Juppé, Fillon: lequel est le mieux placé face à Le Pen?

Qui de Alain Juppé ou François Fillon est le plus susceptible de battre Marine Le Pen si elle arrivait au second tour? - Christophe Archambault - AFP
D'Alain Juppé ou François Fillon, qui parmi les finalistes de la primaire à droite serait le plus à même de battre le FN si celui-ci parvenait au second tour de la présidentielle? Si l'avance de François Fillon laisse présager la possibilité d'une candidature officielle de son parti pour 2017, il n'est pas sûr qu'il puisse aisément battre Marine Le Pen.
C'est en tout cas l'enseignement des sondages menés ces derniers mois. En juillet 2016, une étude BVA-Salesforce pour la presse régionale et Orange annonce Alain Juppé en tête au premier tour de la présidentielle face à Marine Le Pen, avec 36% des voix contre 28% pour la présidente du FN. Au second tour, il l'emporterait même largement avec 68% des voix.
Le 22 septembre, un autre sondage Elabe pour Les Echos et Radio Classique crédite Alain Juppé de 26 à 34% des voix au premier tour, contre 25 à 28% pour Marine Le Pen. Au second tour, l'institut a testé plusieurs personnalités susceptibles de l'affronter: il n'y a qu'Alain Juppé qui est susceptible de battre la candidate frontiste, mais à une condition: que ni François Hollande ni Emmanuel Macron ne soient candidats. Or l'ancien ministre de l'Economie s'est depuis lancé dans la course. Enfin, le 21 octobre, Alain Juppé était crédité par un sondage BVA de 33 à 39% selon les scénarios, devant Marine Le Pen ebtre 25 et 29%.
"Si on se fie aux quelques enquêtes qui testé le second tour, celui qui apparaissait avec la plus grande réserve de voix contre Marine Le Pen était Alain Juppé", reconnaît Yves-Marie Cann, de l'institut Elabe. "Un bon score qui s'expliquait notamment par le report des voix de gauche et du centre, une sorte de Front républicain en sa faveur. Ensuite venait François Fillon, puis Nicolas Sarkozy".
L'hypothèse que le FN n'avait pas envisagée
Mais la situation s'est complexifiée depuis. Les sondages, s'ils avaient prédit une percée de François Fillon, n'avaient pas anticipé un tel succès, ni la déroute du maire de Bordeaux. Donné favori pendant des semaines, Alain Juppé affiche un pénible 28,6% au soir du premier tour. Nicolas Sarkozy, lui, est éliminé de la compétition, situation qui n'avait été envisagée par aucune étude. "Certains sondages commencent aussi à dater, alors qu'ils doivent se lire dans une dynamique", rappelle Yves-Marie Cann.
Au lendemain du premier tour, le Front national s'interroge lui aussi. Au QG du parti, on a déjà commencé à travailler sur les hypothèses du second tour de la présidentielle. Mais l'hypothèse d'un duel Marine Le Pen-François Fillon n'avait pas été envisagée. Et certains élus admettent qu'ils ne s'attendaient pas à un adversaire coriace comme l'ancien Premier ministre. "Fillon, c'est le scénario le plus difficile pour Marine", souffle un élu du sud au Monde, qui voit en Alain Juppé un candidat "plus caricatural".
"Tout dépend de sur quoi se joue la présidentielle: est-ce que ce sera sur le programme économique? Auquel cas celui de François Fillon pourrait repousser certains électeurs du FN qui auraient pu être tentés par les Républicains", relève Yves-Marie Cann. "Mais si le scrutin va se jouer sur les valeurs, alors les positions conservatrices de François Fillon pourraient séduire à droite, au-delà de son parti. Il pourrait donc représenter un danger pour le FN".
Une assise électorale élargie pour Fillon
C'est notamment les prises de position de François Fillon sur le mariage pour tous, et le soutien de Sens commun, mouvement proche de la Manif pour tous, qui pourraient faire la différence. "Et si François Fillon est élu dimanche prochain, il pourrait en sortir avec une assise plus élargie qui peut lui donner un avantage supplémentaire face à Alain Juppé".
Pour autant, même face à un ennemi commun, il est difficile de départager les deux candidats dès aujourd'hui. Car les électeurs ne votent pas de la même façon à une primaire qu'à une présidentielle. "La seconde est beaucoup plus structurée", selon le sondeur, "alors que pour une primaire les électeurs passent plus facilement d'un candidat à un autre". D'où une difficulté pour les sondages d'anticiper la situation. A six mois de la présidentielle, la prudence reste de mise mais chacun déjà élabore différents scenarios.