Réforme constitutionnelle: Larcher pose ses conditions dans son bras de fer avec Macron

Emmanuel Macron et Gérard Larcher - IAN LANGSDON / POOL / AFP
Il a entre les mains le fameux "pouvoir de nuisance" du Sénat: Gérard Larcher, président Les Républicains de la chambre haute, a réaffirmé ses différences de vues sur la réforme constitutionnelle voulue par l'exécutif, en présentant mercredi les propositions du palais du Luxembourg sur ce projet.
L'exécutif n'obtiendra pas son soutien si la réforme "devait se résumer, in fine, à un artifice politique sans lendemain qui affaiblirait le rôle du Parlement ou qui fragiliserait la représentation des territoires", prévient Gérard Larcher.
"Dialogue" musclé
Déjà connus, les points de friction entre Emmanuel Macron et Gérard Larcher touchent à la baisse du nombre de parlementaires et à la limitation à trois mandats successifs. S'il est inflexible sur ce dernier point, le président du Sénat est prêt à la négociation sur la baisse du nombre de parlementaires, que doit accompagner l'introduction du dose de proportionnelle pour l'élection des députés. Gérard Larcher plaide pour le maintien "d'au moins un député et un sénateur par département". L'élu du "plateau" - l'équivalent du "perchoir" au Sénat - est également opposé à l'adoption de la procédure accélérée (une lecture par chambre) comme procédure par défaut de la navette parlementaire.
Gérard Larcher, qui affirme faire "confiance à la capacité de dialogue" de l'exécutif, a beau jeu pour faire plier l'exécutif, du moins sur le papier: puisque l'article 89 de la Constitution prévoit que le texte de la réforme doit être adopté dans les mêmes termes par les deux chambres avant d'être soumis au vote du Parlement, le président du Sénat peut brandir la menace d'une guérilla parlementaire, voire d'un rejet lors du vote du Congrès, pour lequel une majorité des trois cinquièmes est requise. En théorie, Gérard Larcher dispose d'un levier fort dans sa négociation avec l'Élysée.
La tentation du référendum
Toutefois, le contexte politique n'est pas à l'avantage du sénateur des Yvelines. En effet, la voie référendaire, autre option d'Emmanuel Macron s'il décide d'utiliser l'article 11 de la Constitution pour faire adopter sa révision constitutionnelle en contournant le Parlement, semble tenter l'exécutif, qui trouverait dans ce scrutin le bénéfice politique d'un plébiscite en cas de succès. Un référendum tournant rapidement au vote sanction, cette branche de l'alternative demeure toutefois périlleuse pour le chef de l'Etat.
Les défenseurs de la réforme, parmi lesquels le président de l'Assemblée nationale François de Rugy figure en bonne place, esquissent déjà un argumentaire fondé sur une opposition entre l'opinion - que la majorité estime favorable à la réforme constitutionnelle - et le Sénat, dépeint comme une institution conservatrice - comprendre rétrograde.
"Les Français seront impitoyables avec ceux qui bloqueraient tout changement visant à répondre à la crise démocratique", avertissait ainsi François de Rugy début janvier.
Il n'est pas certain qu'un vétéran aussi madré que Gérard Larcher se laisse intimider par ce genre de bataille. "Pour ma part, je suis toujours prudent quand il s'agit de toucher à la Constitution, qui nous a permis de traverser bien des crises", s'est borné à répondre le sénateur.