"Personne ne va dire un mot contre elle": après le renvoi de Rachida Dati devant la justice, les LR et la macronie tétanisés

La ministre de la Culture Rachida Dati le 30 juin 2025 à l'Assemblée nationale - Ludovic MARIN / AFP
Haro sur Bruno Retailleau qui étrille le macronisme, grand calme pour Rachida Dati. La ministre de la Culture, qui est désormais renvoyée devant la justice pour "recel d'abus de pouvoir", "abus de confiance", "corruption et trafic dinfluence", n'a eu le droit à quasiment aucun commentaire de la part du camp présidentiel ou des Républicains.
Seul le ministre de la Justice Gérald Darmanin a indiqué ce mardi sur TF1 souhaiter "ardemment qu'elle soit maire de Paris" alors même que la candidature de sa collègue dans la capitale en mars 2026 ne fait plus grand-doute.
"L'intimidation permanente"
La porte-parole du gouvernement Sophie Primas, elle, s'est contentée d'indiquer à la sortie du Conseil des ministres que l'exécutif "respectait la présomption d'innocence".
"C'est l'intimidation permanente, la peur de se faire harceler... Évidemment que personne ne va dire un mot contre elle publiquement", soupire une figure de la macronie auprès de BFMTV.
Connue pour ses coups de sang et son style bulldozer, rares sont ceux à reconnaître publiquement leur malaise. La situation n'a pourtant rien d'évidente politiquement. La ministre de la Culture qui a fait appel de la décision des juges d'instruction, est accusée d'avoir perçu 900.000 euros entre 2010 et 2012 en tant qu'avocate pour des prestations de conseil avec une filiale de l'alliance Renault-Nissan, sans respecter les règles du Parlement européen.
"Pas un très beau départ de campagne"
La justice la soupçonne de plus de ne pas avoir réellement travaillé dans le cadre de ce contrat qui a lieu lorsqu'elle était députée européenne.
"Ce n'est pas un très beau départ pour une campagne, personne ne peut dire le contraire, y compris ses partisans", observe un sénateur LR.
Rare figure identifiée parmi le gouvernement de François Bayrou, Rachida Dati croit depuis ses mois en sa victoire à Paris et se verrait bien partir sous la bannière des LR et de la macronie.
"On ne mouille pas trop la chemise pour elle"
La manœuvre a le mérite de satisfaire les deux camps: en cas de victoire de l'ex-ministre de Nicolas Sarkozy, la droite pourra se targuer d'une belle rampe de lancement vers la présidentielle. Quant au camp présidentiel qui n'a jamais réussi à s'implanter à Paris et en l'absence de volonté de Gabriel Attal d'y aller, sa candidature aurait le mérite de lui enlever une grosse épine du pied.
"La vérité, c'est que ça arrange tout le monde qu'elle y aille même si le plus probable, c'est que ni à droite ni en macronie, on ne mouille trop la chemise pour elle", reconnaît un ténor des LR à Paris.
Jusqu'au plus haut sommet de l'État? Emmanuel Macron qui avait personnellement débauché Rachida Dati pour la faire entrer au gouvernement en janvier 2024 a "pris note" de la décision des juges d'instruction. "Un renvoi n'étant pas une condamnation, elle poursuit son travail au gouvernement", a réagi l'entourage du président.
"Ce n'est pas la seule raison mais le fait qu'elle soit soutenue jusqu'à l'Élysée couplé à son caractère ne donne pas très envie de sortir du bois", admet un député macroniste.
Attaques des magistrats
Et tant pis si le chef de l'État a fortement évolué en la matière, promettant en 2017 la démission des ministres mis en examen, avant de faire de ce principe une lecture très variable.
Depuis l'annonce de son procès, Rachida Dati, elle, ne change de stratégie, montrant que pour elle la meilleure défense est l'attaque. Elle a dénoncé ce mardi soir sur LCI "une procédure émaillée d'incidents" et mis en cause des magistrats qui "marchent"' sur les droits de la défense.
La veille, devant 250 militants LR, l'ex-ministre de la Justice de Nicolas Sarkozy avait assuré "n'avoir peur de rien, de personne". "Certains essaient de m'attaquer sur ma vie privée, sur plein d'aspects qui sont collatéraux à ma candidature", avait-elle encore regretté.
Vers une campagne législative
Si Rachida Dati affiche une certaine fébrilité, c'est que son renvoi devant la justice tombe particulièrement mal. L'élection de l'un de ses proches dans la 2e circonscription de la capitale, le député Jean Laussucq, son ancien directeur de cabinet à la mairie du 7e arrondissement, a été annulée la semaine dernière par le Conseil constitutionnel. Relativement discret depuis son départ de Matignon, Michel Barnier, élu pendant des années en Savoie, a fait savoir qu'il était candidat.
De quoi agacer la ministre de la Culture qui imagine déjà la droite demander à l'ancien Premier ministre de jouer la carte du recours si elle était finalement en incapacité de se présenter à Paris. Elle envisage donc d'aller au bras de fer avec son parti en se présentant elle-même dans cette circonscription. Au risque de s'abîmer et d'y aller en dissidente si la droite persiste à investir Michel Barnier?
"La vérité, c'est que cette histoire de renvoi renforce ceux qui apprécient Rachida Dati et qui trouvent qu'on s'acharne contre elle tout comme ça renforce ceux qui la détestent", conclut un député LR.