ÉDITO - Après les révélations et ses explications sur BFMTV-RMC, François de Rugy peut-il tenir?

Il y a d'abord eu la révélation des riches dîners à l'Hôtel de Lassay, dont la nature amicale ou de travail interroge encore, puis celle des travaux dans son appartement de fonction du ministère de la Transition écologique, et enfin jeudi soir les informations selon lesquelles il louait toujours un logement à vocation sociale en Loire-Atlantique... le lendemain de l'éviction de sa directrice de cabinet pour des raisons très similaires. Convoqué et reçu longuement jeudi par le Premier ministre, François de Rugy était toujours titulaire de son portefeuille en sortant. C'était toutefois avant la divulgation de la location de son appartement d'Orvault, et conditionné à une inspection sur le coût des travaux commandés dans son domicile de fonction de l'Hôtel de Roquelaure.
Venu s'expliquer sur le plateau de BFMTV-RMC le ministre a assuré qu'il n'avait "absolument pas de raison de démissionner", et s'est targué du soutien de l'exécutif. Il a plus précisément martelé bénéficier du soutien du président de la République, Emmanuel Macron: "Oui, et il me l'a redit au conseil des ministres mercredi, et il m'a dit: 'Ne lâche pas'".
Toutefois, la question se pose et s'impose: la situation est-elle tenable pour François de Rugy ou va-t-il devoir démissionner du gouvernement?

"Les déplacements vont être difficiles voire impossibles"
Après avoir suivi la défense pied à pied de François de Rugy sur les différents volets des révélations journalistiques le concernant, et l'affirmation de ce soutien haut placé, notre éditorialiste politique Christophe Barbier estime que "tout ça fait une défense politique assez percutante" mais que "tout ça ne fait pas une réponse précise et détaillée".
Christophe Barbier a ensuite développé:
"Son action est entravée. A chaque fois qu’il va sortir, on va lui parler de ça. Incapacité pour lui de porter les projets de loi en cours notamment sur l’économie circulaire. A plus long terme, ce n’est pas facile pour un ministre de se remettre de cela parce que sa force politique en est terriblement diminuée. Il est numéro 2 du gouvernement, seul ministre d’Etat. Or, il est médiatiquement, politiquement, bien plus faible dans l’opinion qu’un Blanquer, qu’une Buzyn, qu’un Castaner, qu’un Le Drian qui sont pourtant moins gradés que lui. Donc, il faudra à un certain moment que le gouvernement en prenne acte".
Quelques instants avant l'intervention du ministre sur BFMTV-RMC, Christophe Barbier avait déjà livré son analyse.
"Il est déjà affaibli politiquement. Les prises de parole, les déplacements vont être difficiles voire impossibles dans les semaines ou les mois qui viennent. L’horizon du remaniement, c’est plutôt l’après-municipales, ça lui laisse du temps pour se requinquer et se remettre au service de la transition écologique".

"Rugy est en sursis"
Laurent Neumann, également éditorialiste politique de BFMTV, a évoqué les difficultés du ministre avant la tenue de l'entretien.
"Il est en sursis. C’est exactement le mot qui convient. Deux signes ne trompent pas: tout d’abord hier, on ne s’est pas bousculé, c’est le moins que l’on puisse dire, pour le défendre dans la majorité. Certains parlent même de défense light. Deuxième signe qui ne trompe pas: ce n’est pas Emmanuel Macron qui est en première ligne, c’est Edouard Philippe et son entrevue avec François de Rugy a duré très longtemps. Que se sont-ils dit ? D’abord, ils ont passé au peigne fin tous les éléments de l’affaire. Et ils sont allés jusqu’à scanner une partie de la vie de François de Rugy pour savoir s’il y aurait d’autres révélations. Qu’est-ce qui fait peur au gouvernement? Le feuilletonage. Et quelle est l’image que l’on veut donner aux Français? Surtout ne pas céder au lynchage mais ne pas non plus donner le sentiment que le ministre jouit d’une forme d’impunité".
En marge de ces réflexions, deux ministres se sont par ailleurs épanchés dans les colonnes du Parisien ce vendredi, avant le passage matinal de François de Rugy au micro de Jean-Jacques Bourdin. Leurs propos soulignent encore davantage la fragilité de la position de François de Rugy.
"On ne peut pas passer un 14-Juillet avec ça", a dit l'un, tandis qu'un autre lâchait: "Les gens se disent: 'Ils se gavent aux frais de la République'. Je ne sais pas comment on va se tirer de ce merdier".