Format, discours, objectifs: ce que l'on sait de la conférence de presse d'Emmanuel Macron jeudi

Emmanuel Macron. - Kenzo Tribouillard / AFP
Il a longtemps esquivé cet exercice qui avait fait les délices ou les frayeurs de ses prédécesseurs mais il va finalement s'y tenir, comme les autres. Ce jeudi, Emmanuel donne ainsi la première conférence de presse, portant sur des questions nationales, de son quinquennat.
Bien sûr, le chef de l'Etat échange fréquemment avec des journalistes lors de ses déplacements, leur a déjà officiellement présenté ses vœux par le passé et en a même reçu à l'Elysée. Mais jusqu'ici, il s'était refusé à la canonique addition du discours à domicile et de la séance de questions-réponses, le tout retransmis en direct à la télévision et à la radio.
En principe, il devait se plier dès mercredi dernier à ce face-à-face afin de livrer ses solutions à la crise des gilets jaunes, mais l'incendie lundi soir de la cathédrale Notre-Dame de Paris a repoussé l'événement. Après ce délai, les contours du rendez-vous de jeudi se dessinent enfin.
- A quoi la conférence va-t-elle ressembler?
Pour ce qui est du cérémonial, il ne faudra pas s'attendre à voir le président de la République transgresser une quelconque tradition. Il doit ouvrir la séance en prononçant un discours vers 18h, long sans doute d'une vingtaine de minutes, depuis la salle des fêtes de l'Elysée. Après cette prise de parole liminaire suivront les questions de la salle et ce, probablement pendant deux heures environ.
Selon France Info, Emmanuel Macron a d'abord pensé s'exprimer dans la soirée du lundi de Pâques. Mais des coups de fil passés par les siens aux chaînes de télévision pour s'enquérir des scores d'audience habituels de ce jour férié l'ont découragé. Parler un jeudi à 18h, et pour au moins deux heures, devrait à l'inverse lui permettre de profiter de l'effet Journal de 20h.
- Un impératif: apaiser la crise (avec une recette désormais connue)
Alors qu'elles ont fuité il y une semaine, les mesures prônées par l'Elysée ont eu largement le temps de transpirer du cénacle présidentiel. On compte ainsi: une baisse de l'impôt sur le revenu pour les classes moyennes, le retour de l'indexation des retraites des retraites de moins de 2000 euros sur l'inflation à partir du 1er janvier 2020, la baisse du nombre d'élus, l'accroissement de la dose de proportionnelle.
La présidence de la République envisage encore des mises en place de "référendums d'initiative citoyenne" concernant des questions locales. De manière plus surprenante, la suppression de l'ENA est évoquée, ainsi que la promesse de ne fermer aucune école ou hôpital d'ici la fin du mandat.
Il convient désormais de savoir si l'idée d'Emmanuel Macron a évolué ces derniers jours quant aux formules à trouver pour apaiser la colère d'une partie des Français. Un proche du chef de l'Etat a assuré à RTL que celui-ci ne dérogerait pas à la ligne initialement adoptée: "Les choses seront confirmées, précisées, enrichies".
- Ouvrir un nouveau chapitre avec les journalistes
Si les opposants à l'exécutif accusent parfois les médias de faire preuve de mansuétude à l'égard d'Emmanuel Macron, les relations entre ce dernier et la presse n'ont jamais vraiment été au beau fixe. L'un pointe une forme de superficialité journalistique, quand en face, on dénonce à l'occasion un complexe de supériorité, dévoilée notamment par des commentaires de l'entourage présidentiel, comme celui portant sur la supposée "pensée complexe" d'Emmanuel Macron, apparemment inadaptée aux interviews classiques.
La conférence de presse de ce jeudi va donc mettre en vis-à-vis de manière inédite les deux acteurs d'un conflit larvé. Mais il s'agira aussi pour Emmanuel Macron de polir ces aspérités. Dans L'Opinion, Arnaud Benedetti, spécialiste de communication politique, a analysé: "il essaie de réintégrer la presse dans sa communication. Il veut à la fois consolider ses annonces et montrer qu’il est prêt à affronter la presse politique". L'expert a poursuivi: "Il en revient aux fondamentaux à un moment où il se trouve dans une crise aiguë. Il est dans une stratégie de surexposition en matière de communication : il prend sur ses épaules l’ensemble de la crise."
- Un écueil: la clarté
Le mantra de Boileau est fameux: "Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément". Mais si les interventions d'Emmanuel Macron marquent régulièrement l'opinion publique, ce n'est pas forcément à la clarté qu'il le doit. Ce sont parfois ses commentaires à l'emporte-pièces ou ses performances horlogères, comme ses prestations à rallonge lors du débat national, qui sont restés.
Ses proches craignent particulièrement que des propos brumeux n'alourdissent son discours face à la presse. L'un d'entre eux a ainsi posé auprès du Parisien: "Ce n’est pas son fort. Il peut être facilement pontifiant, utiliser des mots trop compliqués ou technos".
Une sophistication excessive pourrait bien le desservir devant une opinion désireuse d'engagements clairs.