.
Certaines régions sont particulièrement surveillées,notamment celle de Provence-Alpes-Côte-d'Azur (PACA), où le taux d'occupation des lits de réanimation par des patients Covid, atteint 91%, selon l'Agence régionale de santé, contre 66% au niveau national.
"Le gouvernement prend un risque colossal"
Si les données peuvent sembler encourageantes à court terme, la progression des variants est plus inquiétante et pourrait contraindre le gouvernement à reconfiner le pays. Les chiffres pourraient être fortement impactés en mars, souligne ce jeudi matin le professeur Christophe Rapp, infectiologue à l'hôpital américain de Paris et consultant santé de BFMTV, sur notre antenne.
"On peut constater que les mesures restrictives ont une certaine efficacité. Elles ralentissent la diffusion de l'épidémie. Mais il y a deux épidémies dans l'épidémie. La deuxième est celle des variants. Ils sont en train de progresser très vite. La vérité, on va la connaître après les vacances d'hiver, début mars, notamment si on ouvre les écoles. La contagiosité des variants pourrait réaccélérer l'épidémie", a-t-il expliqué.
Dans les hôpitaux, "nous n'avons pas de réserves", s'est aussi alarmé sur notre antenne Gilles Pialoux ce mercredi. Le chef de service des maladies infectieuses et tropicales à l'hôpital Tenon à Paris fait état d'une "situation alarmante" et d'"une poussée incroyable" du variant anglais en Île-de-France, qui représente plus de 37% des cas désormais selon une étude.
Les variants inquiètent également l'urgentiste Enrique Casalino, interrogé ce jeudi par Le Parisien. Il évoque un "phénomène impossible à arrêter". Pour lui, en misant sur le respect des règles actuelles par les Français, "le gouvernement prend un risque colossal. Si l'épidémie se met à flamber, avec 3300 lits de réa déjà occupés, en sept à dix jours, on est morts."
Invitée de BFMTV, la médecin généraliste Tura Milo estime que la France se trouve donc "juste au milieu" et que les chiffres actuels ne permettent pas de prédire l'évolution de l'épidémie.
"On ne sait pas s'il faut voir le verre à moitié vide ou à moitié plein. Il faut attendre encore deux, trois semaines pour voir les chiffres, savoir si l'on est vraiment en baisse", a-t-elle expliqué ce jeudi sur notre plateau.
Si la plupart des indicateurs n'affolent donc pas le gouvernement, ils restent cependant à un haut niveau. En particulier le nombre de morts, qui dépasse quotidiennement les 300 décès depuis plusieurs semaines.