BFMTV
Police-Justice

Assassinat de Samuel Paty: le tueur était en contact avec un membre du groupe islamiste qui a renversé Assad

placeholder video
Le 16 octobre 2020, Abdoullakh Anzorov a notamment envoyé une photo de la tête décapitée du professeur d'histoire-géographie à Farroukh Faizimatov, un membre du groupe Hayat Tahrir al-Sham.

Ancienne branche d'Al-Qaïda en Syrie, Hayat Tahrir al-Sham (HTS), le groupe islamiste à la tête de la coalition rebelle qui a provoqué la chute de Bachar al-Assad ce week-end, a rompu ses liens avec l'organisation terroriste en 2016 et s'efforce depuis plusieurs années de présenter un visage plus modéré. Le 16 octobre 2020, jour de la mort de Samuel Paty, l'assassin du professeur, Abdoullakh Anzorov, était pourtant en contact avec Farrouk Faizimatov, un membre du groupe HTS, a appris BFMTV ce lundi 9 décembre de source proche de l'enquête.

Peu après l'assassinat du professeur d'histoire-géographie à Éragny-sur-Oise, et avant qu'il ne soit abattu par des policiers, Abdoullakh Anzorov a envoyé à Farrouk Faizimatov une photographie de la tête décapitée de Samuel Paty ainsi qu'un message de revendication.

"Allah Akbar, que la paix et la bénédiction d'Allah soit sur vous", a répondu Farroukh Faizimatov, jihadiste russophone originaine du Tadjikistan se présentant comme blogueur et également connu sous le nom de Faruq Shami.

Douze jours avant la mort de Samuel Paty, le 4 octobre 2020, Abdoullakh Anzorov faisait également l'éloge du groupe Hayat Tahrir al-Sham dans un message publié sur un groupe Snapchat auquel il appartenait.

"Il n'y a pas de doute que ce qui se passe à Idleb est le vrai jihad où Allah choisit ses serviteurs. Le meilleur groupe actuel à rejoindre c'est Hayat Tahrir Al-Sham", affirmait le jeune Tchétchène de 18 ans selon une source proche de l'enquête.

Une vidéo ciblant la France en septembre 2020

Les juges d'instruction chargés de l'enquête sur l'assassinat de Samuel Paty estimaient à l'époque qu'il n'existait pas de "de lien direct entre Faruq Shami et Abdoullakh Anzorov ayant conduit à la commission des faits", expliquait une source proche du dossier à BFMTV.

En novembre 2022, le parquet national antiterroriste (PNAT) avait également ouvert une enquête préliminaire pour "provocation à un acte terroriste" à l'encontre de Farroukh Faizimatov. Elle avait finalement classé l'enquête préliminaire au motif "auteur inconnu".

Farroukh Faizimatov, qui se trouvait en août 2020 à 20 kilomètres d'Idleb, ville du nord-ouest de la Syrie et bastion de HTS, exerçait des activités au profit du groupe et collectait de l'argent au bénéfice de ses combattants. Il apportait également un soutien dans le cadre du travail médiatique de Hayat Tahrir al-Sham par l'animation de certains de ses canaux d'information.

Ce membre de HTS est par ailleurs également soupçonné d'avoir diffusé le 13 septembre 2020 une vidéo sur Instagram ciblant la France une dizaine de jours après la republication des caricatures de Mahomet par l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo.

À ce jour, Hayat Tahrir Al-Sham, dirigé par Abou Mohammad al-Jolani, est toujours classé comme un groupe "terroriste" par les chancelleries occidentales. Comme l'a rappelé ce lundi Anouar El Anouni, un porte-parole du service diplomatique de l'Union européenne, le groupe et son dirigeant restent sous le coup de sanctions de la part de Bruxelles qui prévoient notamment un gel des avoirs.

"Alors que HTS prend davantage de responsabilités, nous aurons besoin d'évaluer non seulement leurs paroles, mais aussi leurs actions", a-t-il précisé, tout en faisant savoir que l'Union européenne n'était, pas à ce stade, en contact avec Hayat Tahrir Al-Sham ou ses dirigeants.

Matthias Tesson avec Vincent Gautier