Un journaliste français emprisonné en Turquie pour "assistance à une organisation terroriste"

Le drapeau de la Turquie. Photo d'illustration - Flickr / alexeyklyukin
Un journaliste indépendant français a été placé en détention mardi par les autorités turques qui le soupçonnent d'activités "terroristes" en lien avec des combattants kurdes de Syrie, ont indiqué mercredi des sources judiciaires.
Loup Bureau, qui a notamment collaboré avec la chaîne française TV5 Monde et se présente sur Twitter comme un étudiant en journalisme, avait été interpellé la semaine dernière au poste-frontière de Habur, entre l'Irak et la Turquie.
Photos en compagnie des combattants kurdes syriens
Après avoir passé cinq jours en garde à vue, il a été incarcéré dans la ville de Sirnak, dans le sud-est à majorité kurde de la Turquie, selon les sources judiciaires. Sirnak est située dans la province du même nom, frontalière de l'Irak et de la Syrie.
Une source sécuritaire citée par l'agence progouvernementale Anadolu a affirmé que Loup Bureau avait été arrêté après que les autorités ont découvert qu'il détenait des photos le montrant en compagnie de combattants kurdes syriens des YPG. Le gouvernement turque considère cette milice comme une extension des séparatistes kurdes de Turquie (PKK).
Le jeune homme de 27 ans a alors été placé en détention pour "assistance présumée à une organisation terroriste". Les YPG et le PKK sont classés organisations "terroristes" par la Turquie, qui les combat militairement. Les Etats-Unis, pour leur part, soutiennent au contraire les YPG contre les jihadistes du groupe Etat islamique (EI).
"Quelque chose de courant en Turquie"
Loup Bureau a réalisé il y a trois ans un reportage auprès des YPG, dans le nord de la Syrie, diffusé par TV5 Monde. Le journaliste a publié la vidéo sur sa page personnelle sur le site de partage Vimeo.
"Nous suivons avec la plus grande attention la situation de notre compatriote détenu en Turquie et sommes en relation avec sa famille", a indiqué à l'AFP le ministère français des Affaires étrangères.
Interrogé par franceinfo, le responsable du bureau Europe de l'Est-Asie centrale de Reporters sans Frontières, Johann Bihr, s'est pour sa part exaspéré de cette situation:
"On lui reproche d’avoir essayé de faire son travail, d’avoir couvert la question kurde qui est une question majeure au Proche-Orient en ce moment", a-t-il lancé. "C’est malheureusement quelque chose de courant, voire de systématique en Turquie, d’être accusé de terrorisme, lorsque l’on s’attache à ce genre de sujets".
Une affaire similaire à celle de Mathias Depardon
Cette affaire rappelle le cas de Mathias Depardon, un photojournaliste français arrêté dans le sud-est de la Turquie en mai et expulsé après un mois de détention et une importante mobilisation. Les autorités turques le soupçonnaient d'avoir fait de la "propagande terroriste" pour le compte du PKK pour avoir diffusé sur les réseaux sociaux des photos prises au cours d'un reportage.
Les organisations de défense de la liberté de la presse dénoncent des atteintes régulières à cette liberté de la part des autorités turques, notamment depuis la tentative de coup d'Etat du 15 juillet 2016. La Turquie occupe la 155e place sur 180 au classement 2017 de la liberté de la presse établi par Reporters sans Frontières.