BFMTV
Renaissance

"Le seul à pouvoir lui faire de l'ombre": les proches d'Attal écartés du gouvernement Bayrou?

François Bayrou et Gabriel Attal à Blois le 23 mars 2024

François Bayrou et Gabriel Attal à Blois le 23 mars 2024 - Sebastien SALOM-GOMIS / AFP

Le casting ministériel qui évince tous les lieutenants de Gabriel Attal ne passe pas dans les rangs de l'ancien Premier ministre. Le camp de François Bayrou assure avoir tenu compte des équilibres politiques pour nommer son gouvernement et dénonce "des enfantillages".

Un casting qui ne passe pas. La disparition de ministres proches de Gabriel Attal dans le nouveau gouvernement de François Bayrou agace l'entourage de l'ancien Premier ministre. Certains y voient une tentative du locataire de Matignon de cornériser le président des députés Renaissance.

"François Bayrou sait que Gabriel Attal est le seul à pouvoir lui faire de l'ombre. C'est quelqu'un de rancunier. Il ne supporte pas de ne pas avoir été nommé dès janvier dernier Premier ministre", griffe l'une des proches auprès de BFMTV.com.

"Mal au cœur"

Guillaume Kasbarian (Logement), Anne Genetet (Éducation nationale), Antoine Armand (Économie)... Exit dans le nouveau gouvernement les profils appréciés par le patron des élus macronistes à l'Assemblée.

Quant au retour potentiel de l'ex porte-parole du gouvernement Prisca Thévenot qui aurait pu récupérer le ministère de l'Égalité femmes-hommes, il n'a pas été retenu. Résultat: zéro proche de l'ex chef du gouvernement dans l'équipe de François Bayrou.

"Honnêtement, ça nous a tous fait un peu mal au cœur", lâche un élu qui apprécie l'ancien locataire de Matignon.

À la place, ce sont plutôt des concurrents de Gabriel Attal qui ont fait leur entrée aux côtés du patron du Modem, à commencer par Élisabeth Borne, nommée rue de Grenelle après avoir un temps ferraillé contre lui pour récupérer le parti présidentiel.

"Rien de personnel"

Gérald Darmanin, qui a déjà lancé son propre mouvement Populaires pour se positionner en vue de 2027, est également de retour à la Justice. Moins de 4 jours après sa nomination, il s'est déjà démultiplié sur le terrain et dans les médias.

Aurore Bergé, avec qui les relations sont notoirement difficiles, revient également dans les allées du pouvoir. Autant de poids lourds donc capables de défendre le Premier ministre à l'Assemblée nationale et dans les médias.

"Il n'y a rien de personnel entre Bayrou et Attal. Le Premier ministre a fait son casting avec les besoins qu'il avait, à savoir des macronistes et des gens qui savent faire de la politique. Le reste, ce ne sont que des enfantillages", banalise un député Modem.

"Pas envie de lui faire confiance"

Gabriel Attal fait-il aussi les frais de ses relations compliquées avec Michel Barnier? Les deux hommes avaient échangé quelques piques à l'Assemblée nationale lors des premiers pas du Premier ministre en septembre.

Le député Renaissance n'avait pas non plus hésité à plusieurs reprises à prendre ses distances sur le budget proposé par Matignon.

"Ce qui est sûr, c'est que quand on regarde comment ça s'est passé avec Barnier, ça ne donne pas envie de lui faire confiance, ça, c'est certain", juge un élu centriste.

"Macron n'a rien à voir avec tout cela"

Certains lieutenants de Gabriel Attal, pensent, eux, que c'est Emmanuel Macron en personne qui aurait écarté certains noms du casting ministériel, ne souhaitant pas faire de cadeau à Gabriel Attal.

En cause notamment: la dissolution décidée sans consulter le Premier ministre d'alors qui avait ensuite fait savoir publiquement tout le mal qu'il en pensait. Depuis, les relations sont glaciales. Un motif pour exfiltrer ses proches du gouvernement ?

"Emmanuel Macron n'a rien à voir avec tout cela", défend l'ex ministre de l'Éducation nationale Anne Genetet.

Même son de cloche de la part d'un familier des allées du pouvoir qui assure que le chef de l'État ne s'est pas mêlé du casting de François Bayrou.

"Il faut arrêter de penser que tout tourne autour d"Attal"

"Le président s'est uniquement concentré sur son domaine réservé" en suivant de très près les nominations aux Armées et aux Affaires étrangères où Sébastien Lecornu et Jean-Noël Barrot ont chacun été maintenus.

"Il faut arrêter de penser que tout tourne autour de Gabriel Attal. Il y a des choses qui dépassent sa personne, à commencer par le besoin de réunir le socle commun", tance encore un macroniste.

La méthode a cependant un risque: démotiver certains députés Renaissance de soutenir François Bayrou qui va pourtant bien avoir besoin de leurs forces à l'Assemblée. Michel Barnier lui-même n'a souvent bénéficié que du soutien du bout des lèvres des députés macronistes dont il aurait pourtant eu grand besoin pendant l'étude des budgets à l'automne.

"On a Élisabeth Borne qui parle à l'aile gauche de Renaissance, Gérald Darmanin qui parle à l'aile droite. Sur le papier, ça permet de tenir les troupes", veut croire un député Modem.

"On verra" pour soutenir Bayrou

Pour l'instant pourtant, les proches de Gabriel Attal ne font pas semblant et ne devraient guère mouiller la chemise dans les débats sur les budgets 2025 qui s'annoncent à très haut risque pour François Bayrou

"Moi, je vais faire de la circonscription, me concentrer sur le parti. Pour le reste, on verra", élude l'une de ses proches.

En attendant peut-être un réglement de compte en coulisses, l'ex Premier ministre, pourtant adepte des coups médiatiques, joue la carte de la grande discrétion. Un déplacement à Colmar, un soutien à la candidate Renaissance dans l'ancien territoire d'Olivier Véran, un tweet minimaliste de soutien à François Bayrou...

Sans manifestement abîmer son image. Dans le dernier sondage Ifop pour Sud radio les deux hommes font jeu égal au classement des personnalités politiques préférées des Français avec 44% d'opinions favorables.

Marie-Pierre Bourgeois