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Consigne de vote, législatives... Les dossiers qui attendent la droite après la déroute de Pécresse

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Alors que la course à la présidentielle vient de s'achever pour la droite, le parti pense à l'après. Il va devoir se mettre d'accord sur une position commune pour le second tour, tout en tentant d'éviter les ralliements vers Emmanuel Macron en amont des législatives...

Après la lourde défaite de Valérie Pécresse avec seulement 4,9% des voix, très loin derrière le score de François Fillon en 2017 (20,01%), l'heure est aux grandes manœuvres chez les Républicains. La droite traditionnelle joue sa survie après son troisième échec consécutif à la présidentielle. Position pour le second tour, stratégie pour les législatives... Les cadres du parti ont plusieurs dossiers chauds sur la table.

• Trouver une ligne commune pour le second tour

Premier dossier sur la table: la position du parti pour le second tour. Le sujet sera au cœur de la journée de lundi avec un comité stratégique, suivi d'un bureau politique puis d'une réunion entre députés et entre sénateurs. La candidate défaite a déjà fait savoir son choix. "Je voterai en conscience Emmanuel Macron pour empêcher l'arrivée au pouvoir de Marine Le Pen et le chaos qui en résulterait", a-t-elle expliqué à son QG de campagne dimanche soir.

Si cet appel à soutenir Emmanuel Macron n'est pas une surprise - la représentante de la droite, avait expliqué dans un tweet dès vendredi matin qu'elle "dirait clairement quel serait son vote" -, il ne préjuge en rien de la position du parti.

Plusieurs options sont la table, à commencer par un soutien au président sortant. "Je n'y crois pas un instant. On a perdu parce qu'on n'arrivait pas à se distinguer d'Emmanuel Macron. On va pas en plus encore en rajouter", juge un cadre LR.

Seconde option jugée la plus crédible: ni appel à voter pour Marine Le Pen ni soutien à Emmanuel Macron, ce qu'on appelle le "ni-ni" dans le jargon du parti.

"On va entendre quelque chose du style 'pas une voix ne doit aller à Marine Le Pen mais jamais nous ne ferons d'accord avec Emmanuel Macron'", juge un ancien collaborateur de l'équipe Pécresse.

"On va faire ce qu'on a fait en 2017, un communiqué où chaque mot aura été pesé trois fois et qui ne veut absolument rien dire", regrette de son côté une députée.

À l'époque, à l'issue d'un conseil politique particulièrement houleux au lendemain de la défaite de François Fillon, LR avait appelé ses électeurs à "voter contre Marine Le Pen pour la faire battre au second tour de la présidentielle". Sans jamais citer le nom d'Emmanuel Macron. L'ancien Premier ministre avait pourtant bien appelé à voter pour ce dernier dans son allocution de défaite.

"Il y aura une ligne de conduite mais qui n'empêchera jamais des prises de position indidivuelles, notamment pour Emmanuel Macron, de la part de proches de Nicolas Sarkozy", ajoute de son côté l'une des porte-paroles de campagne, Dominique Estrosi-Sassone. "Mais pas pour Marine Le Pen."

Des voix dissonantes ont déjà émergé. Contrairement à Valérie Pécresse, le député LR Eric Ciotti a refusé dimanche soir de donner une consigne de vote pour le second tour de la présidentielle, estimant qu'il ne se "reconnai(ssait) pas" dans la candidature d'Emmanuel Macron. Il avait expliqué qu'en cas de secour tour Zemmour-Macron, il voterait pour le polémiste, avant de rétropédaler quelques semaines plus tard.

• Éviter de nouveaux ralliements

Au-delà d'éventuels appels à voter pour le locataire de l'Élysée au second tour, l'entre-deux-tours chez les Républicains pourrait être marqué par des arrivées sur les bancs de la macronie. Certains à droite pourraient tenter leur chance en espérant devenir ministre, dans le cas d'une réélection d'Emmanuel Macron.

Le départ du député LR Éric Woerth a d'ailleurs été considéré par ses anciens proches comme une tentative pour l'ancien ministre de Nicolas Sarkozy de décrocher un nouveau maroquin ministériel. Même diagnostic pour le député Guillaume Larrivé, pourtant conseiller politique de Valérie Pécresse, qui a appelé à une "nouvelle majorité" avec Emmanuel Macron en cas de défaite de sa candidate.

"Moi, je ne crois pas aux départs massifs", jugeait de son côté Alexandra Borchio-Fontimp, directrice déléguée de la campagne de Valérie Pécresse, en amont du premier tour. "Ceux qui voulaient partir sont déjà partis. Et d'ailleurs, quand on voit les personnalités en question, elles ne représentent pas grand-chose."

En guise d'argument-massue pour éviter les départs vers le président, une grande partie des investitures LR pour les législatives ont déjà été verrouillées. Il faut dire qu'il y avait urgence: le député Thierry Solère, ex-LR et conseiller d'Emmanuel Macron, était à la manœuvre pour sonder les parlementaires potentiellement interessés par un ralliement.

Si certains sur les bancs de LaREM ont parlé d'une "quarantaine de députés" Macron-compatibles, l'état major du parti n'y croit pas et évoque plutôt "10 à 15 personnes maximum" auprès de BFMTV.com.

"Il n'y a pas vraiment beaucoup d'intérêt à rejoindre Emmanuel Macron pour se retrouver dans un énorme groupe à l'Assemblée, sans aucune responsabilité, coincé entre des nobody", attaque d'ailleurs un ancien cadre de la campagne.

Dernier argument qui rend une fuite des députés LR peu probable: le contexte de leur élection. "Ils ont gagné en 2017 face à un candidat LaREM donc ça donne des rapports de combativité", avance une parlementaire.

• Maintenir le nombre de députés

Sur les bancs des LR qui compte 100 députés, avant de connaître le score calamiteux de Valérie Pécresse, on croyait croit dur comme fer pouvoir limiter la casse aux législatives pour rester le deuxième groupe à l'Assemblée. Parmi les motifs d'espoir, le calendrier d'abord. "Elles auront lieu 2 mois après le premier tour, ce qui est tard, sans compter qu'Emmanuel Macron n'aura aucun état de grâce", estime un lieutenant de la droite.

La plupart des députés LR élus en 2017 ayant déjà siégé à l'Assemblée au moins à partir de 2012, ils bénéficient également d'un ancrage territorial relativement fort, comparé aux parlementaires LaREM.

"Je crois qu'on peut augmenter un peu notre groupe à l'Assemblée de 10 ou 15 personnes", espère même la sénatrice Dominique Estrosi-Sassone.

Il faut dire que les parlementaires, qui ne croyaient plus à la victoire de leur candidate depuis plusieurs semaines, se sont beaucoup repliés dans leur circonscription, au grand dam de Valérie Pécresse.

Mais la personnalité de Christian Jacob, le patron du parti qui sera le chef de fil epour ces élections n'enchante pas la droite. Certains l'accusent déjà de ne pas avoir de stratégie pour les législatives.

"Il a congelé le parti en empêchant de faire une primaire rapide, puis a été très mauvais dans la campagne. Et maintenant, les députés...", peste un cadre des LR.

Autre caillou dans la chaussure: l'ombre de Nicolas Sarkozy. Son entourage a fait savoir par la presse qu'un accord politique aurait été passé entre l'ancien président et Emmanuel Macron pour constituer une "future majorité" intégrant une quarantaine de députés... élus sous la bannière LR. De quoi empêcher définitivement la droite de se relever. Réponse dans quelques semaines.

Marie-Pierre Bourgeois