"Nous sommes volontaires": chez les socialistes, une alternative à François Bayrou et plusieurs inconnues

Abrité du ciel pluvieux et gris de Blois dans la Halle aux Grains, Olivier Faure a dessiné une éclaircie ce vendredi 29 août. Devant les militants du Parti socialiste, réunis pour les traditionnelles universités d’été, le Premier secrétaire a présenté le "chemin" d’un gouvernement de gauche.
Car pour les socialistes, il est déjà acté que François Bayrou tombera le 8 septembre prochain. Ils se rendront à Matignon lundi pour les consultations organisées par le Premier ministre, mais cela ne les empêchera pas de se prononcer contre le vote de confiance sollicité par ce dernier.
"Nous sommes volontaires pour être les suivants", a martelé Olivier Faure, cherchant à présenter la gauche comme la solution, même si le PS ne possède pas les clés de l’équation: le pouvoir de nomination du Premier ministre revient au chef de l’État, Emmanuel Macron.
"Quelle est l’alternative, si ce n’est l’extrême droite?"
Faute d’être décisionnaire, autant convaincre d’une évidence: "Notre président s’obstine à ne pas vouloir emprunter ce chemin qui est pourtant le seul possible. Autrement, quelle est l’alternative, si ce n’est l’extrême droite en cas de dissolution?", défend Stéphane Delpeyrat, porte-parole du parti au poing et la rose.
Pour démontrer leur capacité à gouverner dans les prochains jours, les socialistes veulent agir aussi bien sur le fond que sur la forme.
Ils présentent ce samedi leurs propositions budgétaires. Là où François Bayrou plaide pour un effort de 44 milliards d’euros, le PS propose de réduire le déficit de 21,7 milliards d'euros. Avec un tout autre raisonnement: "Il faut que l’effort soit porté par les très grandes entreprises et les très hauts revenus", explique la députée Dieynaba Diop.
Cette proche d’Olivier Faure n’oublie pas de citer la mesure du moment à gauche: la taxe Zucman, visant les très hauts patrimoines.
Pas d’utilisation du 49.3
Outre les dispositions financières, les roses vendent une "autre méthode", déjà évoquée en 2024 au sortir des élections législatives:
"Nous prenons l’engagement de ne pas utiliser l'article 49.3, ce qui mécaniquement nous obligera à trouver des compromis texte par texte", a promis Olivier Faure.
Forcément, l’histoire ressemble à 2024, lorsque la gauche réclamait Matignon après être arrivée en tête aux élections législatives anticipées… A quelques exceptions près.
Si plusieurs partisans de l’unité étaient présents au premier rang lors du discours d'Olivier Faure (Marine Tondelier, Alexis Corbière, François Ruffin, Raquel Garrido, Lucie Castets…), d’autres ont brillé par leur absence.
À savoir les insoumis, en guerre ouverte avec les socialistes depuis qu’ils ont refusé de voter la censure sur le budget de François Bayrou. Eux prônent un autre récit que celui d’un gouvernement de gauche, appelant avant tout à une chute de François Bayrou puis à l’organisation d’une présidentielle anticipée.
S’il était présent aux universités d’été, leur meilleur ennemi à gauche, Raphaël Glucksmann, s’est contenté d’une visite éclair. Lui exclut d’avance toute alliance avec LFI pour les prochaines élections. A l’inverse du parterre d’unitaires venus écouter Olivier Faure et présenter au préalable un discours commun.
Jeu d’équilibriste avec les insoumis et le bloc central
Cet état de l’union rappelle une difficulté pour le projet esquissé par les socialistes: leur groupe de députés, celui des Écologistes ainsi que celui des communistes (représenté par le porte-parole du parti, Léon Deffontaines, vendredi) et élus ultra-marins, représentent 121 parlementaires. Loin des 289 nécessaires à une majorité absolue.
Le PS compte sur un appui de LFI (71 députés, NDLR) sans participation au gouvernement. Soit le même dispositif que celui proposé en 2024. Les insoumis y avaient eux-mêmes consenti, faisant cette proposition pour éviter une éventuelle censure. Seront-ils aussi conciliants?
"Si l’on fait des propositions à l’Assemblée nationale pour la justice fiscale et pour réarmer un certain nombre de services publics, les députés insoumis se prononceront. Je ne vois pas pourquoi ils seraient hostiles à priori à ce type de mesure", veut croire Stéphane Delpeyrat.
Alors qu'un tel scénario ne suffirait pas pour bâtir des majorités, le socialiste est confiant vis–vis du bloc central:
"Il n’est pas interdit de penser qu’il y a des gens intelligents chez les députés macronistes pour se dire qu’ils ont intérêt à éviter le chaos, la confrontation sociale, la violence et essayer de faire quelque chose qui soit équilibré", dit-il avant une rentrée sociale animée entre le mouvement de blocage du 10 septembre et une mobilisation des syndicats le 18.
Optimiste? Sur le papier, la politique fiscale voulue par la gauche apparaît difficilement conciliable avec celle défendue par la macronie qui s’oppose aux hausses d’impôts.
Qu’importe: les défenseurs d’un gouvernement de gauche soulignent que les représentants d’une majorité relative LR-camp présidentiel, Michel Barnier puis François Bayrou, ont échoué.
Qui pour Matignon?
Au-delà de la possibilité de réussir ou non à faire passer des textes, d’autres inconnus demeurent. Qui proposer pour Matignon? Lucie Castets, comme en 2024?
Le nom n’est plus évoqué par les uns et les autres qui rappellent volontiers désormais que le président est décisionnaire dans cette affaire.
"Nous ne nous plierons pas au jeu des pronostics et des prétendants sous son regard goguenard", a prévenu Olivier Faure. Autant éviter des difficultés supplémentaires.