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Police-Justice

Sarkozy en garde à vue: les précédents judiciaires des Présidents

L'ancien président Jacques Chirac lors d'une commémoration en 1998 à Paris

L'ancien président Jacques Chirac lors d'une commémoration en 1998 à Paris - -

Nicolas Sarkozy a été placé en garde à vue mardi matin dans le cadre de l'enquête sur les soupçons de trafic d'influence et de violation du secret de l'instruction. Une mesure inédite pour un ancien Président.

La nouvelle est tombée tôt mardi matin: Nicolas Sarkozy a été placé en garde à vue dans le cadre de l'enquête sur les soupçons de trafic d'influence et violation du secret de l'instruction, liés à l'affaire de financement libyen de sa campagne en 2007.

Actuellement interrogé à l'office anti-corruption de la police judiciaire à Nanterre, les enquêteurs tentent de savoir si l’ancien chef de l’Etat a obtenu des informations sur des affaires judiciaires le concernant, grâce à des hauts magistrats qui pourraient avoir brisé le secret de l’instruction, en échange de la promesse d'un poste de prestige.

Si l'implication d'un ancien Président dans des dossiers embarrassants n'est pas une première, son placement en garde à vue relève de l'inédit. Pour quelles raisons? Comment certains ont-ils pu y échapper alors que d'autres ont été condamnés? Retour sur les précédents judiciaires de nos anciens chefs d'Etat.
dans l'affaire de financement libyen de sa campagne.

> Chirac et les emplois fictifs de la mairie de Paris

L'affaire. Celle-ci remonte à l'époque où Jacques Chirac était maire de la capitale (1997-1995). Deux volets se détachent du dossier.

Dans le premier, Jacques Chirac est accusé d'avoir complaisamment embauché 21 chargés de mission, rémunérés par la ville de Paris, au bénéfice de structures extérieures à la municipalité. Certains n'ont même jamais travaillé.

Dans le second volet de l'affaire, il est reproché à l'ancien maire d'avoir fait rémunérer par la Ville de Paris entre 1990 et 1994 sept employés qui travaillaient en réalité pour son parti politique, le RPR.

Epilogue. Le 21 novembre 2007, soit six mois après la fin de son second mandat, Jacques Chirac est mis en examen pour "détournement de fonds publics" dans le cadre de l'enquête sur les emplois fictifs de la mairie de Paris. Deux ans plus tard, dix personnes, dont Jacques Chirac, sont renvoyées en correctionnelle, pour "21 supposés emplois fictifs". C'est la première fois qu'un ancien président est renvoyé en correctionnelle.

Plus inédit encore, l'ancien chef d'Etat est condamné à deux ans de prison avec sursis pour "détournement de fonds publics", "abus de confiance", "prise illégale d'intérêts" et "délit d'ingérence", contre l'avis du parquet, qui avait requis la relaxe.

Atteint de troubles neurologiques "sévères" et "irréversibles" selon un rapport médical, Jacques Chirac est absent lors du jugement. Dans une déclaration lue par l'un de ses avocats, il affirmait n'avoir "commis aucune faute pénale ou morale", et n'a pas souhaité par la suite faire appel de la décision de justice.

> Mitterrand et les écoutes de l'Elysée

L'affaire. Le nom de François Mitterrand a lui aussi été associé à des affaires, notamment à celle dite des "écoutes de l'Elysée". Entre janvier 1983 et mars 1986, près de 3.000 conversations téléphoniques, plus ou moins illégales, ont été enregistrées sous le septennat du président socialiste. Une enquête judiciaire a été ouverte.

Epilogue. Mais ce n'est que douze ans après l'ouverture de l'enquête que le tribunal correctionnel de Paris statue sur l'affaire. Le 9 novembre 2005, la justice condamne sept anciens collaborateurs du Président Mitterrand, alors lui-même désigné comme "l'inspirateur et le décideur de l'essentiel".

"Un délai que l'on peut expliquer par l'immunité présidentielle dont bénéficiait à l'époque François Mitterrand", rappelle Jean Guarrigue, spécialiste de l'histoire politique. Et lorsque son mandat se finit en mai 1995, la maladie l'empporte quelques mois plus tard en janvier 1996.

> Giscard d'Estaing et les diamants

L'affaire. Elle remonte à avril 1973, et est révélée par Le Canard Enchaîné. Valery Giscard d'Estaing reçoit, selon le quotidien satirique, de l'ancien empereur de Centrafrique Bokassa, une plaquette de diamants dont la valeur serait estimée approximativement à un million de francs (environ 150.000 euros). D'après la loi, seul le président de la République est dispensé de déclarer en douane à son retour en France les cadeaux reçus à l'étranger. A l'époque, VGE n'était pas encore élu président mais ministre des Finances. Or, il ne les aurait pas déclarés.

Epilogue. Le 27 novembre 1979, le Président Giscard d'Estaing déclare dans un entretien télévisé: "Avant que mon mandat ne s'achève, tous les cadeaux que j'ai reçus, et dont la liste sera conservée, auront été utilisés à l'une ou l'autre de ces fonctions, c'est-à-dire œuvres de bienfaisance ou musées". Le dossier en restera là mais il servira d'exemple pour ses successeurs. En effet, afin d'éviter une polémique semblable, François Mitterrand et Jacques Chirac ont rassemblé l'ensemble des cadeaux protocolaires et diplomatiques qu'ils ont reçus durant leur mandat présidentiel dans des musées dédiés.

Mélanie Godey