La méthode Macron pour réformer le code du travail à l'épreuve des syndicats

La photographie officielle du gouvernement dirigé par Edouard Philippe, le 18 mai 2017 à l'Elysée à Paris. - Philippe Wojazer / POOL / AFP
Le président de la République reçoit ce mardi à l'Elysée les responsables des principaux syndicats de salariés et organisations patronales, à commencer par Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, à 9h, Philippe Martinez, son homologue de la CGT à 10h, et Jean-Claude Mailly, de FO, à 11h. Pierre Gattaz, le patron du Medef, lui succédera à midi. Il s'agit pour le chef de l'Etat de discuter de sa réforme du Code du travail.
Le recours aux ordonnances en question
C'est aussi la première occasion de tester sa méthode, son approche du dialogue social autour d'une mesure-clé de son programme. L'une des modalités sur lesquelles veut s'appuyer Emmanuel Macron est au cœur du débat: le recours aux ordonnances pour modifier le Code du travail.
Lundi matin sur Europe 1, Philippe Martinez a jugé le procédé "irrecevable". Jean-Claude Mailly, lui, voit les choses d'un autre œil. Invité ce lundi soir sur notre antenne, le leader de Force ouvrière n'a pas condamné l'outil en tant que tel: "La Sécurité sociale en 1945 a été créée par des ordonnances, la cinquième semaine de congés payés, ce fut aussi des ordonnances". Sur le même sujet dans Les Echos ce lundi, il ajoutait: "Cela suppose donc une vraie concertation". Philippe Louis, qui dirige la CFTC et pénétrera dans le bureau présidentiel sur les coups de 18h mardi, a évoqué la question dans un communiqué publié ce lundi soir:
"Dans le cas de certaines réformes annoncées par le Président de la République, procéder par ordonnance comporte de sérieux risques. Il en va ainsi de la refondation du code du travail pour laquelle la CFTC suggérera au Président de la République de prendre appui sur la Loi Travail qui prévoit en son article 1 la création d'une commission d'experts chargée, dans la concertation avec les partenaires sociaux, de proposer un élargissement du champ de la négociation collective."
Si la réforme du Code du travail risque de ne pas de faire l'unanimité dans le monde des professionnels, la méthodologie employée divise déjà les syndicats entre eux. "Il va jouer à diviser les syndicats, comme il l’a fait avec les partis politiques", a analysé sur BFMTV Jean-Sébastien Ferjou, le directeur de publication d'Atlantico.
Eviter le clivage social
Les ordonnances ne sont pas le seul point d'achoppement. La personnalité d'Emmanuel Macron, et son passé de ministre de l'Economie pèsent aussi aux yeux des partenaires sociaux. Abordant devant Apolline de Malherbe l'entrevue de ce mardi, Jean-Claude Mailly a lancé: "Je lui demanderai quelle est sa conception du dialogue social et de la négociation collective. Il a eu quelques phrases malheureuses durant la campagne, quand il disait, par exemple, que 'les syndicats, ça devait surtout être dans l’entreprise et pas au niveau national'." Le responsable syndical a poursuivi sur un registre plus directement politique:
"J’ai cru comprendre qu’on allait travailler tout l’été. Mais ce n’est pas seulement nous demander notre avis, c’est aussi en tenir compte. (...) Il doit éviter de cliver socialement. Tant sur la méthode que sur le fond, la balle est dans leur camp."
Même si la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, et le Premier ministre, Edouard Philippe, recevront eux aussi les syndicalistes, notre éditorialiste Laurent Neumann a estimé que, pour cette mesure, Emmanuel Macron était "en train de rompre avec l'une de ses promesses de campagne". En effet, rappelle-t-il, Emmanuel Macron avait déclaré que "le gouvernement devait gouverner, et le président présider". Or, ce mardi, "les syndicats ont rendez-vous à l'Elysée", note Laurent Neumann, qui voit une preuve de l'importance "fondamentale" de cette mesure dans l'esprit du nouveau président de la République, conscient d'y jouer "sa capacité à appliquer l'intégralité de son programme".