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Ministre et candidat pour LR "c'est mission impossible": la double casquette de Retailleau agace le camp Wauquiez

Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau à Saint-Herblain en Loire-Atlantique le 28 mars 2025

Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau à Saint-Herblain en Loire-Atlantique le 28 mars 2025 - Loic VENANCE / AFP

Soucieux d'éviter toute polémique, les proches du locataire de la place Beauvau assurent avoir ériger une frontière nette entre son activité à l'Intérieur et sa candidature pour la présidence du parti de droite. Mais l'entourage de Laurent Wauquiez l'accuse de "tout mélanger".

Mélange des genres ou stricte séparation? À quelques heures de la présentation de son premier bilan six mois après sa nomination au ministère de l'Intérieur ce jeudi, la double casquette de Bruno Retailleau, grand favori pour prendre la tête des Républicains, agace.

Dans les rangs de son concurrent Laurent Wauquiez qui a tenté de marquer des points en proposant d'envoyer les personnes "les plus dangereuses" sous le coup d'OQTF à Saint-Pierre-et-Miquelon ce mardi, on est bien décidé à faire de ce cumul un angle d'attaque.

"Ça me perturbe qu'il utilise sa fonction pour essayer de devenir président de la droite. Ce sont des jobs différents. Il nous dit qu'il n'y a pas de problème. Mais il n'a qu'un seul cerveau, un seul corps. On mélange tout", tance ainsi l'un des proches de Laurent Wauquiez auprès de BFMTV.com.

Remboursement scrupuleux

Réponse du sénateur Les Républicains Marc-Philippe Daubresse, proche de Bruno Retailleau: "Franchement, je ne comprends pas la critique. Quand vous êtes inquiet du résultat du match, vous cherchez un moyen de dénigrer l'autre".

Soucieux d'éviter toute polémique, son cabinet assure s'appliquer une discipline financière particulièment stricte pour séparer sa vie de ministre de sa campagne pour les LR.

Exemple avec son véhicule: une fois rendu là où le ministre de l'Intérieur était attendu comme dans un commissariat, son équipe note scrupuleusement le nombre de kilomètres parcourus.

Quand Bruno Retailleau reprend la route pour se rendre à un meeting, l'affichage au compteur kilométrique est noté. Les frais kilométriques sont ensuite remboursés sur son budget de campagne.

"On n'a jamais hésité à annuler un déplacement de campagne"

Même topo pour les équipes qui l'entourent. Son entourage explique que les membres de son cabinet ministériel ne participent jamais à des évènements de la campagne du ministre. Ce sont les collaborateurs en charge de sa candidature pour les LR qui sont sur le pont lors des metings.

Mais la distinction est parfois plus difficile à faire comme pour la sécurité. "Cela n'est pas négociable. Il a toujours des gardes du corps et une voiture blindée, où qu'il aille, que ce soit pour un déplacement à titre privé, ministériel ou pour la campagne", explique ainsi l'un de ses conseillers ministériels.

Autre questionnement: la question de sa disponiblité dans ce ministère de l'urgence, avec très peu de temps mort. "On n'a jamais hésité à annuler un déplacement de campagne si cela percute son agenda", défend un proche de Bruno Retailleau.

Attendu ce vendredi pour une rencontre avec les militants à Mont-de-Marsan (Landes), le sexagénaire sera finalement à Tarbes (Hautes-Pyrénées) pour rendre hommage au CRS tué lors d'une opération de secours le 8 avril dernier.

"Pas respecteux des militants"

"Très bien. Mais avouez que ce n'est quand même pas respectueux des militants LR. Ça montre bien qu'on ne peut pas tout faire bien", regrette un élu du Rhône, en s'inquiétant de "la suite s'il gagne".

En cas de victoire, Bruno Retailleau aura-t-il le temps de s'occuper du parti qui aura besoin d'un sérieux travail sur les idées pour avoir une chance de gagner la présidentielle? Personne n'imagine, en tout cas, que le parti puise dans le programme de sa candidate en 2022 Valérie Pécresse qui n'avait même pas atteint les 5%.

Dans le camp du ministre de l'Intérieur, personne n'a d'inquiétude sur le sujet. Il faut dire qu'en 2005, Nicolas Sarkozy avait pris la tête de l'UMP, l'ancêtre des LR, tout en restant place Beauvau avant de largement gagner la présidentielle 2 ans plus tard.

"On ne peut pas tout faire"

"C'est un atout d'être ministre de l'Intérieur et patron de la droite. Vous avez une vision très précise de ce qu'il faut faire sur vos sujets pour les Français mais aussi sur toutes les autres problématiques", veut croire le sénateur LR, Marc-Philippe Daubresse.

"Tout ça, c'est mission impossible", soupire pourtant un ancien député de droite.

"Être en pointe sur la lutte contre le terrorisme, les OQTF, la protection des Français et en même temps rencontrer des intellectuels pour faire un programme, avoir le temps de réfléchir. On ne peut pas tout faire", reconnaît cet ex-parlementaire.

Les arguments des proches de Laurent Wauquiez peuvent-ils vraiment porter? Si le ministre de l'Intérieur fait la course en tête sur le papier et que le président des députés LR apparaît loin derrière, le résultat du scrutin reste très incertain.

Le nombre des militants LR est trop faible pour faire des sondages et cette élection réserve souvent des surprises comme on a pu le voir lors de la compétition entre François Copé et François Fillon en 2012. "À la fin, il faudra qu'on arrive tous à se réconcilier. Il faut à tout prix qu'on évite les attaques sous la ceinture", implore déjà un collaborateur parlementaire.

Marie-Pierre Bourgeois