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Covid-19: avec des millions d'électeurs appelés à se déplacer, la présidentielle va-t-elle relancer l'épidémie?

Un homme portant un masque met son bulletin dans l'urne dans un bureau de vote du 5e arrondissement de Paris lors du second tour des élections municipales le 28 juin 2020

Un homme portant un masque met son bulletin dans l'urne dans un bureau de vote du 5e arrondissement de Paris lors du second tour des élections municipales le 28 juin 2020 - Christophe ARCHAMBAULT © 2019 AFP

Sur BFMTV, l'épidémiologiste Dominique Costagliola s'est dite inquiète pour "la sécurité des élections". Le gouvernement n'envisage pour l'instant pas d'imposer le masque dans les bureaux de vote.

Ce dimanche, 110.714 nouveaux cas positifs au Covid-19 ont été détectés dans l'Hexagone sur les dernières 24 heures, comme le rapporte Santé Publique France. Un nombre toujours important, qui intervient alors que la quasi-totalité des mesures de restriction ont été levées le 14 mars. Et qui illustre la dynamique à l'œuvre depuis début mars sur le front de l'épidémie en France: les nouveaux cas positifs quotidiens ont augmenté de presque 50%.

50 millions d'électeurs appelés à se déplacer

Ce constat intervient alors que les Français s'apprêtent, dans moins de deux semaines, à se déplacer par millions aux urnes pour prendre part au premier tour de l'élection présidentielle. Près de 50 millions d'entre eux sont appelés à voter les 10 et 24 avril. De quoi susciter l'inquiétude de Dominique Costagliola, épidémiologiste et directrice de recherche à l'Inserm.

"Le problème de la sécurité des élections va se poser. Elles se déroulent dans des termes différents qu'en mars 2020 (lors des élections municipales, NDLR), mais les personnes qui vont voter sont des personnes âgées et fragiles. Que va-t-on faire pour protéger leur sécurité? C'est un grand point d'interrogation", analyse sur BFMTV la spécialiste.

Car le 14 mars, la quasi-totalité des mesures de restriction ont été levées par le gouvernement, y compris le port du masque à l'intérieur. Selon le protocole actuel, son port ne sera donc pas obligatoire pour se rendre dans son bureau de vote et prendre part au scrutin.

Une situation moins favorable que lors des régionales de 2021?

Une situation qui diffère des élections régionales et départementales qui se sont déroulées les 20 et 27 juin 2021, durant lesquelles le protocole sanitaire était en vigueur. À cette même période, les données épidémiques étaient pourtant beaucoup plus favorables que celles que connaît actuellement la France. Durant la semaine du 13 juin 2021, soit deux semaines avant le premier jour, 3858 nouveaux cas positifs quotidiens étaient détectés en moyenne, selon Covid Tracker. Contre 110.714 actuellement.

Un paradoxe? Pas pour le gouvernement. Interrogé sur Public Sénat ce lundi, le porte-parole de l'exécutif Gabriel Attal a indiqué que le retour du masque dans l'isoloir n'était pas à l'ordre du jour.

"Je ne peux pas exclure des choses par principe. Mais je n'ai pas connaissance aujourd'hui qu'on ait pris une telle décision", a-t-il déclaré.

Tout en invitant les Français les plus âgés et les personnes fragiles à l'arborer. "Oui, on a levé ces mesures, et on a eu raison de le faire. On ne revient pas dessus. Mais il faut garder une vigilance. Quand on fait partie des Français fragiles, je pense aux personnes âgées ou très âgées, il faut faire attention quand vous allez dans les lieux où il y a beaucoup de monde. Portez le masque, ça peut vous protéger".

Mais pour le porte-parole du gouvernement, ce sont avant tout les chiffres des hospitalisations qu'il faut observer. Sur Public Sénat, il a décrit une situation qui s'est "beaucoup détendue", indiquant que le nombre de personnes en réanimation avait diminué de 150 cette semaine.

Si l'on compare les chiffres actuels avec ceux de juin 2021, il semble que l'élection présidentielle va se dérouler dans des conditions plus favorables à l'hôpital. Au 13 juin 2021, 2016 patients se trouvaient en soins intensifs. Contre 1486 à l'heure actuelle, avec une dynamique à la baisse.

Pas de conséquences observées en mars 2020

Mais ces données ne rassurent pas Dominique Costagliola. "Il y a désormais une décorrélation entre la circulation du virus et ce qu'il se passe à l'hôpital. Mais pour les gens fragiles, ça reste un problème d'être infecté", explique-t-elle.

Dans un contexte de propagation active du virus, reste à savoir quel risque prend une personne en se rendant dans son bureau de vote. Une étude intitulée Liberté, Egalité, Fraternité... Contaminé? mise en ligne le 15 mai 2020 conduite par des épidémiologistes et statisticiens français indiquait que la tenue du premier tour des municipales n'avait statistiquement pas joué de rôle dans la propagation du Covid-19.

"Nous n’avons pas trouvé d’effet statistique du niveau de participation dans chaque département sur les hospitalisations ultérieures pour Covid-19, mesurées localement", avait à l'époque déclaré au Monde Jean-David Zeitoun, coordinateur de l'étude.

Le scrutin présidentiel des 10 et 24 avril semble se diriger vers une absence de protocole sanitaire spécifique. Certaines communes pourraient cependant ressortir les isoloir anti-Covid-19 dans lesquels elles avaient investi lors des élections régionales, équipés d'un tissu qui détruit de lui-même le virus. Comme le rapporte France Bleu, la ville du Touquet, où vote Emmanuel Macron, en est notamment équipée.

Jules Fresard