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Présidentielle

Affaire Fillon: la présidentielle peut-elle être reportée?

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Les affaires qui perturbent la campagne de François Fillon pourraient aussi bouleverser l'élection présidentielle. Si le Conseil constitutionnel estime que le candidat est "empêché", le scrutin peut être reporté. Un recours jamais utilisé et qui s'appuie sur une notion vague.

François Fillon a prévenu qu'il ira "jusqu'au bout" malgré les accusations dont il fait l'objet. Pourtant, le candidat de la droite à l'élection présidentielle peine à poursuivre sa campagne. L'ouverture d'une enquête sur les soupçons d'emplois fictifs concernant son épouse Penelope Fillon et leurs deux enfants aînés, les divisions au sein du parti Les Républicains et l'évocation d'un plan B, rendent le candidat peu audible.

Devant les parlementaires de son camp, il assurait: "On a quinze jours à tenir, dans quinze jours on aura le résultat (de l'enquête, NDLR)". Si au terme de ce délai, François Fillon est "empêché" de poursuivre sa campagne, la loi prévoit plusieurs recours aux contours assez flous.

Une notion vague

L'article 7 de la Constitution permet au Conseil constitutionnel de prononcer le report de l'élection si un des candidats "se trouve empêché". Il appartient aux Sages de décider de l'empêchement d'un candidat après une saisine du Conseil par "le président de la République, le Premier ministre, le président de l'une ou l'autre Assemblée, soixante députés ou soixante sénateurs, ou dans les conditions déterminées pour la présentation d'un candidat à l'élection présidentielle".

Mais cette notion "d'empêchement" reste vague, nous explique Dominique Rousseau, co-directeur de l'Ecole de droit de la Sorbonne. 

"L'empêchement n'est pas défini juridiquement pour l'instant mais il peut couvrir des cas comme un décès, une maladie ou une mise en examen."

C'est aux membres du Conseil constitutionnel "d'apprécier s'il y a empêchement", précise-t-il. "Un scandale peut être un cas d'empêchement", ajoute le juriste "car le candidat ne peut pas mener sa campagne sur son programme, c'est un argument qui peut être entendu". Dans le cas de la campagne de François Fillon, Dominique Rousseau observe qu'aujourd'hui le candidat "est empêché de développer son programme, les journalistes posent des questions sur sa femme et pas sur son programme".

Trois possibilités de report

Dans les faits, il existe trois cas de figure qui permettraient un report de l'élection présidentielle, si les Sages décident que le candidat ne peut mener sa campagne. 

"Sept jours avant la date limite du dépôt de la liste des candidats" (soit le 10 mars), le Conseil constitutionnel peut prononcer le report de ce dépôt, explique Dominique Rousseau. Si le candidat est "empêché avant le premier tour, le Conseil prononce le report de l'élection". Enfin si cet empêchement est constaté à l'entre-deux tours, les élections recommencent "dans leur totalité".

Sans exemple ni précédent, le Conseil constitutionnel prendrait donc une décision inédite s'il décidait de reporter l'élection présidentielle à la suite de l'affaire Fillon. 

"En 2012 il y a déjà eu une discussion à ce sujet", se rappelle Dominique Rousseau. A l'époque, Eva Joly la candidate EELV à la présidentielle avait fait une chute dans un escalier. Cet accident sans gravité avait laissé le temps de s'interroger sur cette notion d'empêchement.

Mélanie Longuet