L'exécutif reste sourd aux revendications des gilets jaunes

Des gilets jaunes le 18 novembre 2018 à Caen. - CHARLY TRIBALLEAU / AFP
Le bras de fer se poursuit. Alors que les gilets jaunes se sont mobilisés ce lundi pour une 3ème journée consécutive d'actions à travers le pays, l'exécutif a choisi de rester inflexible. Interrogé dans le cadre de sa visite en Belgique sur les éventuelles concessions que le gouvernement pourrait faire, Emmanuel Macron a déclaré qu'il "répondrait en temps voulu".
"Je n'y répondrai pas, surtout quelques heures après l'expression du Premier ministre", a lancé le président alors qu'il était aux côtés du chef du gouvernement belge. Edouard Philippe, sur France 2 dimanche soir, n'a pas laissé planer l'ombre d'un compromis. Il a assuré qu'il avait entendu la "colère" et la "souffrance", mais qu'il tiendrait "le cap" malgré la mobilisation des "gilets jaunes".
"Il aurait pu dire 'je vous emmerde'"
Représentants de droite comme de gauche ont critiqué dès dimanche soir et ce lundi cette posture. "Il a tort car cela exacerbe la colère", a réagi la porte-parole des Républicains Laurence Sailliet sur Franceinfo: "son intervention hier était l'apogée du mensonge et du mépris", a-t-elle ajouté en critiquant sa "totale déconnexion" d'avec les Français.
"Edouard Philippe a bien parlé... pour ne rien dire. Le boxeur est fatigué: l'esquive ne suffit pas après deux jours d'insurrection citoyenne", a de son côté jugé Jean-Luc Mélenchon, le chef de file de La France insoumise, dans un tweet.
"Il aurait pu dire 'Je vous emmerde', ç'aurait été moins long et ç'aurait voulu dire le même chose...", a lancé Ian Brossat, tête de liste PCF pour les élections européennes, également sur Twitter.
En suivant cette stratégie, le gouvernement court plusieurs risques, estimait ce lundi Laurent Neumann, éditorialiste à BFMTV.
"Attention à ne pas donner le sentiment qu’on traite tout cela par le mépris, par l’arrogance. On 'entend' la souffrance, on 'entend' la colère, et en même temps on ne bouge pas d’une virgule, on continue de la même manière avec quand même deux risques pour le gouvernement: d’abord que le mouvement s’enracine, même s’il est moins éloquent que samedi. Et le deuxième risque, c’est la contagion. Pas simplement dans le choix des cibles, mais la contagion aux professionnels de la route, les routiers, les taxis, les VTC, les ambulanciers, d’autres professions, on parle par exemple des infirmières qui pourraient venir grossir les rangs des manifestants", a-t-il développé.
Un risque de contagion?
Un risque de contagion que le gouvernement a déjà commencé à nuancer. "Il ne faut pas faire d'amalgame, et je peux vous assurer qu'on a rediscuté ce matin avec toutes les organisations de transport routier, elles ne souhaitent pas renter dans ce mouvement", a indiqué la ministre des Transports sur Franceinfo.
"Les transporteurs routiers ont leur sujet, on en discute avec eux, mais ils ne souhaitent pas être solidaires de ce mouvement", même s'il y a bien "quelques cas isolés" de routiers l'ayant rejoint, a insisté Elisabeth Borne.
"On ne lâchera pas non plus"
Sur RMC ce lundi, l'un des porte-parole des gilets jaunes, Benjamin Cauchy, a affirmé que la volonté du mouvement était désormais de bloquer "tout ce qui fera réagir le plus rapidement le gouvernement". Depuis quelques heures, les blocages se sont concentrés sur des dépôts de carburant, et de nouveaux appels à la mobilisation ont été lancés pour le 24 novembre à Paris cette fois.
Sur le terrain, tout au long de la journée, les gilets jaunes entendaient aussi répondre par la détermination à l'inflexibilité affichée par l'exécutif. "Ce que j’ai entendu c’est qu’il ne veut pas lâcher. Eh bien on ne lâchera pas non plus. Si ça dégénère vraiment, je reste là et je ne vais plus travailler", expliquait notamment Laurence, interrogée par BFMTV. "On a été chassé dimanche... On est revenus, on se refait chasser mais c'est pas grave, on tiendra bon, on va encore revenir à la charge, c'est pas grave", assurait pour sa part Peter, après l'évacuation de gilets jaunes au pied du Pont d'Aquitaine à Bordeaux.