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"On va laisser la fièvre retomber": pour François Bayrou, le calme avant la tempête de l'automne budgétaire

Le Premier ministre français François Bayrou prononce un discours pour dévoiler les principales orientations du budget 2026 de la France, un casse-tête financier et politique puisqu'il prévoit un important resserrement de 40 milliards d'économies, en plus d'une augmentation du budget militaire, à Paris le 15 juillet 2025.

Le Premier ministre français François Bayrou prononce un discours pour dévoiler les principales orientations du budget 2026 de la France, un casse-tête financier et politique puisqu'il prévoit un important resserrement de 40 milliards d'économies, en plus d'une augmentation du budget militaire, à Paris le 15 juillet 2025. - Photo par THOMAS SAMSON / AFP

Au lendemain de ses annonces sur les orientations budgétaires, le Premier ministre peut compter sur un répit de quelques semaines. Si les oppositions sont très critiques, elle ne peuvent le censurer dans l'immédiat. Pour autant, l'épée de damoclès reviendra rapidement au-dessus de la tête du gouvernement, qui devra trouver un accord pour éviter d'être renversé.

Si le Parlement a terminé ses travaux vendredi dernier, François Bayrou a peut-être eu un aperçu ce mardi 15 juillet de ce qui l'attendait pour la reprise avec l'examen des textes budgétaires.

En présentant les orientations de son gouvernement en la matière - une cure de pas moins de 43,8 milliards d'euros - le Premier ministre s'est attiré les foudres de l'opposition, celles-ci s'accordant pour dénoncer une "purge sociale et fiscale", une "saignée d'une brutalité inouïe" ou encore un "plan de démolition de notre modèle français". Toutes ont brandi une même menace: la censure.

Il faut dire que François Bayrou, qui avait fait de la dette l'un de ses sujets de campagne présidentielle en 2007 et 2012, n'a pas fait dans la dentelle. Suppression de deux jours fériés, gel des prestations sociales, des retraites et du barème de l'impôt sur le revenu...

Autant de propositions qui ont fait largement réagir, augurant des négociations très serrées pour Matignon.

Pas de censure possible avant la rentrée

Dans l'immédiat, le gouvernement peut dormir sur ses deux oreilles. Là est tout l'intérêt de la fenêtre de tir choisie par François Bayrou, qui s'est exprimé seulement quatre jours après la fin de session extraordinaire du Parlement, privant ses adversaires du dépôt d'une motion de censure avant la rentrée.

"On va laisser la fièvre retomber un petit peu, ils ont tous pris un coup de chaud hier. On verra comment tout cela prend", explique un cadre de son parti, le Modem.

"On est dans le lendemain classique d’un gouvernement qui n’a pas de majorité et qui propose des choses qui sont difficiles à entendre, mais néanmoins nécessaires. Il est normal que les oppositions réagissent comme cela. Mais chacun est en train de réfléchir aux conséquences de ne pas engager la réduction de la dette de la France, la refonte de l’État pour qu’il soit moins obèse…", veut croire ce même responsable.

Optimiste? Pour l'instant, le compte est loin. Il suffisait d'écouter Olivier Faure sur BFMTV mardi soir: "Sur les bases actuelles, la seule perspective est la censure", a dit le patron du Parti socialiste, alors que sa formation avait épargné le gouvernement lors du précédent budget, en échange de certaines concessions...

Dont un certain "conclave" sur les retraites qui n'a finalement pas débouché sur un texte au Parlement permettant de débattre du report de l'âge légal de départ à 64 ans, comme l'espéraient les socialistes.

"Ce n'est pas blanc ou noir"

Ce qui n'est pas pour faciliter la possibilité d'un accord, même si le PS ne ferme pas la porte, demandant au gouvernement une "vraie discussion", quand le reste de la gauche se veut plus affirmative dans sa menace de censure.

Côté Rassemblement national, Marine Le Pen, dont le parti d'extrême droite a épargné le Premier ministre jusqu'ici, a également prévenu: "Si François Bayrou ne revoit pas sa copie, nous le censurerons."

En face, le camp présidentiel appelle à la discussion parlementaire et met en garde contre les conséquences d'une telle décision. "Il ne faut pas oublier ce que la censure crée comme instabilité politique et économique", dit la députée Renaissance Prisca Thevenot, ancienne porte-parole du gouvernement. "Une proposition a été faite par le Premier ministre et le gouvernement. Sur cette base, le débat parlementaire peut se mettre en œuvre", appuie-t-elle.

"Les oppositions ont intérêt à laisser Bayrou faire le boulot"

Si François Bayrou devra nécessairement faire des concessions pour éviter d'être renversé, certains jugent que le chef du gouvernement pourrait également compter sur la situation politique actuelle pour obtenir un compromis. Tout en restant prudent, un député Renaissance avance que "personne n'a intérêt à la censure ou à la dissolution."

"Je pense que les oppositions ont intérêt à laisser François Bayrou faire le boulot sur la partie budgétaire si elles espèrent gouverner. Cela leur permettra de partir sur des bases plus seines. Par ailleurs, en censurant elles prennent le risque d'un Premier ministre plus populaire que François Bayrou et d'une période d'instabilité avant les élections municipales", développe-t-il.

Si le scénario inverse se produisait, le chef du gouvernement a déjà préparé le terrain, lui qui a joué la filliation avec l'ancien président du Conseil, Pierre Mendès France. Ce dernier "est resté sept mois (huit en réalité, NDLR) à Matignon", mais "on en parle encore car il est apparu aux yeux de tous que cet homme disait la vérité, même si à l'époque les Français n'étaient pas prêts à fournir les efforts qu'il demandait", a-t-il déclaré à La Tribune Dimanche le 15 juin.

Baptiste Farge