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Terrorisme

Le premier policier à être entré dans le Bataclan: "j'étais persuadé de mourir"

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Le premier policier a avoir pénétré dans le Bataclan le soir du 13 novembre, alors que les terroristes avaient commencé à commettre un carnage, est revenu au micro de France Info sur cette intervention, au cours de laquelle il était persuadé qu'il allait mourir.

Un mois après les attentats, il livre un témoignage poignant. L'un des deux premiers policiers a être entrés dans le Bataclan le soir du 13 novembre, qui a abattu l'un des assaillants, est revenu au micro de France Info sur cette soirée, qui n'aurait dû n'être qu'une permanence comme les autres.

"On se dit 'ils sont tous morts'"

Ce chef de service au sein de la BAC, la Brigade anti-criminalité, en poste dans l'agglomération parisienne, a souhaité garder l'anonymat. Il est en route avec son collègue vers le Stade de France, où vient de se produire une première explosion, quand il reçoit une autre alerte, qui le redirige vers le 11e arrondissement, théâtre, avec le 10e arrondissement, de plusieurs fusillades. Arrivés devant le Bataclan, où trois terroristes sont en train de commettre un carnage, ils décident d'intervenir sans attendre les renforts. En l'espace de quelques secondes, ils sont confrontés à des scènes d'effroi.

"Les gens sortent en hurlant, nous disent 'vite, vite rentrez, ils nous tirent dessus', sans nous donner de noms car ils sont complètement paniqués. Rapidement, on décide de rentrer à l'intérieur du Bataclan", raconte le policier. "Ce qui nous surprend immédiatement, c'est la lumière, extrêmement forte, qui nous aveugle. Le silence ahurissant, parce que quelques secondes avant il y avait des hurlements, des tirs en rafale de kalachnikov, des cris. A peine on rentre dans cette salle, il n'y a plus un bruit. Et puis des centaines de corps les uns sur les autres. Là on se dit, 'ils sont morts'. C'est un moment d'effroi indescriptible". 

"J'étais persuadé de mourir ce soir-là"

Les deux policiers ne disposent que de leur arme de service et d'un léger gilet pare-balles. Le commissaire repère vite l'un des trois assaillants: il est sur la scène, et vise un otage avec son arme. "Vu le carnage, on a aucun doute sur ce qu'on doit faire. On engage le tir immédiatement. On tire jusqu'à ce qu'il tombe au sol. Dans la foulée, une explosion surgit. Là, on se rend compte qu'ils sont susceptibles de se faire exploser avec leurs ceintures", détaille le commissaire.

L'otage parvient à s'enfuir et est aujourd'hui sain et sauf. Mais les policiers essuient des tirs de kalachnikov, venus du balcon. C'est à ce moment précis qu'ils réalisent que plusieurs terroristes se trouvent dans la salle. Certains qu'ils vont mourir sur place, les deux hommes saisissent leurs téléphones, et appellent leurs femmes.

"J'avais la certitude qu'on ne reculerait pas. On avait décidé, avec mon équipier, qu'on ne laisserait pas ces gens sans nous. J'étais persuadé de mourir ce soir-là. J'ai donc laissé un message à ma compagne pour lui dire adieu, juste quelques secondes, pour lui dire ce que j'avais à lui dire, et qu'elle ne me reverrait certainement plus jamais". 

"Ce qui a été très dur, c'est d'avoir engagé la vie des mes hommes"

Les deux policiers parviendront finalement à sortir du Bataclan, pour retrouver les renforts de la BAC arrivés sur les lieux. Ils pénétreront à nouveau dans la salle, en effectif renforcé, pour sécuriser le rez-de-chaussée. Jusqu'à l'assaut de la BRI

Un mois après cette terrible nuit, le commissaire a repris le travail. Il n'a pas consulté de psychologue, mais a posé des mots sur ses souvenirs dans une longue lettre, qu'il a lue à ses hommes. "Moi, je n'ai pas trop de difficultés à le digérer", assure-t-il. "Ce sont plutôt mes proches qui ne comprennent pas toujours qu'on puisse sacrifier sa vie pour sauver d'autres personnes. Ce qui a été très dur, en revanche, c'est d'avoir engagé la vie des mes hommes, qui sont tous pères de familles. Je m'en suis rendu compte après-coup".
Adrienne Sigel