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"Populisme", "court-termisme électoral"... La ministre Agnès Pannier-Runacher déplore le discours sur l'écologie d'une partie de "la droite et de l'extrême droite"

Agnès Pannier-Runacher dans le Pas-de-Calais le 25 septembre 2024

Agnès Pannier-Runacher dans le Pas-de-Calais le 25 septembre 2024 - FRANCOIS LO PRESTI / AFP

La ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher déplore la tribune co-signée par le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau dans laquelle il appelait à "stopper le financement des renouvelables" et pointe certains discours populistes sur l'environnement, y compris au sein de l'exécutif.

La position de Bruno Retailleau sur l'environnement continue de faire réagir au sein de l'exécutif. Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, tacle les discours portant sur l'écologie venus de "la droite" et de "l'extrême droite" qu'elle accuse d'utiliser le changement climatique pour "attiser les peurs" et "fracturer le pays", dans un entretien au Monde ce vendredi 4 juillet, taclant au passage le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, alors que l'Hexagone a connu de fortes chaleurs ces derniers jours.

"Depuis quelques mois, la droite et l’extrême droite voudraient balayer tout ce qui a été construit avec le président de la République, Emmanuel Macron, en répétant que l’écologie est un danger", dénonce la ministre.

"Hier, ils niaient le changement climatique. Aujourd’hui, ils s’en servent pour attiser des peurs et fracturer le pays. C’est du populisme, du court-termisme électoral déguisé en soi-disant 'bon sens' qui protégerait les classes populaires et la ruralité", affirme Agnès Pannier-Runacher.

Pour l'ancienne députée du Pas-de-Calais, ces discours "expos(ent) les Français aux dangers du changement climatique" et "affaibli(ssent) la position de la France face à (ses) fournisseurs de gaz et de pétrole qui ne sont pas toujours des États alliés, comme la Russie, les États-Unis, l’Algérie ou des pays du Moyen-Orient…"

Bruno Retailleau pointé du doigt

La ministre n'hésite pas à déplorer explicitement certains propos prononcés au sein même de son gouvernement, pointant du doigt la tribune co-signée par le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, dans laquelle il appelle à "stopper le financement des renouvelables" et parue dans Le Figaro jeudi 3 juillet.

"Cette tribune est absurde et dangereuse d’un point de vue industriel, économique, social, mais aussi géopolitique", soutient Agnès Pannier-Runacher.

"La stratégie que propose Bruno Retailleau, finalement, c’est de faire des chèques à l’Algérie pour importer du gaz tout en mettant par terre toute une filière de renouvelables. C’est de la petite politique", tacle-t-elle.

"C’est un calcul électoral perdant: à courir derrière le Rassemblement national, les Français préféreront toujours l’original à la copie. Surtout quand on pèse 7 % des votes aux législatives", tance l'ex-députée.

La patronne des députés RN en prend aussi pour son grade. "Je trouve par ailleurs piquant que Marine Le Pen appelle à créer un plan climatisation tout en s’opposant à la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) qui prévoit de tripler les réseaux de froid, c’est-à-dire une climatisation efficace et décarbonée", lance Agnès Pannier-Runacher.

"Faire du nucléaire et du renouvelable", selon Macron

La co-signature par Bruno Retailleau, en tant que président de LR, de cette tribune dans Le Figaro a fait réagir ces derniers jours. Emmanuel Macron lui a répondu, assurant que "ce n'est pas une bonne idée de dire qu'on ne va plus faire de renouvelable dans notre pays, qu'on ne va plus investir", et en appelant à ne pas "tout caricaturer" et à "sortir des lubies", alors qu'il était questionné par la presse à ce sujet lors d'un déplacement à Rochefort-sur-Soulzon. "Il faut faire du nucléaire et du renouvelable", selon le président.

L'ex-Premier ministre Gabriel Attal, actuellement chef du parti Renaissance, a pour sa part dénoncé sur X un "contresens historique et scientifique (...) incompréhensible" de la part de Bruno Retailleau, alors que la France "subit un vague de chaleur inédite depuis plusieurs jours".

"Croire que sortir de la dépendance aux énergies fossiles et aux pays qui les produisent peut se faire en abandonnant les énergies renouvelables et en mettant au chômage les salariés de leurs filières, est une vue de l'esprit - et une position frontalement opposée à la ligne du Gouvernement", a par ailleurs aussi dénoncé le ministre de l'Industrie Marc Ferracci.

Une baisse des émissions de gaz à effet de serre au ralenti

Face aux discours qu'elle dénonce, Agnès Pannier-Runacher appelle ce vendredi pour un "mix équilibré entre nucléaire et renouvelables, qui permette de faire baisser le prix de l’électricité et d’arriver à 42% d’énergies fossiles en 2030, contre environ 60% aujourd’hui".

Dans sa tribune, Bruno Retailleau avait appelé à "rebâtir un parc nucléaire en reconstituant une compétence industrielle française", estimant que "l'éolien et le photovoltaïque n'apportent au mix énergétique français qu'une intermittence coûteuse à gérer".

En 2024, la baisse des émissions de gaz à effet de serre françaises était de 1,8%, contre -6,8% en 2023. Ce ralentissement survient dans un contexte politique marqué par plusieurs reculs ces dernières semaines sur l'artificialisation des sols (ZAN), sur la restriction des véhicules les plus polluants dans les grandes villes (ZFE) et sur la remise en cause des aides de l'État pour la rénovation énergétique des logements (MaPrimeRénov').

Juliette Desmonceaux