"Ils m'ont protégé avec leur corps": un rescapé du bombardement de la gare de Kramatorsk témoigne

Vladislav se tient figé sur son lit d'hôpital, les muscles raidis par les douleurs qui traversent son corps. Ce jeune Ukrainien a survécu à l'attaque menée par l'armée russe le vendredi 8 avril sur Kramatorsk, dans le Donbass. 57 personnes sont mortes ce jour-là sous le feu des deux missiles qui se sont abattus sur la gare de la ville, alors que de nombreux civils s'apprêtaient à quitter cette commune de l'est de l'Ukraine, aujourd'hui nouvel objectif militaire principal de l'armée russe.
"Ils m'ont protégé de la mort"
Aujourd'hui hospitalisé à l'hôpital Dobrobut de Kiev, le jeune homme, dont le corps a été meurtri par une trentaine d'éclats, a accepté de témoigner auprès des équipes de BFMTV.
"J'ai d'abord entendu une explosion, c'était très près de moi, je ne comprenais pas. Après ça, j'ai entendu un deuxième sifflement, et je me suis jeté au sol, en essayant de me protéger. Tous les gens autour de moi ont été tués, et moi, j'ai survécu. Ils m'ont protégé avec leur corps. Ils m'ont protégé de la mort", raconte-t-il.
Sa mère, Elena, se trouvait non loin de son fils le jour de l'attaque. Présente à ses côtés dans sa chambre d'hôpital, elle se rappelle comment elle a tant bien que mal tenté de lui prodiguer les premiers secours afin qu'il ne succombe pas à ses blessures.
"J'ai fait un garrot sur une jambe, et après, j'ai vu que la deuxième saignait aussi beaucoup. J'ai crié 'une ambulance!', et j'ai ensuite vu un monsieur courir. Je lui ai demandé d'appeler une ambulance, et de me donner sa ceinture. Il l'a enlevée, et j'ai fait un deuxième garrot", se souvient-elle pour BFMTV.
Un patient traumatisé
Si le jeune homme devrait à nouveau être en capacité de marcher d'ici deux semaines, un mal invisible et plus insidieux que les blessures physiques s'est emparé de Vladislav.
"La difficulté pour lui, c'est que son traumatisme psychique est aussi grave que son état physique. C'est pour cela que les psychologues ont déjà commencé à travailler avec lui", relate le médecin en chef de l'hôpital Dobrobut, Igor Vysotskyi.
Le cas de Vladislav laisse entrevoir le second mal qui pourra s'abattre sur l'Ukraine, une fois que le conflit sera terminé. Celui d'une population traumatisée par les horreurs dont elle a été victime, en grande détresse psychique. Un constat qui n'empêche pas Vladislav de vouloir rejoindre l'armée ukrainienne dès que son état physique le lui permettra.
Après le bombardement de la gare le 8 avril, l'armée russe continue de son côté à viser la ville de Kramatorsk. Ce jeudi, une usine se situant à l'entrée de la commune a été visée, et les civils ont presque déserté cette cité auparavant forte de 150.000 habitants. Les quelques Ukrainiens restants attendent fébrilement un possible assaut des troupes russes, qui après s'être retirées de Kiev, considèrent aujourd'hui le Donbass comme leur objectif militaire principal.